L’opposition au contenu du projet de loi 10 et à la manière dont il a été adopté fait l’unanimité dans le milieu de la santé.
Le projet de loi a été adopté dans la nuit de vendredi à samedi sous le bâillon à l’Assemblée nationale à Québec, par 62 voix contre 50.
L’ensemble des syndicats regroupant les professionnels de la santé ainsi que les trois grandes fédérations de médecins ont vigoureusement dénoncé vendredi ce recours au bâillon par le gouvernement Couillard.
« Les gens qui travaillent dans le réseau de la santé ne peuvent pas tous avoir tort », a fait valoir la présidente de la Fédération des médecins spécialistes (FMSQ), Diane Francoeur, en conférence de presse à Montréal. « Nous, qui vivons dans ce réseau et qui tenons à la pérennité d’un système de santé public très fort, sommes en mesure de témoigner qu’il est déjà mal en point ; cette réforme, toutefois, pourrait l’achever », a-t-elle ajouté.
Son homologue de la Fédération des omnipraticiens (FMOQ), Louis Godin, a dénoncé l’attitude du ministre Gaétan Barrette dans ce dossier. « Plutôt que de s’asseoir, et de discuter, et de rechercher des solutions qui, elles, auraient des chances de donner des résultats, on a plutôt choisi cette approche très autoritaire, dictatoriale, pour imposer ce projet de loi 10 », a-t-il dit.
La docteure Francoeur a aussi formulé des propos lapidaires à l’endroit du ministre. « Le ministre choisit de faire du spectacle, de ridiculiser, de caricaturer, de dénigrer et d’ignorer tous ceux et celles qui ne pensent pas comme lui. Ce n’est pas en insultant les femmes, les jeunes, les médecins de famille ou les médecins spécialistes que le ministre sert les intérêts de la population », a-t-elle lancé, faisant référence aux nombreux commentaires du ministre Barrette qui expliquent le manque d’accès aux médecins par une culture de travail moins forte chez les jeunes et les femmes médecins.
Diane Francoeur estime toutefois que ce discours n’est qu’un paravent pour une réforme qui n’a aucune utilité pour le patient et qui n’est rien de plus qu’« un autre brassage de structures imposé à la va-vite pour des raisons essentiellement budgétaires ».
Le docteur Godin croit même que la réforme accomplira le contraire de ce qui est souhaitable : « Cette approche centralisatrice du projet de loi 10 […] va complètement à l’encontre des tendances que l’on voit partout, où on cherche à avoir des centres de proximité, des centres décisionnels qui sont le plus près possible des patients. »
Du côté des grandes centrales syndicales, la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ), qui représente notamment la grande majorité des infirmières, avait lancé le bal en matinée à Montréal, sa présidente tenant sensiblement les mêmes propos.
Régine Laurent, qui a qualifié la tactique du bâillon de « déni de démocratie », a ajouté que « le projet de loi 10 ne donne rien aux patients et rien aux professionnelles en soins. En fait, c’est un projet de loi au service du ministre et du premier ministre ».
Mme Laurent a rappelé que « jamais le Parti libéral ne s’était engagé à une telle réforme en campagne électorale. On est en droit de se sentir floués ». Des propos qui ont été repris par le président de la Fédération des médecins résidents, JosephDahine, selon qui le bâillon n’était pas approprié.
« Tout à coup, on se retrouve à justifier une urgence qui n’existe pas selon nous », a-t-il dit.
Mécontentement
Plus tard, les trois grandes centrales syndicales, CSN, FTQ et CSQ, qui représentent également de nombreuxprofessionnels et autres travailleurs de la santé, ont repris les mêmes arguments, ajoutant qu’elles entendent utiliser tous les moyens de pression à leur disposition pour empêcher le gouvernement Couillard de poursuivre sur la même voie. Quelques centaines de manifestants issus des trois syndicats se sont d’ailleurs regroupés devant l’Assemblée nationale pour faire entendre leur mécontentement.
« Malgré les beaux discours sur la transparence et l’ouverture dont il prétend faire preuve, le gouvernement Couillard choisit une voie antidémocratique des plus dommageables pour la société québécoise », a fait valoir le vice-président de la CSN, Jean Lacharité.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé