Le Québec vient de vivre une semaine très noire et rien ne laisse présager que les choses vont beaucoup s'arranger au cours des prochains jours. Une sorte de secte politique, qu'on appelle le PLQ et qui se réunissait la fin de semaine dernière à Québec, a choisi de suivre son grand chef officiel dans les dédales d'une «patente» qui ne répond aucunement aux critères exigés pour répondre à l'appellation de commission d'enquête publique. La tempête grondait déjà.
C'est à un député de l'opposition que nous devons le titre de «patente à gosses» dont cette idée est affublée depuis le dépôt d'un décret à l'Assemblée nationale. C'est un nom qui lui convient. Dans sa formulation actuelle, il est infiniment regrettable qu'un juge en chef ainsi qu'une juge de grande réputation aient accepté d'être mêlés à cette parodie de justice. Comme il est infiniment regrettable qu'un ministre de la Justice qui se voudrait digne de ce titre ait accepté de servir les intérêts d'un parti politique avant de servir les intérêts de la justice.
La juge, à moins qu'elle refuse la mission qu'on vient de lui confier, devra formuler une demande au premier ministre si elle estime avoir besoin d'autres pouvoirs pour mener son enquête à terme, car pour l'instant, elle n'a ni le pouvoir de contraindre des témoins à venir parler, ni le pouvoir d'offrir l'immunité à ces témoins. Pas plus qu'elle ne dispose de l'immunité pour elle-même. Ce n'est pas la définition logique de l'indépendance dont un ou une juge doit disposer pour agir librement. Ce sera une juge avec un patron direct, en l'occurrence le premier ministre lui-même, au sujet duquel plusieurs croient qu'il pourrait se retrouver montré du doigt par certains témoignages.
Comment détourner l'attention du véritable danger que la fameuse patente représente pour la démocratie québécoise? C'est simple. Il suffit de tourner la lumière vers les projets de loi qui sont justement prêts au bon moment et qui vont soulever la colère des syndicats de la construction. Il faut de l'action. Le gouvernement va leur montrer (enfin!) de quoi il est capable. Il aurait pu le faire avant, mais il fallait attendre que ce soit le bon moment et que ça serve les intérêts du parti.
Et puis, pour faire bonne mesure, pourquoi se priver? On va remettre madame Marois sur le gril. Le plus grand quotidien libéral d'Amérique va s'en charger de bonne grâce. On va lui montrer la porte encore une fois, et à la une du journal. Ça devrait forcer les autres journaux à cesser de réclamer une vraie commission d'enquête publique régie par la loi qui porte ce nom et à revenir à de la vraie nouvelle, celle qui rend le rôle de Pauline Marois de plus en plus difficile. La pousser à bout. Voir ce qu'elle a dans le ventre.
Pendant ce temps-là, Ottawa continue de s'essuyer les pieds sur le Québec. Il a promené un contrat qui totalisait 33 milliards de dollars sous le nez du chantier de Lévis, puis l'a donné à Halifax et Vancouver. Il s'est engagé à régler le déséquilibre fiscal en remettant 2 milliards 200 millions à Québec, mais... dans quelques années seulement. Il a promis de construire un nouveau pont Champlain qui pourrait être terminé dans 10 ans et pour lequel vous devrez payer. Je dis vous parce qu'il y a peu de chances que moi, je le vois à l'inauguration.
Cette semaine noire n'aurait pas été complète si le gouvernement fédéral n'avait pas déposé la fameuse loi qui va saccager le travail des groupes de femmes des 15 dernières années et qui avait mené au registre des armes à feu, faisant suite aux meurtres de Polytechnique. Parce qu'il a enfin la majorité qu'il souhaitait, le gouvernement Harper va tenir sa promesse électorale et éliminer l'obligation d'enregistrer les armes d'épaule, ce qui va faire plaisir à son électorat de droite parmi lequel il y a les chasseurs et les fermiers. Que les femmes soient des cibles ne leur fait ni chaud ni froid. Les conservateurs ont annoncé qu'ils détruiraient toutes les données accumulées sur les propriétaires de ces armes pour qu'aucune province n'ait les moyens de recommencer.
Au Québec, nous avions exprimé le désir que les données concernant le Québec et pour lesquelles nous avons payé, nous, les contribuables, nous soient confiées afin que nous puissions continuer à les utiliser ici. Ottawa a dit non.
On pourrait s'attendre à ce que le chef du Parti libéral aille défendre nos intérêts à Ottawa. À moins qu'il n'estime que ça ne servirait à rien, car il voit bien qu'Ottawa a réussi sa «séparation tranquille» du Québec. Sans référendum. Mine de rien. La tempête est sur nos têtes. Nous pourrons bientôt évaluer les dommages.
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