La chef du Parti québécois, Pauline Marois.
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Denis Lessard - Le Parti québécois veut reprendre l'initiative dans le débat identitaire et n'hésitera pas à poser des gestes «audacieux» pour y arriver, a prévenu aujourd'hui la chef péquiste Pauline Marois. Pour l'heure, Mme Marois réserve toutefois sa décision devant la volonté très claire des militants d'étendre la loi 101 au réseau collégial, afin de freiner le transfert des étudiants allophones au réseau anglophone.
Devant 500 délégués réunis en conseil national, en fait un «colloque» sur les questions de la langue, de l'éducation et de la culture, Mme Marois a prévenu que son parti comptait préparer pour son programme une série d'initiatives pour assurer la primauté du français et l'intégration des néo-québécois.
«Je vous dis, les Québécois doivent savoir que le Parti québécois, il est de retour avec des idées neuves et avec une volonté de fer. Le Québec doit reprendre l'initiative sur le terrain de l'identitaire», a-t-elle lancé aux militants. Plus tard en point de presse, elle a insisté sur la question linguistique: «il faut absolument faire reculer l'anglais à Montréal. Cela n'a plus de bon sens, c'est le français qui recule actuellement. De plus en plus, on voit des commerces opérer qu'en anglais et des entreprises qui demandent des employés bilingues. L'objectif est de stopper cette érosion du français, il faut qu'il reprenne sa place», a-t-elle soutenu. Le gouvernement Charest «est en train de semer le désordre sur Montréal, parce qu'il y a des gens qui sont de plus en plus choqués de voir la façon dont on traite le français à Montréal. L'inaction est aussi source de problèmes sociaux et M. Charest envoie un très mauvais message aux Québécois», a-t-elle soutenu.
«La loi 101 doit être revalorisée, rehaussée et corrigée», a indiqué la chef péquiste.
Mais elle réserve son opinion sur «l'ordre des moyens» quand on lui demande, par exemple, si elle est d'accord avec l'opinion très clairement exprimée par les membres en faveur de l'imposition de la loi 101 au réseau collégial. Lors de l'adoption de la loi 101, il y avait un engagement très clair du gouvernement envers le maintien des institutions anglophones, a-t-elle prévenu toutefois. Sur cette question des cégeps, «je ne suis pas réfractaires.. mais je veux en faire une bonne évaluation», résume-t-elle.
Toute la fin de semaine, les militants péquistes ont discuté de ces questions, toujours délicates au PQ, sans avoir à adopter de textes définitifs. Le programme formel sera élaboré plus tard, dans les mois précédents le prochain congrès, repoussé au printemps 2011.
A la clôture du conseil national, elle a prévenu que les propositions du PQ seront parfois controversées - déjà cette semaine, elle ouvrait la porte à l'application de la loi 101 au niveau des centres de la petite enfance et même des garderies en milieu familial.
«Le PQ est de retour, dans le sens où il réordonne les priorités, et commence par l'identitaire. Si on veut faire la souveraineté, c'est à cause de ce que nous sommes, notre culture, notre patrimoine et la façon de vivre ensemble», a-t-elle soutenu en conférence de presse par la suite.
La veille, la chef péquiste avait annoncé que son parti comptait déposer, mardi à l'Assemblée nationale, un nouveau projet de loi sur l'identité québécoise. On y proposera que la Charte des droits québécoise soit interprétée à la lumière de valeurs explicites: la laïcité des institutions publiques, l'égalité entre les sexes et la primauté de la langue française. Cette nouvelle mouture du projet de loi péquiste de l'automne 2007, assurera aussi le respect du patrimoine historique: pas question de décrocher les crucifix des écoles. Mme Marois compte avec ce projet de loi forcer le gouvernement Charest à se prononcer rapidement sur ce qu'il entend faire avec le jugement de la Cour suprême qui invalidait récemment la loi 104. Cette loi québécoise empêchait que l'on puisse en inscrivant temporairement un enfant à une école anglaise non subventionnée, lui acheter le droit d'étudier en anglais pour l'avenir.
Au conseil national, Mme Marois s'est employée à souffler sur la braise identitaire, pour stimuler les troupes. «Ayons l'audace de nous définir, de raconter notre histoire, d'affirmer nos valeurs, de prendre en charge notre culture. La peur d'affirmer nos valeurs, la peur de raconter notre histoire, la peur d'imposer la prédominance du français et la peur de prendre les moyens pour faire rayonner notre culture, ces peurs-là, on va les laisser aux libéraux», a lancé la chef péquiste aux militants.
Pour elle, l'affirmation de l'identité québécoise n'est pas un frein à l'intégration des nouveaux arrivants. Pas question de pencher vers le multiculturalisme qui mène à une collection de groupes distincts, vivant en ghettos à l'intérieur de la majorité francophone.
«On ne peut pas accueillir et intégrer si nous ne sommes pas rassurés sur nous-mêmes, assurés de nous-mêmes. Si on ne peut dire "nous" avec assurance devant ceux qui désirent nous rejoindre. Comment espérer qu'ils se sentent solidaires. Pour accueillir, il faut d'abord exister», a-t-elle dit s'engageant à «aller aussi loin que possible» pour cet objectif, l'instauration d'une «citoyenneté québécoise».
Devant les troupes, elle n'a pas même abordée la question controversée de la loi 101 au collégial. Près de la moitié des allophones et 4% des francophones, qui ont fait leur secondaire en français, se tournent vers l'anglais au collégial, une perte de 13 000 étudiants par année pour le réseau francophone. En atelier, samedi, et dimanche en plénière, les délégués ont clairement indiqué qu'ils étaient largement favorables à cette idée, qu'avaient repoussée Lucien Bouchard et Bernard Landry quand ils dirigeaient le PQ.
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