Un appui renouvelé au Québec

Rien ne laisse penser que la position française à l'égard de l'indépendance du Québec ait changé

2006 textes seuls


Depuis bientôt 40 ans, se pose à intervalles réguliers la question de l'éventuelle reconnaissance internationale d'un Québec souverain par la France. Or que peut-on en dire?
Le gouvernement français, huit ans après la démission du Général, en 1977, exprimait, par la voix d'Alain Peyrefitte, alors ministre de la Justice, sa politique québécoise par cette formule de " non-ingérence, non-indifférence " qui est constamment reprise encore aujourd'hui par les médias tant à Paris qu'au Québec. Pourtant, dès la première visite officielle de René Lévesque en France, en novembre de cette même année, à la demande du gouvernement québécois qui la trouvait beaucoup trop ambiguë et malgré les explications d'Alain Peyrefitte qui la considérait comme une parfaite litote, elle fut remplacée. Bernard Dorin, alors directeur d'Amérique au Quai d'Orsay, et moi-même en concoctâmes une nouvelle que le président Giscard d'Estaing utilisa au moment où il reçut René Lévesque à l'Élysée: " Ce que vous attendez de la France c'est sa compréhension, sa confiance et son appui. Vous pouvez compter qu'ils ne vous manqueront pas le long de la route que vous déciderez de suivre. "
Depuis, cette formule de " l'accompagnement " a été déclinée de toutes les manières et de toutes les façons avec des variantes sur la forme, selon les personnalités et leur appartenance politique. Mais la substance en est restée la même. Jusqu'à ce jour.
La France au premier rang
Ainsi Jacques Chirac, candidat à la présidentielle en 1995, déclara-t-il, en présence de Jacques Parizeau, aux journalistes qui l'accompagnaient: " La France devrait être sans aucun doute au premier rang de ceux qui diraient au Québec que nous marchons avec lui... Les nations francophones et en particulier la France devraient être immédiatement aux côtés des Québécois et reconnaître la nouvelle situation. " Il récidivera quelques semaines avant la tenue du référendum en répondant au célèbre animateur Larry King qui le questionnait, au réseau CNN, sur la position de la France dans l'éventualité d'une victoire du OUI: " I will recognize a fact. " Ce qu'il répétera, enfin, à Lucien Bouchard en visite officielle en France en 2000: " La France accompagnera le Québec quel que soit le chemin qu'il choisira d'emprunter. " Michel Rocard, Alain Juppé, Philippe Séguin, Lionel Jospin, Jean-Pierre Raffarin, Laurent Fabius, et de nombreux autres responsables politiques français, de gauche comme de droite, ont tenu jusqu'à aujourd'hui le même langage, en public ou en privé.
Or Philippe Douste-Blazy, l'actuel ministre des Affaires étrangères, a-t-il dérogé à cette règle bien établie lors de son passage à Ottawa et à Montréal, la semaine dernière? Eh bien non. À Ottawa il a, en effet, pu sembler avoir oublié que la France officielle répète, à chaque fois qu'elle en a l'occasion, son " mantra " en ce qui concerne l'avenir politique du Québec et l'on a pas très bien compris ce qu'il voulait dire. Mais à Montréal en entrevue au téléjournal de Radio-Canada, il s'est montré explicite, probablement convaincu par le Consulat général de France à Québec de la pérennité de cette politique- un consulat bien au fait de toutes les subtilités et susceptibilités diplomatiques des uns et des autres- et il a affirmé- ce que l'on peut retrouver sur le site Internet de la télé de la SRC: " Tout ce que vous ferez (parlant des Québécois), je le respecterai ", " Tout ce que le Québec décidera, la France le respectera " et enfin " La France accompagnera toujours le Québec. "
Cet appui renouvelé au Québec, le premier du gouvernement dirigé par Dominique de Villepin, est tout à fait opportun au moment où il est fortement possible que le Parti québécois reprenne le pouvoir et organise, par conséquent, un autre référendum.
Beaudoin, Louise. Ancienne ministre péquiste des Relations internationales l'auteure est professeure associée au département d'histoire de l'UQAM.


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