Résistance étudiante à la hausse

Conflit étudiant - grève illimitée - printemps 2012


PARLONS CHIFFRES
Le gouvernement Charest au pouvoir depuis dix ans à l’Assemblée nationale
du Québec a décrété une série de hausses des droits de scolarité pour les
étudiants inscrits à l’université.
La Ministre de l’Éducation Line Beauchamp justifie ainsi sa décision
soi-disant irrévocable :
« Nous persévérons dans notre décision, parce que
nous savons qu'elle est nécessaire, qu'elle est juste et qu'elle est
raisonnable. C'est pour un meilleur financement des universités, pour que
le diplôme qu'on va chercher dans une université québécoise garde sa
valeur, qu'on ait les meilleurs enseignants, les meilleurs équipements de
recherche » (1).

À compter de l’automne 2011, les droits de formation universitaire ont été
haussés de 325 $ par année. Ils passeront ainsi de 2168 $ en 2011 à 3793 $
en 2016. En additionnant les frais afférents, la facture pour un étudiant
sera d’environ 4 500 $ pour l’année académique 2016-2017, soit une hausse – tous droits confondus – de 2332 $, soit une croissance en cinq ans de 20 %
du total des frais de la formation universitaire pour l’étudiant et
l’étudiante (60 % de l’effectif).
Considérant que l’on dénombre 264 000 étudiants universitaires (temps plein
et temps partiel – 46 % de l’effectif), la bataille engagée entre le
gouvernement de Jean Charest et les communautés étudiante, professorale et
parentale porte sur un différentiel de beaucoup moins que 620 millions de
dollars par année et cela à compter de l’année 2016 comme nous allons le
démontrer (2).
Compte tenu d’un budget provincial d’environ 90 milliards de dollars par
année (comprenant les organismes para-publics), le différend entre le
gouvernement des riches et des recteurs d’universités surpayés contre les
étudiants endettés, porte sur moins de un pour cent (0.6 %) du budget du
gouvernement du Québec. Un tel affrontement gréviste en vaut-il la peine
pour le gouvernement ? Pour répondre à cette question, poursuivons notre
examen des statistiques.
PRÊTS ET BOURSES + IMMOBILISATIONS
La Ministre Beauchamp clame quelle assurera la mise à niveau du programme
des prêts et bourses destinés aux étudiant(e)s (32 M$ d’investissements
supplémentaires) ce qui porte ce poste budgétaire à plus de 475 millions de
dollars par année. De plus, de nouveaux investissements gouvernementaux ont
été annoncés pour les universités l’an dernier – 850 millions de dollars
ont été promis en cinq ans – ce qui réduit d’autant le bénéfice de
l’affrontement pour le gouvernement ? Arracher 620 M $ aux étudiants
pauvres ou à leurs parents travailleurs d’une main, et dépenser 475 M $ +
170 M $ par année de l’autre main, ce n’est pas une bonne façon d’assurer
l’équilibre budgétaire tant décrié (3) ?

La Ministre Beauchamp évalue elle-même que c’est une hausse de 5 000 $ de
frais de scolarité que les parents de la classe ouvrière devront assumer au
cours des années, ou alors ce seront les étudiants – futurs chômeurs – qui
devront emprunter auprès des banquiers sous garantie gouvernementale (4).
Comme les finissants universitaires ont de plus en plus de difficulté à se
placer une fois leurs études terminées, ces dettes pèseront lourdement sur
le dos des diplômés et en décourageront plusieurs d’amorcer ou encore de
terminer leurs études universitaires.
Tout le drame des étudiants universitaires, fils de prolétaires, est
entièrement résumé dans cette équation :
« L'étudiant universitaire type en
arrache. Il vit avec de maigres revenus annuels, ses parents ne l'aident
que très peu et il doit travailler pour payer ses études. Et règle
générale, l'étudiant à temps plein est plus susceptible de recevoir de
l'aide financière, peu importe sa provenance, que l'étudiant à temps
partiel, qui a tendance à en être privé parce qu'il tire de plus importants
revenus d'emploi. » (5).


« En milieu universitaire, souligne l’étude de Bonin (2007) en 1996, 58 %
des étudiants du premier cycle avaient un emploi comparativement à 71 % dix
ans plus tard, soit en 2006. (…) (En 2012 ce taux serait de 80 % NDLR).
Afin de réussir à payer cette hausse des droits de scolarité, les étudiants
devront travailler encore plus d’heures. Autour de 160 heures par année
scolaire pour la grande majorité d’entre eux dont la rémunération au
travail équivaut au salaire minimum. » (6).

