Un autre affrontement est à prévoir lundi entre la Coalition avenir Québec (CAQ) et le Parti libéral du Québec (PLQ) sur l’immigration.
Plus tôt cette année, les deux partis s’étaient opposés durant l’étude du projet de loi 9, qui visait à réformer le système d’immigration, jusqu’à ce que le gouvernement Legault finisse par adopter la loi en imposant le bâillon.
Cette fois-ci, il sera question des seuils d’immigration, ou du nombre d’immigrants que le Québec admettra sur son territoire d’ici 2022. Déjà, le porte-parole du PLQ en matière d’immigration, Monsef Derraji, s’insurge contre un plan « incohérent », « illogique » et « électoraliste ».
Le Plan d’immigration du Québec, qui sera à l’étude dès lundi, prévoit l’admission en 2019 de 40 000 personnes immigrantes au Québec, ce qui constitue une diminution de plus de 20 % dans chacune des catégories d’immigration.
La logique, c’est de revenir aux mêmes seuils qu’on avait
Le gouvernement dit s’allouer une pause cette année pour améliorer les services de francisation et d’intégration, après quoi il entend augmenter progressivement le nombre d’immigrants admis pour atteindre 49 500 à 52 500 personnes en 2022. Il souhaite alors que la proportion de personnes admises dans la catégorie de l’immigration économique soit de l’ordre de 65 %.
Pour M. Derraji, il ne fait aucun doute que ces seuils sont trop bas, surtout dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre « extrême ». Emploi-Québec estime que plus de 1,4 million d’emplois seront à pourvoir au Québec au cours de la période 2017-2026.
Son parti prône plutôt le retour immédiat aux seuils qui existaient avant l’élection de la CAQ, soit environ 52 000 immigrants admis par année. « Moi, je pense qu’il y a une mauvaise foi derrière ça, a-t-il déclaré en entrevue à La Presse canadienne dans un bureau du parlement. Je pense que ce gouvernement a de la misère, ou il n’est pas à l’aise avec l’immigration, moi c’est juste ça que je vois. »
« Ce sont des PME en région qui vont refuser des contrats et parfois ce sont des heures supplémentaires pour des employés qui ne vont pas avoir de vacances pour aller se reposer parce qu’ils doivent livrer la marchandise », s’est-il indigné.
La question des seuils d’immigration a toujours été délicate à Québec, les partis ayant tous leur idée sur ce dont la province a besoin pour se développer et s’épanouir en français.
Le débat qui s’amorce lundi en commission parlementaire, et qui s’étirera sur quatre jours, ne fera pas exception. Au total, 31 groupes ont été invités à y prendre part, dont le Conseil du patronat et le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.
Lors des échanges, M. Derraji demandera entre autres au gouvernement de produire les études qui l’auraient mené à trancher pour 40 000 immigrants en 2019. Il soupçonne qu’il n’y en a guère.
« C’est un check d’une promesse électorale, on a dit aux gens qu’on va baisser les seuils à 40 000, mais il n’y a aucune assise logique ou économique qui démontre que le gouvernement avait raison de baisser les seuils. Moi je veux bien qu’il nous dévoile ça », a-t-il insisté.
« C’est de l’incohérence depuis le début. Je cherche encore de la cohérence, il n’y a aucune cohérence, a-t-il renchéri. La logique, c’est de revenir aux mêmes seuils qu’on avait, parce qu’on ne répond à aucun besoin des entreprises. »
Québec solidaire outré
De son côté, Québec solidaire (QS) dit également s’attendre à un débat tendu la semaine prochaine. Son porte-parole Sol Zanetti blâme la CAQ de n’avoir rien fait depuis 10 mois pour enrayer les préjugés contre les immigrants.
Il précise que QS est également en faveur d’un retour immédiat à un seuil d’environ 52 000 immigrants admis chaque année.
« Quand la CAQ avait promis en campagne électorale de baisser les seuils d’immigration, on sentait qu’ils voulaient aller chercher un électorat qui sentait l’immigration comme étant un danger et potentiellement une menace, a-t-il déclaré en entrevue téléphonique vendredi. Là, on voit qu’ils ont réduit les seuils, mais que, déjà, ils constatent que c’était peut-être quelque chose d’électoraliste et que ce n’était pas une bonne idée pour le Québec de le faire. »
En promettant de hausser de nouveau les seuils d’immigration dès l’an prochain, le gouvernement a fait « un aveu d’erreur », selon M. Zanetti.
Le ministre de l’Immigration, Simon Jolin-Barrette, n’était pas disponible vendredi pour faire des commentaires.