Le Parti québécois est en difficulté. Jean-François Lisée appelle en renfort les indépendantistes démobilisés par sa promesse de ne pas tenir de référendum sur l’indépendance dans un premier mandat.
« Si on veut l’indépendance, il faut prendre le train du Parti québécois en 2018. Parce que si on vote pour la CAQ ou pour le Parti libéral, on va dans le sens inverse », a-t-il martelé au lendemain de la publication d’un sondage coup-de-poing.
À moins de 10 mois des élections générales, le PQ recueille 19 % des intentions de vote, selon un sondage Léger-Le Devoir publié samedi. Avec un tel résultat, l’équipe de Jean-François Lisée peut escompter mettre la main le 1er octobre prochain sur 9 des 125 sièges de l’Assemblée nationale, a indiqué l’auteur du blogue « Too Close To Call », Bryan Breguet. « On est réalistes : on voit ce qui se passe, on comprend ce qui se passe, mais on est combatifs. On est sortis de situations comme celle-là très souvent dans le passé et on va le faire encore une fois », a fait valoir M. Lisée.
En 2011, Pauline Marois était « menacée ». En 2012, elle a été appelée à former un gouvernement (minoritaire), a rappelé la députée de Taschereau, Agnès Maltais. « J’avais appuyé Mme Marois à ce moment-là, puis ça s’est bien passé », a-t-elle dit à la presse. Aujourd’hui, « l’homme de la situation », c’est Jean-François Lisée, a-t-elle poursuivi.
Si on veut l’indépendance, il faut prendre le train du Parti québécois en 2018. Parce que si on vote pour la CAQ ou pour le Parti libéral, on va dans le sens inverse.
Jean-François Lisée
Le président de l’association péquiste du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Sabin Gaudreault, n’en était pas aussi certain. « Nous ne sommes plus sur la patinoire », a-t-il déploré à son arrivée au centre Saint-Pierre, à Montréal, pour une rencontre conjointe du caucus et de l’exécutif national.
M. Lisée est-il un « plus » ou un « moins » pour le PQ dans la mesure où à peine 10 % des électeurs estiment qu’il ferait le meilleur premier ministre ? « On va débattre de cela. […] Avec Jean-François, lui-même en personne, on va en discuter », a répondu M. Gaudreault, laissant présager que la réunion préélectorale prévue de longue date prendrait des allures de cellule de crise. « Les discussions vont se faire avec classe et distinction », a-t-il précisé.
À en croire le sondage Léger-Le Devoir, M. Lisée n’a pas la cote non plus auprès des sympathisants péquistes : la moitié d’entre eux ne croient pas qu’il est le « meilleur » pour assumer les responsabilités de premier ministre.
Les péquistes ont le devoir d’être « plus clairs » sur leurs visées indépendantistes, a soutenu pour sa part le président de l’association d’Abitibi-Témiscamingue, Gabriel Massicotte. « Il n’y aura pas de souveraineté en 2022 si on n’est pas au pouvoir [dès l’automne 2018] », a-t-il insisté.
Le PQ fait face au « défi » de « bien communiquer » son programme adopté en septembre dernier, ainsi que son « plan limpide vers l’indépendance », a convenu la présidente du conseil exécutif national, Gabrielle Lemieux.
Message entendu. M. Lisée a invité les électeurs à appuyer le PQ pour « trois » raisons. Premièrement : réaliser l’indépendance du Québec en 2022. Deuxièmement : élire un « gouvernement national qui rende sa fierté à la nation québécoise ». Troisièmement : élire un gouvernement « ambitieux et bienveillant » qui renoncera à toute mesure d’« austérité ». Entre 2018 et 2022, un gouvernement péquiste s’affairera à « redonner » aux Québécois la « confiance » nécessaire afin qu’ils disent « Oui » au projet de Québec-pays dans un second mandat du PQ, a-t-il promis.
« Effet boule de neige »
Les appuis de la Coalition avenir Québec se dégonfleront à mesure que ses propositions — des « inanités » et des « bêtises », selon lui — seront examinées de plus près, croit le chef du PQ.
M. Lisée répète que « baisser les impôts et augmenter les services », comme le prétendent les partis de François Legault et de Philippe Couillard, est illusoire.
M. Lisée appréhendait une montée de la formation politique de François Legault au cours des dernières semaines. « On est dans un effet boule de neige. En ce moment, les Québécois qui suivent plus ou moins l’actualité disent : “On veut se débarrasser des libéraux. Est-ce qu’il y a quelqu’un qui peut le faire ?” Cette saison-ci, la CAQ semble être ce véhicule-là. […] Au printemps, ça fond », a prédit l’ex-stratège politique. Le « feu des projecteurs » contribuera à accélérer les choses, selon lui.
« Je comprends et je respecte les gens qui trouvent qu’on devrait être un peu plus ceci, un peu plus cela. Mais, au 1er octobre 2018, le seul parti qui peut livrer un chemin vers l’indépendance et un arrêt de l’austérité, c’est le Parti québécois, tout simplement », a-t-il résumé, ignorant ostensiblement Québec solidaire.
La CAQ et le PLQ se sont aussi retrouvés dans le collimateur des délégués de Québec solidaire, qui étaient réunis durant le week-end à Longueuil afin d’élaborer leur plateforme électorale. « La CAQ, on l’a déjà essayée. C’est elle qui nous a donné Gaétan Barrette. C’est elle qui nous a donné les bonbons électoraux. Pour la CAQ, le changement, c’est un slogan de bord d’autoroute. Et derrière la pancarte, il y a la copie conforme du programme libéral », a lancé le co-porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, devant plus de 500 délégués gonflés à bloc, dimanche. À ses yeux, la CAQ et le PLQ, c’est « la même maudite affaire ». « On ne peut plus se permettre de voter pour le moins pire. [Avec QS], vous pourrez enfin vivre mieux », a-t-il soutenu. Durant son allocution, il n’a nommé ni le PQ ni Jean-François Lisée. « Nous, nos adversaires, ce sont les gens au pouvoir, ou ceux qui ont des chances de l’être en 2018 », a expliqué le député de Gouin en conférence de presse.
Nous, nos adversaires, ce sont les gens au pouvoir, ou ceux qui ont des chances de l’être en 2018.
Gabriel Nadeau-Dubois
QS n’entend pas pour autant rester les bras croisés face à l’appel du pied aux indépendantistes de M. Lisée. « La relève, elle est là », a déclaré la co-porte-parole de QS, Manon Massé, au lendemain d’un vote des membres de QS pour la fusion entre Option nationale et leur parti politique. « On n’a pas besoin d’attendre que le “navire amiral” quitte le port parce que notre bateau est déjà parti », a-t-elle fait valoir.
Après s’y être toujours refusés, les solidaires s’engagent désormais à mettre sur pied une assemblée constituante dite « fermée », c’est-à-dire qui aboutira nécessairement à la rédaction d’une Constitution d’un État québécois souverain, au lendemain d’une victoire électorale.
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