2,2% par année! C’est le nombre d’étudiants du niveau collégial qui suivent un cours d’histoire du Québec, selon la fondation Lionel-Groulx, qui vient de publier une étude sur la question. Le résultat est évidemment désastreux. On ne peut pas dire pour autant qu’il soit surprenant.
Car l’enseignement de l’histoire n’est plus à la mode. Ni au primaire, ni au secondaire, ni au collégial. Notre société n’explore le passé que pour confirmer par effet de contraste à quel point le présent lui est supérieur. Pour plusieurs, l’enseignement de l’histoire n’a pas d’abord pour vocation de la comprendre, mais de féliciter grossièrement la société actuelle, de lui décerner un certificat d’ouverture, de supériorité morale. On étudie le passé pour se réjouir de ne plus y être enfermé.
Mais le problème est plus profond. Car à bien voir, lorsque l’histoire est présente, c’est le Québec qui est absent. Comme s’il s’agissait d’une histoire insignifiante. On l’a non pas complété, mais remplacé par l’histoire des civilisations lointaines. Au nom de la mondialisation, de l’ouverture à la diversité? C’est ce qu’on dit. J’y vois plutôt une forme d’exotisme obligatoire qui domine une école résolue à fabriquer à la chaîne des citoyens du monde. Ce que j’en pense? Citoyens du monde mon œil. Citoyens de nulle part.
On se demande pourquoi une partie importante de la jeunesse déserte son devoir civique. Les pédagogues du vivre-ensemble cherchent à bricoler une solution en disant que voter, c’est cool, c’est festif. Sottise: c’est plutôt le caractère solennel du vote qu’il faudrait rappeler, l’individu devant s’élever de temps en temps à la grandeur du citoyen. Mais avant de participer à la vie publique, encore faut-il savoir à quelle collectivité on appartient.
C’est ici que l’enseignement de l’histoire devrait jouer son rôle en cultivant le sentiment d’appartenance au Québec, en faisant en sorte que les jeunes générations ressentent une solidarité avec celles d’hier. On parle beaucoup d’éducation à la citoyenneté ces années-ci. Une telle éducation tournera à vide si elle ne repose pas d’abord sur une mémoire collective nous rappelant que nous sommes héritiers d’une expérience historique à poursuivre.
L’école québécoise n’est plus capable de transmettre la culture. Pire, elle ne le désire plus. Elle veut nous adapter à notre présent, nous préparer à l’avenir, nous faire aimer la planète, nous faire chanter les louanges de la mondialisation. Elle a oublié de nous faire aimer le Québec.
Le Québec n’existe plus
Coalition pour l’histoire
Mathieu Bock-Côté1347 articles
candidat au doctorat en sociologie, UQAM [http://www.bock-cote.net->http://www.bock-cote.net]
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