Les libéraux, en campagne électorale et ensuite lorsqu'ils ont pris le pouvoir, croyaient avoir un atout en main pour relancer l'économie. Cet atout, c'était l'«effet libéral», l'idée que leur victoire suffirait en soi à redynamiser l'économie en mettant fin à la morosité engendrée par le court règne du gouvernement Marois.
Cette idée était assez ancrée dans la stratégie de l'équipe de Philippe Couillard pour que, dans son cadre financier présenté durant la campagne, le PLQ ait révisé à la hausse les projections économiques pour tenir compte de l'impact positif qu'aurait une victoire libérale.
Et bien, le miracle n'a pas eu lieu. Comme l'a noté le chef caquiste François Legault, l'effet libéral ne s'est pas manifesté. L'économie est toujours en panne, la croissance est anémique, nettement inférieure à celle du Canada, et il n'y a toujours pas de reprise de l'emploi.
Les dernières données sur le marché du travail n'ont rien de réjouissant. Il s'est créé 5500 emplois en septembre, trop peu pour remplacer ceux qui ont été perdus depuis le début de 2014. On dénombrait, toujours en septembre, 27 200 emplois de moins qu'au début de l'année.
Ce genre de chiffres donne invariablement lieu à des querelles statistico-partisanes. Mais si on regarde froidement l'évolution mensuelle de l'emploi, en supposant que les résultats d'avril dernier devraient être attribués au gouvernement sortant, il s'est perdu 42 400 emplois pendant les quatre premiers mois de 2014 sous gouverne péquiste, et il s'en est créé 15 200 pendant les cinq mois sous administration libérale. Un progrès peut-être, mais trop mince pour parler de renversement.
J'avoue que j'ai cru à cet effet libéral, parce qu'il me semblait clair que la stagnation de l'économie à la fin de 2012 et l'effondrement du marché du travail, qui n'a pas été observé ailleurs au Canada, tenaient en bonne partie à des facteurs politiques, l'arrivée au pouvoir du gouvernement Marois et le choc provoqué par ses décisions de début de mandat - composition du cabinet, politiques fiscales, discours hostile au secteur privé.
Ce n'était pas de la pensée magique, à mon avis, de croire qu'un autre discours pourrait avoir d'autres effets. Mais il semble bien que les impacts de la politique sur l'économie fonctionnent surtout dans un sens. Il est beaucoup plus facile de faire fuir des investissements que de les ramener.
Il faut dire que l'état des finances publiques a rendu la tâche plus difficile pour le nouveau gouvernement, qui n'a pas pu injecter les milliards prévus dans les infrastructures, à cause du niveau de la dette, et qui a envoyé un très mauvais message en coupant mécaniquement tous les crédits d'impôt de 20%. Et surtout, la lutte au déficit a pris toute la place, elle crée un climat de tension, elle empêche de gouvernement de mettre en valeur ses efforts de développement économique.
À cela s'ajoute un autre facteur. Un climat de morosité économique comme celui que connaît le Québec comporte des éléments psychologiques auxquels il faut pouvoir s'attaquer. Il faut être capable de proposer une vision et d'insuffler la confiance. Cela exige des aptitudes que les deux principaux ministres économiques du gouvernement Couillard ne semblent pas avoir, et pas seulement en raison de leur manque d'expérience politique.
Disons que le premier est trop «macro» et que le second est trop «micro». Carlos Leitao, dont personne ne doute de la compétence comme ministre des Finances, n'est pas un politicien qui galvanisera les foules. Jacques Daoust, ministre de l'Économie, est plus un homme de terrain que le porteur d'une vision stratégique. Il manque en quelque sorte l'équivalent d'un Bernard Landry ou d'un Raymond Bachand. Cette fonction de leadership économique, c'est peut-être le premier ministre qui devrait l'assumer.
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