Dernièrement, deux articles traitant du processus d’accès du Québec à son indépendance, l’un de Gilbert Paquette, l’autre de Frédéric Bastien, sont parus sur cette tribune. Aussi m’est-il apparu opportun d’en ressortir d’abord les composantes, et ensuite d’apporter mon opinion personnelle sur la stratégie la plus susceptible de nous conduire à notre statut de pays.
Afin de m’assurer de rendre fidèlement les arguments des deux auteurs, j’ai cru opportun d’utiliser, dans des condensés, les termes exacts que chacun d’eux a utilisés pour justifier sa position personnelle.
Saborder la Parti québécois et refonder le combat indépendantiste
Ancien député et ministre du PQ, Gilbert Paquette vient de publier un livre sous le titre Le sens du pays – Refonder le combat indépendantiste, lequel a subi une critique sévère de la part du chroniqueur du Journal, Réjean Parent.
« Selon lui, je discréditerais le projet indépendantiste en demandant que le Parti québécois laisse la place pour favoriser une véritable refondation de tous les indépendantistes désireux de reprendre la promotion de l’indépendance délaissée par le parti depuis 1995.
Dans ces entrevues, je résumais une analyse fouillée de l’histoire des 50 dernières années du mouvement indépendantiste, et des conclusions que j’en tire… L’élément déclencheur qui m’a incité à entreprendre ce travail s’est produit en 2016, lors de la course à la direction du PQ où les membres ont décidé de choisir Jean-François Lisée comme chef, appuyant ainsi son idée insoutenable de repousser l’indépendance à un hypothétique deuxième mandat.
Il faut rappeler ici…qu’après avoir souligné qu’un gouvernement péquiste ne mettrait pas un sou d’argent public dans la promotion de l’indépendance, le nouveau chef du parti avait déclaré, textuellement: « L’engagement de tenir un référendum dans le premier mandat est suicidaire pour le Parti québécois; si on s’entête, nous serons le troisième parti au Québec en 2018. On se sera marginalisé. Ce sera très dur pour la suite. » Le résultat de l’élection d’octobre 2018 fut bien pire.
Je me suis demandé ce qui avait fait qu’un chef du Parti québécois en arrive à traiter de suicidaire et de marginalisant notre projet de pays (ce n’était pas la première fois), se faisant approuver par une majorité de membres. Serait-ce qu’on est à ce point enfoncé dans le rôle d’un parti provincial dont l’horizon se limite à gagner une élection et à défendre le Québec dans le cadre du régime canadien dont nous voulons nous libérer?...
Il faut recréer un véritable parti indépendantiste ET nationaliste, ce que le PQ a refusé d’être jusqu’à maintenant… En refusant, élection après élection, de faire la promotion de l’indépendance, le PQ a perdu trop de crédibilité aux yeux de trop de gens, y compris aux miens. J’en suis arrivé à la conclusion que la refondation que je souhaite ne pourra se faire à partir du Parti québécois. J’espère qu’on me donnera tort, car le temps presse. »
https://www.journaldemontreal.com/2020/09/11/il-faut-une-refondation-independantiste
Attaquer de plein front la constitution canadienne
Aux yeux de Frédéric Bastien, « l’appui à la souveraineté est intimement lié à la question constitutionnelle. À titre d’exemples, en 1964, le gouvernement Lesage a fait l’un des plus gros gains de pouvoir de notre histoire constitutionnelle avec la création de la Caisse de dépôt et placement. Deux ans plus tard, le Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN) obtenait 10% du vote aux élections. L’intensité de la question constitutionnelle dans les années 60 a aussi amené Daniel Johnson à parler d’égalité ou indépendance, tout comme elle a poussé René Lévesque à quitter le Parti libéral du Québec (PLQ) pour fonder le PQ.
Par ailleurs, selon un récent sondage réalisé par l’équipe de Frédéric Bastien, plus de 61% des Québécois souhaitent une nouvelle négociation pour que le Québec obtienne plus de pouvoirs, contre 22% qui ne le veulent pas. Cet appui monte à 80% chez les souverainistes. Même chez les fédéralistes, 54% des répondants veulent que le gouvernement québécois bouge en ce sens.
En 1976, Pierre Trudeau a menacé de rapatrier la Constitution sans les provinces. Cette menace était réelle, comme on l’a vu par la suite, et elle visait particulièrement le Québec. Pour contrer les fédéraux, Robert Bourassa a déclenché des élections et, contre toute attente, le Parti québécois a été porté au pouvoir. En 1981, notre parti a fait campagne sur la Constitution et nous avons obtenu la plus grosse victoire de notre histoire, avec presque 50% du vote populaire.
Un autre exemple intéressant s’est produit au tournant des années 80-90. En septembre 1989, le Parti québécois de Jacques Parizeau a mordu la poussière lors des élections. Neuf mois plus tard, avec l’échec de l’accord du lac Meech, la souveraineté a atteint des sommets inégalés. Cet événement a permis au PQ de prendre le pouvoir en 1994 et de tenir le référendum l’année suivante.
Or en vertu du renvoi sur la sécession datant de 1998, le Québec possède le pouvoir de forcer une négociation constitutionnelle. Tout ce dont le Québec a besoin c’est d’une majorité à l’Assemblée nationale qui voterait une motion demandant une modification de la Constitution, laquelle créerait une obligation faite à toutes les parties de venir à la table des négociations, selon la règle édictée par la Cour suprême. »
https://www.journaldemontreal.com/2020/09/09/souverainete-en-finir-avec-la-strategie-de-la-parlotte
Mon verdict
D’entrée de jeu, je dois donner raison à Gilbert Paquette sur le fait de « reprendre la promotion de l’indépendance délaissée par le parti depuis 1995 ». Toutefois, je ne crois pas qu’il faille saborder ce qu’il était convenu d’appeler « le vaisseau amiral » pour redonner à la souveraineté ses lettres de noblesse. En termes clairs, il m’apparaît oisif de réinventer la roue.
Par contre, parmi les quatre candidats qui se présentent à la direction du Parti québécois (PQ), seul l’historien Frédéric Bastien présente une approche originale qui, à mon avis, devrait placer le Québec sur la route de l’accession à son indépendance. La constitution canadienne de 1982 s’érige clairement comme le nerf de la guerre, l’ennemi à combattre par tous les moyens.… Alors, tous derrière Frédéric Bastien et place à l’action!
Henri Marineau, Québec
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1 commentaire
François Ricard Répondre
19 septembre 2020Que de gens souffrent du syndrome du référemndum.
Aussi bien M. Paquette que bien d'autres partent d'une fausse prémisse: un référendum gagnant équivaut à l'indépendance.Ce n'est pas vrai.
Un référendum est une consultation populaire. Un gouvernement n'est pas tenu d'y donner suite. S'il. y donne suite, il doit demander à l'Assemblée nationale de le mandater pour entamer soit une négociation cosntitutionnelle avec le fédéral soit une déclaration immédiate d'indépendance.Cette deuxième option serait vivement rejetée par les instances canadiennes et internationales.
Ce que je crois que M. Bastien propose, c'est de tout simplement ignorer un référendum inutile et demander immédiatement à l'Assemblée nationale un mandat de négocier.Malheureusement, jusqu'à ,aintenant, il n'a pas su bien exposer son approche.