LES 50 ANS DE LA DOCTRINE GÉRIN-LAJOIE

«Le Québec a, sur ce continent, sa vocation propre»

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Depuis, on a abandonné l'État pour la quête d'un pays fantasmé. D'où le cul-de-sac.....

Ce texte est un extrait de son allocution prononcée lors du Colloque sur les 50 ans de la doctrine Gérin-Lajoie, tenu le 27 mars à l’École nationale d’administration publique.
Bien qu’il y a quelques semaines j’aie fêté mes 95 ans, ma passion pour assurer à tous le droit d’apprendre ne s’essouffle pas, et mon envie de voir le Québec conserver sa place à l’international ne prend pas une ride.

En 1965, cette envie n’était peut-être qu’un rêve quand je me suis exprimé devant le corps consulaire de Montréal […]. C’est alors qu’est née la doctrine Gérin-Lajoie : du rêve et de la détermination de développer la place du Québec sur la scène internationale.

Je crois important de restituer cet énoncé dans son contexte historique. Au cours des années 1960, le Québec vivait un tel tournant avec la Révolution tranquille dans les domaines de la santé, de l’économie et, certes, de l’éducation, que je voulais favoriser le prolongement de nos aspirations et nos spécificités à l’extérieur de nos frontières.

Il convient de rappeler que la Constitution canadienne n’interdisait pas aux provinces d’être « proactives » à l’étranger dans leurs domaines de compétence. C’est ce qui m’a poussé à soutenir mes convictions, ce 12 avril 1965 […]: « Le Québec n’est pas souverain dans tous les domaines : il est membre d’une fédération. Mais il forme, au point de vue politique, un État. Il en possède tous les éléments : territoire, population, gouvernement autonome. Il est, en outre, l’expression politique d’un peuple qui se distingue, à nombre d’égards, des communautés anglophones habitant l’Amérique du Nord. Le Québec a, sur ce continent, sa vocation propre. La plus nombreuse des communautés francophones hors de France, le Québec appartient à un univers culturel dont l’axe est en Europe et non en Amérique. De ce fait, le Québec est plus qu’un simple État fédéré parmi d’autres. Il est l’instrument politique d’un groupe culturel distinct et unique dans la grande Amérique du Nord. »

Pas figée dans le temps

Aujourd’hui, le Québec possède un ministère des Relations internationales (MRI), fondé en 1967 sous le nom de ministère des Affaires intergouvernementales. Le Québec s’est doté d’institutions spécialisées renforçant sa position d’acteur à part entière. Pendant ces cinquante dernières années, la scène internationale a aussi vu de nouveaux acteurs et de nouvelles institutions faire leur apparition, montrant que les États, tels qu’ils ont été définis dans la Convention de Montevideo de 1933, n’étaient plus les seuls acteurs de ce monde. Tel est le cas, entre autres, de l’Organisation internationale de la Francophonie qui a voulu, dès sa création, accorder au Québec une place de choix parmi ses membres et, surtout, distincte de celle du Canada.

Cela montre combien la doctrine Gérin-Lajoie n’est pas figée dans le temps et possède des émanations qui évoluent avec notre société. Ayant toujours été tourné vers l’avenir, je ne peux que nous en féliciter. Le Québec occupe une place qui lui est propre dans des domaines qui dépassent toujours davantage ses propres frontières. L’exemple de la Francophonie le montre particulièrement bien puisque ce concept n’avait pas été institutionnalisé lorsque la doctrine a été formulée. Les membres occupent une place par leur langue et leur culture avant d’être acteur étatique ou gouvernemental. […]

Le contexte global a cependant bien évolué au cours du dernier demi-siècle. Les nouvelles technologies, la modernisation et la globalisation ont eu un impact significatif sur les États, les gouvernements et les populations. Depuis mon discours de 1965, le rapport entre le Canada et le Québec dans les relations internationales a évolué. Il y a eu l’émergence d’un droit québécois des relations internationales. Le Québec est désormais un acteur présent et reconnu sur la scène internationale dans les domaines de sa propre compétence et par sa spécificité franco-canadienne.

Encourager les jeunes

Cette spécificité, on la retrouve notamment par l’adoption de la loi 101, promulguée en 1977. Elle aura permis d’éveiller la conscience des Québécoises et Québécois sur la nécessité de légiférer sur la langue française afin de la protéger. Depuis cette date, la sauvegarde et le rayonnement de la langue française sont l’affaire de tous. Récemment, la Cour du Québec a d’ailleurs estimé que « la langue française est encore trop fragile pour se développer sans l’aide du gouvernement québécois. Même si le français est la langue d’une majorité de Québécois, il est minoritaire en Amérique du Nord ». Plus encore, cette loi a été déterminante dans l’identité même du Québec. Elle a engendré une génération de Québécoises et Québécois fort désireux de prendre une place dans ce monde, tout comme le Québec y occupe une place reconnue.

C’est pourquoi il est important d’encourager ces jeunes à voir au-delà des frontières et de les sensibiliser aux notions de coopération internationale. Cette notion me tient particulièrement à coeur, et pour cause : c’est l’une des missions premières de la Fondation Paul Gérin-Lajoie qu’elle remplit par l’entremise, notamment, de La Dictée P.G.L. […]

En 1965, lorsque j’ai prononcé mon discours, j’étais optimiste quant à la place à prendre par le Québec sur la scène internationale. Dans les cinquante dernières années, il a été de plus en plus visible : tous les gouvernements québécois qui se sont succédé ont su approfondir cette dimension internationale et ils ont su saisir l’occasion qui s’offrait à eux pour faire rayonner le Québec à l’étranger. Ainsi, la doctrine Gérin-Lajoie a-t-elle marqué pour toujours de façon indélébile l’identité québécoise. Vous avez raison de vouloir en marquer les 50 ans.

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premier ministre de l'Éducation sous le gouvernement Lesage et président-fondateur de la Fondation Paul Gérin-Lajoie





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