Trop de « mâles blancs quadragénaires »: Emmanuel Macron ou le racialisme d’Etat

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Macron, l'homme de la déconstruction

Lors de son discours en faveur de l’intelligence artificielle, le 29 mars, au Collège de France, Emmanuel Macron a regretté l’omniprésence de « mâles blancs quadragénaires » comme lui dans ce domaine des sciences. Un « dérapage » contrôlé symptomatique de sa vision de la France, et donc du monde.  




« Il ne faut pas que les acteurs de l’IA soient tous des mâles blancs quadragénaires formés dans les universités européennes ou américaines. #AIforhumanity »






Emmanuel Macron@EmmanuelMacron


Il ne faut pas que les acteurs de l'IA soient tous des mâles blancs quadragénaires formés dans les universités européennes ou américaines.





Ce tweet du 29 mars pourrait presque passer inaperçu tant nous nous sommes habitués à cette rhétorique sur les réseaux sociaux. A cela près que son auteur n’est autre… qu’Emmanuel Macron. Il devient dès lors particulièrement révélateur des évolutions qui attendent et menacent pour partie la France telle que nous la connaissons, avec son histoire et ses spécificités. Quels enseignements pouvons-nous tirer de ces 153 caractères?


De la novlangue mondiale…


Certains auront sans doute relevé en premier lieu ce hashtag dans la langue de Shakespeare, dont notre président LinkedIn fait grand usage. Cette novlangue, malgré son caractère peu solennel, peut à certains égards être portée à son crédit : l’économie, surtout depuis qu’elle est financiarisée, repose sur une certaine dose d’irrationalité ; elle est sensible aux notions de confiance et de communication. Dans ce domaine, force est de constater que nous disposons à l’international d’un VRP optimiste et énergique, qui parle la langue du business et aspire à changer l’image de la France pour le bien de notre économie nationale. Mais en se désolant de la prééminence des universités occidentales plutôt que de s’en féliciter, le président se glisse sans vergogne dans le costume d’un président global, au-delà de nos intérêts nationaux. Leader of the Free World comme disent les Américains, voilà un rôle qui siérait à Emmanuel Macron, parfait exemple de l’élite mondialisée exempte de sentiment national.


…au racialisme assumé


Ceci explique peut-être cela, il en a profité pour jeter l’anathème contre les « mâles blancs quadragénaires ». Avec quelle rapidité et quelle force l’opprobre aurait-il, à raison, couvert quiconque aurait regretté « une trop forte proportion de minorités visibles dans certains sports », « l’omniprésence de noirs et d’arabes dans les meilleures ventes de disques » ou la « féminisation massive de la magistrature » ? Mais non, nul orage n’a grondé à l’horizon. Notre président précoce a tranquillement stigmatisé une catégorie jugée majoritaire de chercheurs déjà en place plutôt que de les soutenir, malgré le tarissement des budgets qui grève leurs recherches et tandis que la France n’est pas dans le « top 5 » mondial de l’intelligence artificielle, selon l’aveu même du mathématicien de renom et député de la majorité, Cédric Villani. Le président aurait pourtant pu formuler cette phrase différemment et appeler de ses vœux « une plus grande diversité ».


On imagine volontiers le président entouré de bataillons de conseillers en communication et de spin doctors ; toute sortie de route incontrôlée est donc à exclure et il ne faut voir ici que l’illustration des idées qui l’animent et une des applications concrètes du principe théorique que je nommerais « gulf stream politique ». L’observation du monde anglo-saxon, États-Unis en tête, nous indique ce qui attend l’Europe continentale dans les dix ou vingt années à venir dans la plupart des domaines, notamment les valeurs culturelles et les combats politiques. Alors que ce bref sursis nous permettrait de renforcer notre propre vision, tout autant universaliste, le plus souvent nous ne faisons que retarder l’échéance. Macron, chantre de la « disruption » va plus loin, nous propulsant à toute vapeur dans le champ anglo-saxon des valeurs communautaristes, se plaçant de plain-pied dans un discours en vogue, teinté de racisme, de misandrie et d’âgisme, dans le sillage du Premier ministre canadien « feel-good » Justin Trudeau.


Une République vendue à la pièce


Emmanuel Macron croit sans doute donner des gages à ces mouvements de lutte intersectionnels qui font tant fureur dans les pays anglo-saxons et qui se multiplient chez nous : ces néoféministes (Lallab), indigénistes (PIR), syndicalistes (SUD-Éducation) qui prennent le contrepied des féministes universalistes telles qu’Élisabeth Badinter et interdisent leurs ateliers « non-mixtes » de « libération de la parole » aux hommes, aux non-racisés (c’est-à-dire aux blancs) et aux cisgenres. Ce sont ces apologistes du « vivrensemble » à tout crin qui souhaitent le retournement des rapports de force plutôt que l’égalité. Ce sont les mêmes qui promeuvent le port du voile islamique au nom de la liberté des femmes, au mépris de la lutte actuelle des femmes iraniennes. Ce sont les mêmes qui justifient l’antisémitisme au nom de l’antisionisme.



