Le président américain a ratifié un décret visant à lever l'immunité contre toute poursuite judiciaire dont bénéficient les réseaux sociaux sur les contenus publiés par des tiers si ces derniers cessent de se comporter en simple hébergeur.
Ulcéré par l'attitude de Twitter, Donald Trump a signé le 28 mai un décret visant à redéfinir la protection dont bénéficient les réseaux sociaux et la latitude dont ils disposent dans la modération de leurs contenus.
«Nous sommes ici pour défendre la liberté d'expression face à un des pires dangers qui soient», a déclaré le président américain depuis le Bureau ovale, en référence à ce qu'il a appelé le «monopole» des groupes technologiques.
«Ils ont le pouvoir non contrôlé de censurer, rédiger, dissimuler ou modifier toute forme de communication entre des individus et de vastes audiences publiques», a-t-il argumenté en signant le décret qui devrait être le point de départ d'une longue bataille en justice.
Très actif sur Twitter, le locataire de la Maison Blanche dénonce de longue date ce qu'il estime être un biais idéologique et politique de la part des géants de la Silicon Valley. Et il ne décolère pas depuis que son réseau de prédilection a épinglé le 26 mai deux de ses messages, en ajoutant la mention : «Vérifiez les faits.» Une pratique de plus en plus courante pour les messages que Twitter juge à caractère trompeur ou dangereux.
Application de la Section 230
Le président a donc décidé de s'attaquer à la célèbre Section 230 du «Communications Decency Act». Pierre angulaire de l'internet américain, elle offre notamment aux «hébergeurs», telles que Facebook, Twitter ou YouTube, une immunité contre toute poursuite judiciaire liée aux contenus publiés par des tiers.
Une différence fondamentale avec les «éditeurs», à l'instar des médias, qui sont légalement responsables du contenu qu'ils publient. Pour bénéficier de cette immunité, les «hébergeurs» ne peuvent en aucun cas se comporter comme des «éditeurs». C'est ce que leur reproche le président américain.
Le décret cherche donc à élargir le champ d'application de cette loi de 1996. «Quand des réseaux sociaux puissants censurent des opinions [...], ils cessent de fonctionner comme des forums passifs. Ils doivent être considérés et traités comme des créateurs de contenus», stipule le texte. Par ailleurs, ce décret permet de couper les financements fédéraux à destination des plateformes qui se rendraient coupables de censure.
Le statut d'hébergeur remis en question
Twitter n'a pas souhaité commenter mais a poursuivi sur sa lancée ce 29 mai, signalant un message du président américain sur les émeutes de Minneapolis pour ce que le réseau social juge être une «apologie de la violence».
«Ces voyous déshonorent la mémoire de George Floyd, et je ne laisserai pas cela se produire. Je viens de parler au gouverneur Tim Walz et je lui ai dit que l'armée était totalement derrière lui. A la moindre difficulté nous prendrons le contrôle, mais quand les pillages commencent les tirs commencent ! Merci», avait écrit le président.
«Ce tweet viole les règles de Twitter sur l'apologie de la violence. Toutefois, Twitter estime qu'il est dans l'intérêt du public que ce tweet reste accessible», a répliqué le réseau social.
Le débat sur le sacro-saint statut d'hébergeur des plateformes en ligne fait rage depuis des mois et dépasse largement le contentieux entre Donald Trump et Twitter. Depuis 2016, Facebook et Twitter ont massivement investi dans la lutte contre ce qu'ils estiment être de la désinformation. Le réseau des gazouillis a ainsi encouragé les internautes à vérifier les faits quand Donald Trump a affirmé que le vote par correspondance serait «frauduleux» car sujet aux manipulations. Une opinion soutenue par plusieurs faits récents, le New York Times évoquant par exemple un tel cas de fraude le 26 mai.
Pour contrer l'opinion de Donald Trump qu'il estimait contestable, le réseau social s'était notamment appuyé sur un éditorial de la chaîne d'information CNN dont le biais en faveur du Parti démocrate n'est plus à démontrer.