Selon les experts consultés, toute hausse des droits de scolarité, même
minime, entraîne invariablement la hausse du décrochage des étudiants
collégiaux et universitaires (7).
MOINS D’ÉTUDIANTS-ÉTUDIANTES UNIVERSITAIRES
C’est que la politique passée – des frais de scolarité peu élevés – a livré
les dividendes escomptés : « Ils doivent savoir, explique M. Trudelle, que
22 pour cent plus d'étudiants provenant de milieux défavorisés ou de
régions éloignées fréquentent les campus québécois qu'ailleurs au Canada. »
(8).
Voilà la réponse à l’énigme que nous posions précédemment. La hausse des
droits de scolarité vise spécifiquement à réduire l’accessibilité aux
études supérieures particulièrement pour les étudiant(e)s issus des classes
ouvrières et populaires.
Chaque étudiant qui abandonne les études supérieures fait économiser des
dizaines de milliers de dollars par année au gouvernement, ce qui entraîne
également qu’il y a moins de professeurs à engager, moins de prêts et
bourses à accorder et moins d’infrastructures et de laboratoires à édifier,
ce qui laisse plus de services disponibles pour les heureux gagnants de la
loterie universitaire.
Pourquoi orienter de nombreux jeunes vers les études universitaires alors
que les perspectives d’emplois des diplômés supérieurs chutent chaque année
et alors que les gradués d’hier encombrent déjà les fichiers des bureaux de
placement pour désœuvrés, sermonne Charest ?
Les pays arabes ont ainsi laissé propager ces illusions à propos d’emplois
bien payés alors que se multiplie le nombre de diplômés-chômeurs, si bien
qu’un jour ces «indignés instruits» en ont eu assez de vivre sur la
chaussée : ils ont occupé la Place Tahrir au Caire et Sidi Bouzid en
Tunisie. Charest ne veut pas attendre que les révoltés de Montréal occupent
le quartier boursier et ils les dirigent vers les mines glacées que le
Plan Nord laisse miroiter au-delà du 49e parallèle, sur les terres
autochtones expropriées, si les impérialistes chinois veulent bien lui
avancer le capital désiré (9).
Enfin, il ne faut pas oublier que chaque grand affrontement entre
l’appareil d’État et la masse de ses employés (600 000 travailleurs)
commence toujours par quelques échauffourées entre les étudiants militants
et l’État réactionnaire, histoire de prendre le pouls de la résistance
populaire.
ILS VAINCRONT
La guerre de classe est engagée et jusqu’à présent nos représentants
étudiants dirigent la partie de main de maître. Les enseignants, les
ouvriers, les parents ne s’y sont pas trompés, ils sont sur les rangs au
milieu de la mêlée et le gouvernement ne réussira pas à les isoler de leurs
alliés – Félicitations aux jeunes – aux jeunes ouvriers – aux
étudiant(e)s, leur lutte de résistance sera victorieuse – ils peuvent
compter sur notre soutien indéfectible.

LES ÉTUDIANTS ONT DROIT À UNE ÉDUCATION SUPÉRIEURE
FIN
(1) http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/education/201203/16/01-4506231-hausse-des-droits-de-scolarite-line-beauchamp-maintient-le-cap.php
(2) http://www.mels.gouv.qc.ca/stat/stat_det/univ_eff.htm et
http://www.scom.ulaval.ca/Au.fil.des.evenements/1997/04.10/profiletud.html
(3) http://www.cyberpresse.ca/opinions/201006/23/01-4292806-equilibre-budgetaire-du-quebec-urgent-a-100.php
(4) http://www.ameriquebec.net/actualites/2012/03/14/frais-de-scolarite-classe-moyenne-a-payer-line-beauchamp-8372.qc
(5) http://www.ledevoir.com/societe/education/311274/les-etudiants-universitaires-en-arrachent
(6) http://www.lavantage.qc.ca/libre-opinion/18-03-2012-libre-opinion-une-des-consequences-negligees-de-la-hausse-des-frais-de-scolarite
(7) http://www.lavantage.qc.ca/libre-opinion/18-03-2012-libre-opinion-une-des-consequences-negligees-de-la-hausse-des-frais-de-scolarite
(8) http://www.985fm.ca/national/nouvelles/hausse-des-droits-de-scolarite-une-coalition-veut-131752.html
(9) http://www.plannord.gouv.qc.ca/ et
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=24778
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --


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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    23 mars 2012

    Monsieur Bibeau
    Il est clair que ce gouvernement gouverne pour les riches, les oligarques et qu'il se fout carrément des travailleurs ou du peuple québécois qui, par leurs impôts, ont droit à un retour d'ascenseur pour des services de qualité et de justice sociale. Le fossé s'élargit de plus en plus entre les possédants et le peuple québécois, ce qui nous mène inévitablement dans un cul-de-sac et à un affrontement dans la rue.
    Seule une révolution, par le peuple et pour le peuple, peut nous sortir de ce problème pour une meilleure répartition de la richesse collective et pour une justice équitable pour tous les Québécois. Excellent texte!
    André Gignac 23/3/12

  • Stéphane Sauvé Répondre

    23 mars 2012

    Merci pour ces calculs, c'est du bois pour nourrir le feu de la résistance.
    S2