Curieux alignement des forces que celui qui a lieu actuellement en Catalogne à l'occasion des élections qui doivent se tenir dimanche prochain, 27 septembre, dans le cadre d'élections générales provinciales. Pas facile de s'y retrouver, pour nous Québécois, car il ne s'agit pas d'un vrai référendum, celui du 9 novembre 2014 ayant été déclaré illégal par le gouvernement central de Madrid.
À la suite de ce refus, le président de la Catalogne, Artur Mas, a trouvé une judicieuse astuce (un mot en vogue ici) et a convoqué des élections générales anticipées pour le 27 septembre prochain. Ces élections auront un caractère plébiscitaire.
Afin de mettre toutes les chances de son côté et d'obtenir la majorité, il réorganise les forces indépendantistes et créée une vaste coalition, Ensemble pour le OUI, qui rassemble des forces de centre, de gauche et des Verts. D'autres forces favorables à l'indépendance subsistent également aux côtés de la coalition pour le OUI. Ici on ne vote pas pour des candidats mais pour des listes de candidats, et il y a quatre circonscriptions seulement à travers tout le territoire catalan.
Par ailleurs, comme il s'agit d'élections générales, tous les autres partis sont également représentés. Ces partis régionaux sont des succursales des partis espagnols, un peu comme le PLQ l'est par rapport au PLC.
Il y a 7,5 millions d'habitants en Catalogne et les votants sont au nombre de quelque cinq millions et des poussières.
LES FORCES DU NON
Dans la capitale espagnole, les forces de gauche et les forces de droite, de même que leurs succursales catalanes sont majoritairement opposées à la sécession de la Catalogne. À leur tête, le Parti populaire (PP), un parti de droite, et son chef, Mariano Rajoy, qui gouverne le pays depuis 2011. Mais il y a également le Parti socialiste espagnol qui s'oppose à l'indépendance de la Catalogne. Tout cela vient brouiller les cartes car le Parti socialiste espagnol, par exemple, un parti pourtant progressiste, doit s'associer aux formations de droite. Cela donne une drôle de coalition. On ne peut manquer de faire un parallèle avec le NDP/NPD, qui se targue d'idées de gauche, et qui s'associerait aux Parti libéral du Canada et au Parti conservateur pour former le camp du NON et lutter contre les forces progressistes du Québec majoritairement favorables à l'indépendance du Québec.
On dit que les indécis sont nombreux et que plusieurs militants de gauche en Catalogne ne voient pas d'un bon œil les élections de dimanche. Soit que les questions d'autonomie ne les intéressent pas - ils se disent aussi bien Espagnols que Catalans -, soit qu'ils se disent davantage préoccupés par les questions sociales, totalement évacuées dans les élections de dimanche.
Il y a aussi une coalition d'intellectuels qui ont pris la parole pour s'opposer aux indépendantistes catalans. Parmi ceux-ci, l'écrivain péruvien Mario Vargas Llosa, un homme aux idées de droite sans équivoque, qui ne craint pas de s'afficher aux côtés du PP, de droite. Par sa hargne des nationalistes, on peut le comparer à Pierre Elliot Trudeau et à Jean Chrétien, sans le Nobel.
Pour compliquer un peu plus les choses, il faut savoir que lors des élections à la mairie de Barcelone, qui se sont tenues au mois de mai dernier, c'est la gauche qui est sortie vainqueur, contre le parti souverainiste.
LES FORCES DU OUI
La plus importante coalition s'appelle Ensemble pour le OUI et elle regroupe Esquerra Republicana de Catalunya (ERC), la gauche républicaine, et Convèrgencia Democratica de Catalunya (CDC), qui est de centre droite. C'est comme si le Parti québécois, Québec solidaire et la CAQ s'uniraient dans une même coalition pour le OUI, sans oublier que les militants de Québec solidaire sont aussi divisés que le sont les militants de gauche en Espagne et en Catalogne. L'arrivée de Pierre Karl Péladeau, si elle a réussi à créer un immense vent d'espoir parmi les forces souverainistes, a aussi servi d'arguments aux purs et durs de QS pour qui le PQ a abandonné son programme social-démocrate.
Il existe également d'autres coalitions favorables à l'indépendance, mais elles sont plus marginales.
On assiste actuellement aux sempiternels discours de peur, orchestrés par les opposants à l'indépendance. «Les Catalans deviendront des exilés dans leur propre maison», affirme un écrivain connu. «La Catalogne sera en ruine et mettra en péril le reste de l'Espagne», lance le chef du PSE. «Les aînés vont voir leurs pensions diminuer de 17 %», menace un autre parti politique. Des banques prédisent qu'une déclaration d'indépendance exclurait la Catalogne de la zone euro et de l'Union européenne, avec toutes les conséquences néfastes que cela suppose: manque de liquidités, fluctuation des taux de change, perte de crédit, etc. On connaît la chanson.
On peut supposer que les dirigeants nationalistes ont tout prévu, comme Jacques Parizeau l'avait fait en cas de victoire du OUI en 1995. La Catalogne est extrêmement riche, sinon la province la plus riche d'Espagne, comme le Québec l'est par rapport au reste du Canada. Et les souverainistes se donnent un an et demi pour proclamer l'indépendance de leur pays.
Visca Catalunya lliubre! Vive la Catalogne libre!
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