Dans une récente chronique, le philosophe Michel Seymour tente de nous convaincre de voter, aux prochaines élections fédérales, pour le NDP/NPD. Il affirme d'emblée que la question sociale est aussi importante que la question nationale, comme s'il s'agissait de déterminer que l'œuf est plus important que la poule.
Puis, il y va de quelques affirmations des plus étonnantes. Premièrement, que «le projet de pays, ça se règle d'abord et avant tout au Québec». Grosse nouvelle! Si c'était le cas, il y a belle lurette que nous serions libres et indépendants et nous aurions gagné le référendum de 1995.
Notre problème, Monsieur Seymour, c'est Ottawa, c'est le gouvernement canadien, quel que soit sa couleur, qui s'immisce dans nos affaires internes, qui veut gouverner à notre place, qui nous met des bâtons dans les roues, qui menace de nous appauvrir si nous votons pour le OUI à un référendum sur la souveraineté, qui envoie l'armée comme en 1970, qui définit la politique internationale en ne tenant pas compte de nos intérêts et de notre volonté de paix et de coopération, qui impose ses traités sur le commerce international et l'immigration, qui taxe mais qui ne nous retourne pas notre juste part, qui favorise les autres provinces par ses investissements au détriment du Québec, qui utilise notre territoire, y compris le fleuve Saint-Laurent, comme bon lui semble, sans tenir compte de notre souveraineté - il nous a dépossédé du Labrador sans nous demander notre avis -, qui impose la langue de la majorité canadienne, l'anglais, dans la plupart de ses communications et encourage la bilinguisation du Québec et l'infériorisation du français quand ce n'est pas l'anglicisation de nos institutions - dans les régions de Pontiac, de l'Outaouais et de Montréal, le français est en net recul -, qui trafique l'histoire à son profit en cachant que nous sommes une nation conquise par la force et que des patriotes ont donné leur vie pour en finir avec cette domination, qui maintient un régime monarchique désuet que le Québec est obligé de financer, qui a parqué les Premières nations dans des réserves, etc. Je continue, M. Seymour?
Deuxièmement: «L'enjeu social numéro un est celui des sables bitumineux». Sans vouloir minimiser l'importance de cette question, il me semble qu'il y a des enjeux sociaux autrement plus importants. Il y a, entre autres, le vol de la caisse d'assurance-emploi. Le gouvernement fédéral a puisé des millions de dollars depuis des années - cela représente aujourd'hui des milliards - dans les surplus de l'assurance-emploi pour gérer différents programmes et réduire son déficit, alors que le but d'une telle caisse, construite à même les cotisations des travailleurs et des employeurs, est d'aider économiquement les chômeurs. Le Québec est particulièrement affecté par ce vol car le taux de chômage y est plus élevé que la moyenne canadienne. Des gens sans emploi, M. Seymour, ça doit continuer de manger et de payer leur loyer, sans parler des autres besoins élémentaires, comme l'éducation et la santé.
Remarquez que M. Seymour réussit une belle pirouette digne des exploits de Nadia Comaneci en 1976: «Certes, le NPD n'est pas clairement contre ce projet [Énergie Est de la TransCanada Corporation], et le Bloc, lui, y est clairement opposé. Toutefois, si une majorité de bloquistes sont élus, leur opposition au projet ne changera pas grand-chose et cela fera autant d'élus du NPD en moins en provenance du Québec. Cela favorisera le retour du Parti conservateur.» Ouf! Voici un philosophe qui pratique joyeusement le sophisme. Bref, si on élit des députés NPD au Québec, cela va aider à battre le Parti conservateur... mais n'aidera en rien à bloquer le projet d'oléoduc alors que Seymour faisait des sables bitumineux son enjeu social numéro un! C'est du n'importe quoi. Mais, nous prévient-il, le député du NPD Alexandre Boulerice ferait des pressions en coulisses. Chut! ne le dites pas trop fort, il pourrait se faire taper sur les doigts à moins qu'il ne se prête au jeu du «bon cop bad cop», avec la bénédiction de son chef.
Le reste de sa chronique est truffé d'autres sophismes et clichés du genre: «Le retour de Gilles Duceppe ne fait que diviser le vote et contribuer à la réélection de Harper». C'est exactement ce qu'ont fait ses amis de Québec solidaire aux dernières élections provinciales. Ou encore: «Gilles Duceppe est, en fait, encore en train d'accorder plus d'importance à la question nationale qu'à la question sociale». Mais oui, et il ne s'en cache pas. La question nationale en est une de survie. Ou encore: «Il n'y a pas que le Québec. Il y a aussi le sort de l'humanité entière». Nous n'en doutons pas, M. Seymour, et c'est la raison pour laquelle nous voulons un pays, qui siège dans le concert des nations en faisant entendre énergiquement sa voix propre.
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