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L’intersectionalité, concept créé aux États-Unis il y a moins de trente ans, dont Macron se revendique désormais consciemment ou non, ne présente-t-il pas l’avantage de légitimer un électoralisme paresseux et efficace, celui d’une « vente à la découpe » moins laborieuse que de réunir les Français autour de valeurs partagées et d’un destin commun ? Le passé de banquier d’affaires du président joue sans doute un rôle dans la segmentation de la population en marchés plus ou moins porteurs et dans son positionnement supranational. Les concessions au profit des communautaristes, ces nouveaux identitaires, et parfois même des islamistes, qui sont pourtant nos ennemis les plus dangereux actuellement, sont particulièrement emblématiques du renoncement et de l’hypocrisie d’une présidence attrape-tout.


Emmanuel « Rokhaya » Macron


Parmi les exemples les plus récents, on peut trouver l’invitation faite à Sherin Khankan, femme imam danoise aucunement représentative de sa religion, à s’asseoir dans le fauteuil du président de la République sous l’objectif d’un appareil photo, donnant lieu à une flagrante démonstration de prosélytisme. Khankan a déclara : « Il faut un président bien sage pour défendre le féminisme islamique et considérer la religion comme une partie de la solution et non du problème ». Il y a quelques mois, entre deux attentats islamistes, Emmanuel Macron épinglait la « radicalisation de la laïcité ». La République indivisible et laïque appréciera.


On pense également à la nomination au Conseil présidentiel des villes de Yassine Belattar, « comique » proche du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) et donc des Frères musulmans, professionnel de l’identité blessée qui aurait reçu par SMS les mots de réconfort de son « frère » Emmanuel : « Continue. Les critiques suivent le talent. » On se rappelle il y a quelques mois le maintien de Mohamed Saou, finalement « blanchi », en tant que référent LREM dans le Val-d’Oise. C’est un « radical mais un type bien » disait Emmanuel Macron dans un oxymore digne de sa « pensée complexe », de celui qui clamait pourtant qu’il ne serait « jamais Charlie » et qui relayait les propos de Marwan Muhammad, directeur du CCIF.


Dans la même veine, la néoféministe identitaire Rokhaya Diallo, fondatrice des bien mal nommés Indivisibles et proche du Parti des Indigènes de la République, ayant construit son fonds de commerce sur la dénonciation du « racisme d’État », fut nommée au Conseil national du numérique par un arrêté du Premier ministre, Édouard Philippe. Finalement débarquée de cette assemblée devant la bronca, Diallo se contente désormais d’un rôle de chroniqueuse dans une émission d’une médiocrité crasse où son dernier fait d’armes consiste à avoir houspillé le courageux Bernard de la Villardière. Numéro 2 de Macron, Édouard Philippe est quant à lui connu pour sa gestion très accommodante à la mairie du Havre : prêt d’un terrain et inauguration d’une mosquée radicale, destruction de milliers de desserts destinés aux cantines car contenant de la gélatine de porc…


Macron, une politique hors sol


La nature humaine et les systèmes politiques étant ce qu’ils sont, l’histoire oscille entre des extrêmes et peine à trouver l’équilibre pérenne que permettrait un progressisme raisonnable. Les tenants du progressisme à bride abattue, auréolés de bonne volonté, ne veulent pas voir que leurs excès pavent la voie du retour brutal, à terme, d’un conservatisme qu’ils abhorrent. Emmanuel Macron a beau vouloir prêter à son leitmotiv « en même temps » les accents ricœuriens de la pensée complexe, il ne conjugue en réalité la conduite d’une des plus vieilles démocraties occidentales qu’à l’application d’une idéologie anglo-saxonne communautariste contraire à nos traditions politiques.


Il nous en avait déjà livré les prémisses inquiétantes, laissant entendre qu’il n’y avait pas de particularisme ni de génie français : « Il n’y a pas de culture française. Il y a une culture en France », « l’art français, je ne l’ai jamais vu », son lieutenant Castaner renchérissant que le savoir est l’apanage des élites mondialisées : « on peut être cultivé et parler comme les Français ». Macron ne nous offre pas une politique située au barycentre des partis traditionnels comme il voudrait nous le faire croire, mais il mène résolument une politique déracinée en laissant essaimer avec sa complicité bienveillante des concepts radicaux, initialement minoritaires chez nous, qui commencent déjà à faire florès.