En textant, pour annoncer sa nomination au poste de président de la campagne électorale du Parti Libéral, « les positions progressistes de Monsieur Couillard me rejoignent », Alexandre Taillefer a pris soin d’ajouter : « Merci de commenter respectueusement », pour se prémunir d’une volée de bois vert.
Mais celle-ci ne pourrait venir que de ceux qui n’ont qu’une connaissance superficielle du parcours de M. Taillefer et qui se seraient laissés emberlificoter par ses supposées déclarations « progressistes ».
Alexandre Taillefer, qui était déjà propriétaire du journal Voir, n’aurait pu prendre le contrôle de L’Actualité, jusque là détenue par Rogers Communication, s’il n’avait pas auparavant exprimé ses allégeances libérales. Ainsi, par exemple, l’ancien « dragon » a fait partie du comité très sélect de personnes, qui ont choisi Michel Bissonnette comme vice-président principal de la Société Radio-Canada.
Le tandem Taillefer-Bronfman
Mais, surtout, il est connu, dans les milieux des affaires, pour son association avec Stephen Bronfman, un ami intime de Justin Trudeau, qui l’avait recruté, en 2013, pour financer sa course à la direction du Parti libéral. Bronfman a rapidement recueilli 2 millions $, ce qui lui a valu d’être nommé, par la suite, à la tête du comité chargé des finances du Parti libéral fédéral.
Taillefer et Bronfman siégeaient ensemble au comité responsable de l’organisation des Fêtes du 375e anniversaire de Montréal, dirigé par France Chrétien-Desmarais, fille de Jean Chrétien et épouse d’André Desmarais de Power Corporation.
Mais leur association conjointe à des organismes culturels n’est que la pointe du iceberg d’une collaboration financière où on peut sérieusement se demander si Taillefer est plus qu’un prête-nom pour Stephen Bronfman.
Un partenaire influent
Dans l’édition du 2 mai 2015 du journal La Presse, le journaliste Jean-Philippe Décarie décrivait les principales étapes de la carrière d’Alexandre Taillefer. On retient qu’il a amorcé sa carrière d’entrepreneur, en 1993, à l’âge de 21 ans, en fondant la société Intellia, un fournisseur de services pour le commerce électronique, qui a été rachetée trois ans plus tard par Québecor pour devenir Nurun.
Après cinq années chez Québecor, où il a effectué différentes acquisitions, dont les actions ont fluctué selon les cours des marchés financiers, son bilan financier est à ce point négatif que « les banques ne voulaient pas me financer », confie-t-il au journaliste de La Presse.
C’est son association avec Stephen Bronfman et son holding Claridge dans la création du fonds XNPD qui a véritablement lancé la carrière de Taillefer. Dans un premier fonds XNPD doté de 20 millions $, Taillefer aurait conservé une participation majoritaire. Mais dans un deuxième fonds XNPD, doté d’un capital d’investissement de 40 millions $, la position de Taillefer est minoritaire et celle de Claridge, majoritaire. La Caisse de dépôt et placement y a aussi investi des millions de dollars.
De toute évidence, les millions $ que Taxelco, la filière de XPND, a injecté dans le taxi ne proviennent pas de la fortune personnelle d’Alexandre Taillefer.
Son ami, Stephen Bronfman
Stephen Bronfman est le fils du milliardaire Charles Bronfman. Il est très impliqué à dans les activités de Montréal. Il a fait campagne avec le maire Coderre pour le retour des Expos et la construction d’un stade de baseball au Bassin Peel, à proximité de l’endroit où sa société Claridge a investi dans un projet de 1600 copropriétés.
Une des contributions parmi les plus importantes de Stephen Bronfman à la campagne de Justin Trudeau a été de permettre au Parti libéral de renouer avec la communauté juive et le gouvernement israélien. Une tâche difficile étant données les relations privilégiées nouées par Stephen Harper avec le premier ministre Netanyahou et que le Canada était alors considéré comme le « meilleur ami » d’Israël.
Stephen Bronfman a organisé une visite de Justin Trudeau en Israël et, aux dires de Bronfman, Trudeau a été tellement enchanté de son voyage et d’Israël qu’au terme de son séjour il disait « Nous » en s’identifiant aux Israéliens.
Dernièrement, une fuite massive de documents confidentiels, les Paradise Papers, soulevait des questions sur le rôle joué par Stephen Bronfman dans une fiducie d’environ 60 millions $ US aux îles Caïmans qui aurait pu permettre aux grands argentiers du PLC de contourner l’impôt canadien.
Soulignons, enfin, que Stephen Bronfman a été la seule personne invitée à la Maison-Blanche pour la réception offerte par Barack Obama à Justin Trudeau, qui n’était pas de la famille de Justin, ou membre du gouvernement ou de son personnel politique.