La tension est montée d’un cran chez les Mohawks du Québec, qui ont bloqué la route principale d’Oka et le pont Mercier lundi, en réponse aux interventions policières ailleurs au Canada.
« Nous voulions montrer ce dont nous sommes capables », a lancé Kenneth Deer, secrétaire de la nation mohawk de Kahnawake, sur la Rive-Sud.
Peu après 10 h, un convoi d’une dizaine de camionnettes de membres de cette communauté s’est arrêté à la hauteur de la bretelle donnant accès au pont Honoré-Mercier, sur la route 132 Ouest.
Cela a bloqué la circulation vers Montréal pendant une dizaine de minutes.Une deuxième barricade a plus tard été érigée avec des blocs de béton.
Elle visait à freiner l’accès à la voie ferrée que des membres de la communauté bloquent déjà.
- Ian Lafrenière, adjoint parlementaire de la ministre de la Sécurité publique, est revenu sur le dossier:
M. Deer a pris soin de préciser que son groupe ne fermait pas la porte à l’idée de bloquer complètement le pont.
« On a une certaine habitude là-dedans », a-t-il laissé entendre, un sourire dans la voix, en référence au fait que son peuple l’a déjà fait.
Crise d’Oka
Du côté de Kanesatake, sur la rive nord du fleuve Saint-Laurent, une barricade a été érigée sur la route 344, la même qui avait été condamnée lors de la crise d’Oka, en juillet 1990.
Ce conflit entre le territoire de Kanasatake et la municipalité d’Oka concernait le zonage d’un projet de construction. Il avait forcé l’intervention de l’armée, après qu’une opération de la Sûreté du Québec a dégénéré, coûtant la vie à un policier.
Lundi, de petits groupes de manifestants se sont rassemblés à différents endroits de la route pour limiter l’accès aux automobilistes.
Hostiles et agressifs envers les médias, ils brandissaient des drapeaux aux couleurs des Premières Nations.
En soirée, les Mohawks avaient partiellement ouvert le passage.
De plus, quelques dizaines de manifestants ont affiché leur mécontentement devant le bureau de circonscription du premier ministre canadien Justin Trudeau, à Montréal, en après-midi.
Menaçants
Ces démonstrations se sont produites en réaction à l’intervention policière pour démanteler le blocus ferroviaire à Tyendinaga, près de Belleville, en Ontario, lundi. L’arrestation de Mohawks a mis le feu aux poudres.
« Nous sommes vraiment dérangés par ce qui s’est produit avec l’intervention de la police de l’Ontario, a insisté M. Deer. Nous pourrions prendre d’autres mesures. »
Le ministre fédéral des Services aux Autochtones, Marc Miller, a d’ailleurs dit lundi qu’il craignait « maintenant plus que jamais » que la situation dégénère ailleurs, à la suite de cette intervention policière.
C’était aussi en réponse à la présence non désirée de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) le territoire de la tribu Wet’suwet’en, en Colombie-Britannique, a confié un manifestant.
Depuis deux semaines, des blocus ferroviaires ont émergé à travers le pays, en appui à cette communauté qui s’oppose au passage d’un gazoduc. Le transport de marchandises et de passagers ainsi que l’économie en sont perturbés.
« Si la GRC se retire des territoires, on va lever le barrage », a expliqué un homme cagoulé qui barrait le chemin sur le territoire de Kanesatake, à Oka, avant de menacer le représentant du Journal.
Souvenirs
L’avertissement est donc clair : ne vous avisez pas d’user de la force contre les manifestants amérindiens. Sinon, il y aura une escalade des tensions rapidement.
Pour le spécialiste en études autochtones Sébastien Brodeur-Girard, la relation dégringole entre les Premières Nations et le gouvernement du Canada.
« Nous ne sommes pas encore rendus au niveau de la crise d’Oka, mais la tension a augmenté. Aujourd’hui, c’est un message qui a été envoyé : “rappelez-vous ce qui s’est déjà passé” », soutient-il.
– Avec l’Agence QMI
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