Il y a 30 ans, l'Assemblée nationale adoptait la loi 101. Bien plus qu'une loi, la Charte de la langue française est aujourd'hui un instrument fondamental de l'affirmation de notre identité. Peu importe notre allégeance politique, l'anniversaire de l'adoption de la Charte de la langue française nous interpelle. J'ai grandi dans le Québec de la loi 101. J'ai grandi dans un Québec où la langue officielle de l'État était le français, où la langue de travail était le français et où le visage français du Québec allait de soi.
Trente ans plus tard, il faut souligner la contribution remarquable de ceux et celles qui ont contribué à l'adoption de la Charte de la langue française. Il convient aussi de tracer un bilan de ses effets structurants pour la société québécoise. Sur le plan de nos politiques linguistiques, il importe également d'identifier les nouveaux défis auxquels le Québec est maintenant convié comme société francophone d'Amérique.
Un bilan positif
Les Québécois francophones constituent à la fois une minorité au sein du continent et une majorité sur notre territoire. Cela implique une recherche constante de l'équilibre entre la protection de la langue commune des Québécois qu'est le français et la protection des droits de la minorité. La loi 101, après maints épisodes de conflits, a permis au Québec d'atteindre cet équilibre.
Conformément à l'esprit des législateurs de 1977, la loi 101 s'est avérée un outil efficace d'intégration, de francisation et d'affirmation tant culturelle qu'économique. Le Québec a un visage français. On a vu apparaître des enfants de la loi 101, soit des fils et filles d'immigrants qui ont fait du français leur langue première dans l'espace public québécois. Le français est également devenu la langue du commerce. Il est aujourd'hui possible de prospérer en français. Il est obligatoire que les services soient offerts dans la langue de la majorité.
Au-delà de l'aspect linguistique, la Charte de la langue française a également une valeur symbolique majeure. Visant d'abord à protéger notre identité, elle a été intégrée à notre imaginaire collectif. Elle fait partie de ce que nous sommes comme peuple. Elle fait également partie de ce que nous avons à offrir au monde comme modèle de protection culturelle, d'intégration et de respect des minorités. En opposition à l'approche individualisée qu'implique la loi fédérale sur le bilinguisme, elle a permis à l'espace public québécois de se définir en français. Elle a permis aux Québécois de mieux se définir et de faire du territoire du Québec un espace public francophone. Elle a fait du Québec une société d'accueil francophone et surtout, elle a confirmé l'obligation de tous les instants pour le gouvernement du Québec d'être le gardien de cet héritage. Bref, la loi 101 a modifié de manière positive et durable l'image que nous avons de nous-mêmes et la perception des autres à notre égard.
Une Constitution pour abriter la loi 101
En 2007, le défi linguistique du Québec est toujours bien présent. Cela doit se traduire par des objectifs précis et des gestes significatifs. Le Québec doit d'abord faire mieux en matière d'intégration et de francisation des nouveaux arrivants. Il faut donc mieux investir en matière de francisation auprès des lieux d'enseignement et des organismes communautaires. Sur le plan de la qualité de la langue, il importe de veiller à une revalorisation de la qualité du français, sans avoir peur d'exiger davantage de rigueur.
Depuis son adoption, la loi 101 fut contestée à maintes reprises devant les tribunaux. Le gouvernement du Québec, qu'il soit péquiste ou libéral, a également choisi de réduire la portée symbolique de la loi 101 en privilégiant au fil des ans une approche réglementaire plutôt que législative. Aujourd'hui, le Québec a besoin d'une direction plus affirmée.
Trente ans après son adoption, le moment est opportun de donner un nouvel élan à l'esprit de la Charte de la langue française. L'enchâssement de ses principes directeurs au sein d'une Constitution québécoise viendrait d'abord proclamer notre attachement à la réalité culturelle du Québec. En plus d'assurer la pérennité de ces principes, un tel enchâssement aurait des effets encore plus structurants pour l'avenir. Enfin, cela permettrait un rayonnement accru de notre identité collective.
L'adoption de la Charte de la langue française a eu des effets positifs et durables pour la société québécoise. Bien plus qu'un document législatif, elle a une valeur symbolique importante. En plus de baliser la relation majorité-minorité sur le territoire québécois, elle revêt une composante identitaire marquante. Le gouvernement du Québec doit veiller à son application avec vigilance. En adoptant une Constitution québécoise intégrant les principes directeurs de la Charte, le Québec franchirait une nouvelle étape dans l'affirmation de son identité et de son autonomie.
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Mario Dumont, Chef de l'opposition officielle et député de Rivière-du-Loup
Les 30 ans de la Charte de la langue française
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