Nous, soussignés, anciens ministres et directeur de cabinet de René Lévesque, dénonçons avec force les déclarations de Mme Manon Massé et de Québec solidaire, qui se livrent à un détournement éhonté de la mémoire de notre ancien chef.
La philosophie, l'approche, la pratique de la politique selon René Lévesque étaient aux antipodes de celles de Mme Massé et de Québec solidaire. Premier ministre, il dénonçait avec force les éléments «gauchistes et marxistes» alors à l'œuvre dans les mouvements syndicaux du Québec, et dont QS est l'héritier direct.
Parlant de ces «radicaux», M. Lévesque dénonçait, en 1978, «ces gens [qui] en profitent toujours pour s'infiltrer et [le fait que], pour eux, ceux qui ne favorisent pas un changement du jour au lendemain sont des bourgeois».
Contrairement à QS, qui a rejeté la main tendue du Parti québécois il y a deux ans, René Lévesque était un rassembleur qui a créé dans son parti une grande coalition, additionnant des libéraux déçus (dont il était) et les membres du parti de centre droit Ralliement national, auxquels se sont joints les indépendantistes de gauche, alors dirigés par Pierre Bourgault. Il a également ouvert la porte à Rodrigue Biron, venu de l'Union nationale.
Compagnons de route de René Lévesque, nous sommes outrés d'entendre Mme Massé prétendre que QS est «l'héritier du parti visionnaire de René Lévesque», alors qu'il concentre ses énergies non à ravir des circonscriptions au PLQ ou à la CAQ, mais à affaiblir le Parti québécois.
Compagnons de route de René Lévesque, nous sommes outrés d'entendre Mme Massé prétendre que QS est «l'héritier du parti visionnaire de René Lévesque», alors qu'il concentre ses énergies non à ravir des circonscriptions au PLQ ou à la CAQ, mais à affaiblir le Parti québécois. De plus, René Lévesque avait l'habitude de dire: «C'est le rêve qui nous fait avancer, mais on n'avance pas en rêvant.»
La réalité politique québécoise est simple: pour empêcher la droite fédéraliste de gouverner dans le système électoral actuel, seul un parti de coalition peut additionner les nationalistes progressistes et plus conservateurs autour d'un objectif commun. C'est ce que René Lévesque avait compris. C'est ce qu'il a construit. Et c'est ce que tous ses successeurs ont incarné, y compris, de belle façon, Jean-François Lisée.
En refusant un pacte de non-agression avec le PQ, la direction de QS a d'ailleurs clairement choisi son objectif: assurer sa progression partisane en s'attaquant principalement au parti de René Lévesque.
La pratique de QS s'oppose totalement à cette logique et a, au contraire, pour résultats de diviser les forces nationalistes et de rendre plus facile une victoire de la droite fédéraliste. En refusant un pacte de non-agression avec le Parti québécois, la direction de QS a d'ailleurs clairement choisi son objectif: assurer sa progression partisane en s'attaquant principalement au parti de René Lévesque.
Nous avons assez vécu pour reconnaître là la tactique courante des partis marxistes du XXe siècle, qui s'attaquaient principalement aux partis sociaux-démocrates dans les démocraties européennes.
Ajoutant le mensonge à l'insulte, Mme Massé a déclaré qu'il n'y avait «pas de marxistes» à QS, alors que la fondatrice du parti, Françoise David, admettait l'exact contraire à la télévision de Radio-Canada ce mardi.
De plus, René Lévesque dénonçait régulièrement le multiculturalisme «trudeauiste» que QS adopte désormais, la partition d'un Québec souverain que QS dit vouloir accepter, et les «erreurs» à répétition indiquant qu'avec Mme Massé, le français et l'anglais pourraient avoir le même statut au Québec.
René Lévesque nous a appris la franchise, l'honnêteté et l'éthique. Il exécrait le mensonge et la manipulation. Son verdict sur QS serait le même que celui sur les gauchistes qu'il a connus toute sa vie durant: en refusant les compromis nécessaires à la marche du progrès, ils font le jeu du statu quo.
Ont signé:
Jean-Roch Boivin
Guy Chevrette
Francois Gendron
Jacques Léonard
Lucien Lessard
Denis Vaugeois
Louis Bernard