Vous dites dans votre texte intitulé « Pire que l’étapisme, l’utilitarisme » :
« Il est temps de faire comprendre à nos pairs que nous devons maintenant prendre notre place au concert des nations, non pour récupérer nos taxes et impôts ou même protéger notre langue, mais tout simplement pour assurer notre pérennité et notre existence en tant que peuple, ce qui implique indirectement tous ces éléments secondaires. »
Je souscris à votre supplique, je souscris à la réaction qu’exprime Ougho. Le mouvement souverainiste vit une période difficile. Bien des erreurs ont été commises, bien des batailles ont été perdues dans des conditions adverses et souvent injustes, face à des forces supérieures en nombre et en richesses. Cela est partie de notre situation, de notre combat. Nous ne l’avons jamais eu facile et cela ne changera pas. Si cela devait l’être, nous ne serions pas si nombreux à désespérer... Nous avons toujours désespéré... cela est partie de notre lutte... La réponse à cette désespérance est diverse et cyclique. Elle se vit comme on peut... Elle se rabat sur le fait de vivre dans l’entourage du plus fort. C’est la branche québécoise fédérale... qui ne date pas d’hier... Déjà, les « Canadiens » de la Nouvelle-France, refusaient de se battre contre l’envahisseur, parce que livré à eux-mêmes devant l’ennemi par notre Souverain de France... Rien a changé depuis... Ce qui provoque des affrontements entre deux élites, une élite qui ravale sa désespérance en étant fédéraliste réformiste... ( tendance contrée, bloquée, depuis Trudeau, ressurgissant à la faveur de son antithétique Art-Peur ) et son pendant rival, les souverainistes... Un temps nous avons cru pouvoir atteindre le but fixé toujours imminent, créer l’État souverain. Cette imminence commence à devenir... rien du tout... On s’en désespère... Car nous avons cru que l’État souverain serait la solution à tous nos problèmes... du moins à celui qui nous ferait être « maître chez nous ». Or il s’avère que cette solution nous échappe. On s’en désespère... Pour ma part, cette pause me semble salutaire... et loin d’être désespérante, pour peu qu’on l’analyse autrement que dans la perte, mais bien dans la constance du sentiment d’être et dans le gain.
Vous dites :
« la souveraineté politique de l’État souverain... pour assurer notre pérennité et notre existence en tant que peuple ».
Il me semble que cette raison d’État, ne soit pas conforme à la réalité vécue par ce peuple souverain du Québec. En effet, le peuple démocratique et souverain du Québec a assuré sa pérenne « existence en tant que peuple » malgré des conditions politiques, géopolitiques et économiques, adverses, et ce, malgré la Conquête, malgré le rapatriement de 1982, malgré les manipulations commanditaires, malgré la défaite à 2 référendums, malgré tout en somme... Ce qui me semble contredire le fait que l’accession à l’État souverain du Québec serait une condition essentielle pour assurer l’existence de ce peuple et sa pérennité. Ce qui n’empêche pas que cet avènement soit par ailleurs souhaitable, voire nécessaire... Mais cela en vertu d’autres raisons, qui me semblent plus conformes au vécu du peuple... et qui ne sont pas pour autant à négliger...
Ce résilient peuple du Québec sait très bien qu’il existe et qu’il peut survivre aux pires humiliations, aux pires défaites, hors l’État... quel qu’il soit ! Il sait aussi que cet État hors la loi, n’est pas la solution. Mais il sait malgré tout commen exister, dans la délinquance et hors la Loi, hors l’État, hors l’État du Canada, et ne prête pas à l’État fantoche qu’il est, quelque compétence ni pouvoir à le faire ou non existant et souverain. Ce peuple délinquant s’est habitué à la délinquance et ne fait plus confiance à ses élites, quelqu’elles soient, depuis la Conquête, depuis que ses élites aristocratiques l’ont par son Souverain, abandonné à la destruction et la guerre. Ces élites aristocratiques, économiques, militaires, technocratiques et politiques qui ont fui la Conquête et sont retournées en « doulce France »... Une brisure s’est faite entre le peuple et ses élites, cette rupture ne s’est jamais réparée. Les élites du pourvoir anglais n’ont pas davantage emporté son adhésion, mais il les tient pour détentrice du vrai pouvoir... celui qui gouverne.
On a cru un temps que la réparation d’avec ses propres élites s’était produite... en ces temps où nos héros pionniers de la souveraineté espéraient prendre le pouvoir... Le jour où ils et elles l’ont pris, à Ottawa dans le « french power » et à Québec avec le Parti Québécois, dans un contexte de compétition entre deux élites rivales, les fédéralistes et les souverainistes, on a cru ce peuple réconcilié avec ses élites qui avaient sur lui quequ’ascendant. On a cru que les nouvelles élites seraient pures, à l’abri des erreurs. La déception fut aussi grande que l’illusion à laquelle le peuple adhérait, celle qui réparerait dans la pureté la trahison ancienne de nos clercs... de Nouvelle-France. Le « French power » a fait long feu... Le PQ a déçu.
En fait, le débat est devenu une joute entre deux élites. Entre un flamboyant Trudeau et un sympathique Lévesque, entre deux faces d’un même charisme. Une joute dont nous sommes, nous le peuple, les spectateurs tantôt fascinés, emportés, amusés, tantôt catastrophés... nous sommes aujourd’hui nostalgiques des ces jeux passionnants, attendant un ou deux nouveaux Messies qui pourraient nous animer tout autant.
