Lachine, le 28 novembre 2013
Monsieur Dominique Peschard Président, Ligue des droits et Libertés
Monsieur Peschard,
En réponse à votre lettre du 8 novembre sollicitant un apport financier de ma part, je me dois de vous annoncer que je ne suis aucunement motivé à aider tout organisme s’opposant au projet de loi 60.
Depuis dix ans, j’ai toujours eu le souci de contribuer à mon humble façon pour que la ligue que vous présidez puisse avoir une influence bénéfique sur les actions de nos dirigeants. Mais c’est surtout en tenant compte du fait que votre organisme faisait une équation entre l’état de pauvreté des gens et l’absolue nécessité de défendre leurs droits que je me suis senti le plus motivé à délier les cordons de ma bourse en faveur de la LDL.
Je me disais qu’une telle équation entre pauvreté, droits et libertés était peut-être plus l’apanage d’une ligue des droits telle qu’elle existe ici, en un Québec de tradition franco-catholique, plutôt que dans le reste du Canada et aux États-Unis, deux pays de tradition et de culture protestantes.
L’individualisme a joué un rôle clé dans cette Amérique anglo-saxonne, jadis à forte majorité protestante, là où, sans être en danger d’être persécuté, le citoyen avait à cœur de faire sa propre interprétation de la Bible. De cet individualisme profondément ancré, il en est résulté des citoyens ayant toujours professé une sainte l’horreur de l’État-providence. Ayant toujours préféré l’État minimal ne devant servir qu’à se protéger des autres. Et encore là, valait toujours mieux s’en préoccuper soi-même en possédant son propre arsenal.
Le multiculturalisme est le reliquat de cet individualisme forcené qui a cour surtout en pays de tradition protestante. Mais ce qui est remarquable au Canada, c’est qu’on l’a surtout inscrit dans la constitution de 1982, afin de freiner la volonté d’émancipation des Québécois grâce au seul État qu’ils ont les moyens effectifs de contrôler.
Immense succès de la part d’Ottawa. On sait comment ce multiculturalisme inscrit à l’intérieur de la Charte des droits et libertés lui a permis, grâce au gouvernement des juges, de charcuter la loi 101. Un gouvernement des juges qui nous a menés vers cette totale aberration, celle de considérer les grandes entreprises comme étant des personnes morales ayant accès devant nos tribunaux aux mêmes droits et libertés que tout simple citoyen.
À ce que je sache, la LDL n’a jamais manifesté sa ferme opposition ni contre cette constitution rapatriée sans le consentement du Québec, ni contre le charcutage juridique de notre loi 101, ni contre la loi sur la clarté de Stéphane Dion.
Et, voilà qu’en 2013, la Ligue élève la voix à l’unisson, tant avec les mercenaires du fédéralisme inconditionnels de La Presse, qu’avec les porte-parole de notre minorité anglo-saxonne déjà très ultra-choyée, afin de condamner un gouvernement du Québec ne demandant qu’à faire ce que la France, la Belgique et deux länder allemands ont déjà réalisé : interdire à leurs fonctionnaires de porter des signes religieux ostentatoires pendant leurs heures de travail.
Il semble pourtant que ces interdictions ont été assez bien acceptées dans ces pays. Pourquoi donc la LDL en fait-elle ici tout un plat? Au point de décider qu’une telle interdiction signifierait un accroc majeur aux droits fondamentaux des individus. Serait coupable d’un tel péché, la France, pays des droits de l’homme par excellence? Pourquoi ce qui est acceptable en France et en Belgique ne le serait-il pas au Québec?
Face à la montée de l’extrémisme religieux en général, et de l’islamisme radical en particulier, le multiculturalisme, ce reliquat de l’individualisme forcené, commence à être remis en question même dans les pays à tradition aussi protestante que l’Allemagne et la Grande-Bretagne. On a pu le constater lors des récentes déclarations d’Angela Merkel et de David Cameron à ce sujet. Tout probablement qu’ici encore, le Québec est à l’avant-garde de ce qui se fera bientôt ailleurs dans une Amérique anglo-saxonne pour le moment enlisée dans un profond aveuglement face à la montée de l’extrémisme religieux.
Vous comprendrez donc, Monsieur le Président, que je ne peux me permettre à ce que, par mon aide financière, votre organisme puisse s’acharner davantage à combattre le projet de loi 60.
Vous comprendrez également que ce montant d’argent que je me préparais à vous envoyer servirait mieux la position que je défends en le destinant au Directeur général des élections avec mission de le remettre au Parti québécois.
Ci-inclus un chèque de dix dollars afin de renouveler mon adhésion à la Ligue. Mais sans plus.
Je vous prie, Monsieur le Président, d’agréer l’expression de mes sentiments distingués,
Claude G. Charron
NB. : Étant donné que la Ligue que vous présidez est une ardente défenderesse de la liberté d’expression, je suis certain que vous ne vous objecterez point à ce que cette présente lettre aie été transmise tant au Devoir qui, pour le moment ne l’a pas publiée, que sur différents portails numériques de médias alternatifs.
La Ligue des droits et libertés et le projet de loi 60
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2 commentaires
Archives de Vigile Répondre
4 décembre 2013Comme Québécois, sommes nous au fond du baril?
Maintenant, ici au Québec, ce sont les immigrants qui vont nous dicter comment faire nos règles de lois et de vies dans notre nation.
Paradoxal, les immigrants disent qu'ils veulent venir vivre avec nous, mais désirent changer notre société.
Idioties provenant d'avocates issues de l'immigration sur la loi 60.
M. Bernard Drainville, s'il n'était pas protégé par la loi de l'immunité parlementaire, pourrait être poursuivi pour haine raciale!!!!!!
http://thelinknewspaper.ca/article/5191
Archives de Vigile Répondre
3 décembre 2013Excellent texte qui a le mérite de considérer la question sur le plan de la philosophie de l'État et du vivre ensemble. La vision de la Ligue des droits est ici, vous le signalez très bien, en harmonie avec les valeurs protestantes. Ce qu'il faut souligner c'est que cette vision de l'hyper individualisme n'a pas de supériorité morale sur la vision traditionnellement catholique ou celle de l'équilibre entre les droits individuels et les droits collectifs. Cette vision protestante, qui inspire la Constitution de 1982, est d'ailleurs celle qu'adoptent nos bons amis Duceppe et Bouchard. À trop gagner son pain à Ottawa, on s'imprègne de la vision anglo-saxonne. Pas nécessaire que le Québec adopte formellement la Constitution de 1982 pour que MM. Duceppe et Bouchard y souscrivent. Par sa prise de position, la Ligue se range elle aussi dans le camp «canadian» dans la façon de concevoir les droits.
GV