Un moratoire partiel

Gaz de schiste





L'amateurisme du gouvernement Charest est consternant dans le dossier du gaz de schiste, une filière énergétique qui, si on ne redresse pas la barre, pourrait bien subir un sort aussi funeste que la centrale du Suroît...
Car on peut bien faire miroiter 10 000 emplois, un milliard de dollars en investissements et des milliers de tonnes de gaz à effet de serre en moins, à peine une infime portion de tout cela verra le jour si la population maintient son opposition d'un bloc, comme elle l'a fait en 2004 contre le projet du Suroît.
Mordante ironie: l'homme ayant piloté le dossier de la centrale au gaz à l'époque, André Caillé, est aujourd'hui à la tête du lobby gazier...
Est-il trop tard pour renverser la vapeur? Non. Malgré l'énorme méfiance que suscitent le gouvernement Charest et l'industrie du gaz de schiste, il y a encore suffisamment de temps, d'ici le printemps, pour convaincre la population du bien-fondé d'une exploitation durable et profitable du gisement de l'Utica.
Pour ce faire, le gouvernement doit d'abord prendre ses distances d'une industrie avec laquelle elle est par trop familière. On pense évidemment à tous ces membres de la famille libérale assis aux premières loges, en attente d'un boum qu'elle semble voir venir depuis un certain temps.
Mais on parle aussi de la ministre Normandeau, qui réitère sans cesse son intention d'aller de l'avant, peu importe les conclusions du BAPE et des trois groupes de travail mandatés pour «encadrer» l'industrie.
Seul son collègue Pierre Arcand ose certains bémols à l'occasion, ce qui n'a rien de rassurant quand on connaît l'ascendant qu'exerce le ministère des Ressources naturelles sur celui de l'Environnement.
Si le gouvernement Charest entend prouver qu'il agit bel et bien comme gardien du bien collectif, une rupture est donc nécessaire.
Québec peut fort bien déclarer un moratoire partiel sur l'exploration du gaz de schiste. Sans aller aussi loin qu'un arrêt total de la prospection en cours, ce qui coûterait très cher à l'État, le gouvernement peut à tout le moins cesser de délivrer de nouveaux permis d'exploration jusqu'à l'adoption d'un cadre réglementaire.
En outre, il doit confirmer haut et fort son intention de rompre avec les habitudes fiscales de l'actuel régime minier, un geste encore plus nécessaire depuis les révélations faites par La Presse, samedi. On y apprenait que le Québec, en comparaison avec la Colombie-Britannique, exige des redevances ridiculement basses: un ratio de 1 pour 10 000!
Le Québec pourrait s'inspirer de l'Alberta, qui a mis sur pied il y a quelques années un comité indépendant pour l'aider à fixer de nouvelles redevances énergétiques. Un tel groupe pourrait oeuvrer parallèlement au BAPE, ce qui permettrait à ce dernier de se concentrer sur les aspects environnementaux et sociaux de son mandat.
Si, au contraire, le gouvernement maintient ses positions, il risque de faire face à une fronde croissante. Comme en 2004.


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