Je trouve salutaire que nous n’en trouvions pas... Ce me semble un signe d’évolution... Pour peu ne nous ne soyons pas nostalgique et que nous en profitions, nous le peuple, pour cette fois nous mobiliser nous-mêmes, sans truchement, sans remettre notre propre pouvoir entre les mains de chefs inspirants et charismatiques.
Je la vois active cette nouvelle prise en main... du peuple, par le peuple... dans Vigile, dans les journaux, dans les Forums, dans la multitude d’organisations, dans l’implication citoyenne écologiste, dans la multitude d’efforts consentis à la réflexion, aux propositions de toutes sortes, à la constitution de partis politiques souverainistes.
Je l’ai vu a contrario dans le tollé suivant la dérive médiatique associée à la détournée bienvenue venue de Sir Paul... Ce tollé indiquait que rien ne peut salir ou tenir la fierté de ce peuple existant à la face du monde. Il a violemment conspué celles et ceux qui, à tort bien sûr, étaient tenus pour menace à la bonne réputation d’accueil et d’ouverture sur le monde de ce peuple amical, pacifique et ouvert. Ce qui indique à quel point sa vitalité et sa fierté sont grandes.
Pour radicalement sortir de l’engrenage relié à la joute dont le peuple n’est que le spectateur, opposant deux élites rivales, opportunistes, voulant le pouvoir pour elles... il me semble que le fait de recentrer le souverainisme sur la réalité de l’effective et actuelle souveraineté du peuple souverain du Québec, capable de rallier tout le peuple autour de cette notion qui se trouve à être un principe fondateur de la démocratie, est susceptible de refonder le souverainisme non plus sur l’État souverain, fondateur et protecteur du peuple, mais bel et bien, sur le peuple démocratique et souverain, fondateur de l’État qu’il désire.
Ce principe induit le fait qu’un tel État n’est ontologiquement, légitimement, démocratiquement valide que dans la mesure où il émane directement et nommément du peuple souverain qui le fonde, le constitue et le gouverne, cela seulement dans la mesure où cet État l’appelle à se prononcer sur le contenu de l’Acte qui en fait état... Or l’État du Canada n’est pas fondé sur le peuple souverain du Canada, il n’est que l’avatar d’un Empire monarchique de droit divin, approuvé par ses seuls juges de Sa Cour Suprême et contre la volonté de l’Assemblée nationale, et en l’absence de consultation référendaire seule capable de le valider. Or, tout à fait asymétriquement. Ce même État exige par ailleurs que l’État souverain du Québec, lui, se soumette à ce qu’il se refuse lui-même à faire. Ce seul décalage est à lui seul indicateur d’une falsification paradigmatique qu’il suffirait de renverser... En s’assurant que la symétrie soit restaurée... En faisant en sorte que peuple souverain du Québec se prononce sur une nouvelle exigence quant à la validité des États qui prétendent nous gouverner à bon droit ou qui aspirent à le faire...
Cela ne peut se faire qu’en remettant au centre de la dynamique souverainiste, le principe et les effectifs pouvoirs et droits du peuple démocratique et souverain...
Plusieurs avenues sont dès lors possibles... reste d’abord à envisager l’a propos du principe que je propose de mettre de l’avant. Des textes déposés ailleurs dans Vigile en font état... de différentes manières.
Une chose cependant, il faut apprendre certes à se distinguer des générations précédentes ou se positionner avantageusement entre nous tous et toutes, apprendre de leurs erreurs, apprendre de nos erreurs, mais se garder des blâmes et de l’irrespect. Apprendre à mieux solidariser, à mieux parler, mieux écouter, mieux discuter, mieux nous entendre... sur l’essentiel. Il faut apprendre à appuyer celles et ceux qui nous inspirent, qui contribuent à notre commune information et intelligence, il faut apprendre à former une équipe, à s’appuyer mutuellement, à mettre en valeur non pas nos rivalités personnelles ou électives, mais bien valoriser là où nous pouvons agir, penser, ensemble et d’un commun accord, ensemble en toute complémentarité, selon les forces et intérêts de chacun, entre nous, souverainistes, et entre nous, et les autonomistes et autres fédéralistes... car toutes et tous j’en suis sûr, pensent à tort ou à raison, contribuer activement à notre survivance et notre développement de peuple démocratique, pacifique et souverain du Québec. C’est de qui nous unit... Ce qui n’empêche pas par ailleurs de diverger d’opinion... sur le comment, le quand et le pourquoi... Établissant ce faisant les critères communs qui fondent nos actions sur la base de l’effective et inaliénable souveraineté du peuple démocratique et souverain du Québec.
La souveraineté de l’État du Québec devient incontournable dès lors que le peuple souverain du Québec se pose en fondateur d’un État valide émanant de lui et reconnaissant la pleine et entière réalité du peuple souverain du Québec qu’il est et croît être... L’État du Canada ne peut que difficilement être cet État valide. Pour l’être, il devra changer du tout au tout... Autant commencer par constituer d’abord deux États souverains amis et partenaires, dès lors que le chantage et les menaces sont exclus de la libre expression de la réalité de la souveraineté du peuple démocratique et « libre... de choisir son destin... » comme le disait un certain Robert Bourassa...
Des textes déposés ailleurs dans Vigile font état de ce qui pourrait advenir si ce principe de la souveraineté du peuple souverain du Québec était le centre de notre action et les bases sur lesquelles elle se fonde ... de différentes manières.
• Après Québec 2008 - Québec 2009
13 sept. 1759-2009 - La Conquête VS L’Acte de naissance d’un peuple sans Souverain
• Le Bloc et son utilité
• Finie la « chicane de guenille » ! ( Discussion afférente )
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