Le long combat de l'église orthodoxe d'Ukraine

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Ukraine : rupture de l'Église orthodoxe avec le patriarche de Moscou

 Le patriarche de Constantinople a reconnu l'église orthodoxe d'Ukraine, au grand dam de Moscou.


A Kiev, cela ne fait aucun doute : la décision du Patriarchat de Constantinople de reconnaître une Eglise orthodoxe indépendante en Ukraine est « très politique », avant d'être religieuse. La preuve aux yeux des Ukrainiens est la réaction immédiate de Moscou qui a dénoncé par la voix du porte-parole du Patriarche russe Kirill « une décision catastrophique ». Il s'agit de « la légalisation d'un schisme »,ajoute-t-il.


« C'est du langage digne du temps du KGB », le service de renseignement soviétique à la triste réputation, répond pour sa part un diplomate ukrainien à Kiev.


Pour le président ukrainien Petro Porochenko, il s'agit d'une aubaine avant les élections du 31 mars alors que sa cote de popularité est en baisse. « Dieu a vu le combat des Ukrainiens pour leur indépendance. Il a entendu nos prières », dit-il  dans une longue déclaration . Il s'agit de la fin « de l'illusion impériale et des fantasmes étroitement nationalistes de Moscou », ajoute Petro Porochenko.


Dans un pays amputé depuis 2014 par la Russie de la Crimée et qui doit faire face au soutien russe aux indépendantistes ukrainiens dans le Donbass, la décision du patriarche Bartholomée de Constantinople met fin à une tutelle religieuse de la Russie qui dure depuis 332 ans et qui, selon le président ukrainien, ne repose sur « aucun document légal de l'église ».


Le président Vladimir Poutine, note-t-on à Kiev, avait justifié l'intervention de la Russie dans le Donbass et en Crimée, au nom de la protection des russophones et des orthodoxes vivant dans ces deux régions ukrainiennes. La reconnaissance de l' autocéphalie « enlève un instrument important dans la guerre hybride que mène la Russie », affirme le diplomate.


Pour le patriarche Philarète de l'église orthodoxe ukrainienne à Kiev qui a célébré ses 89 ans en janvier 2018, il s'agit aussi d'une victoire. « C'est Moscou qui veut une confrontation. Nous, les Ukrainiens, n'en voulons pas », a-t-il assuré.


Mais maintenant les églises orthodoxes en Ukraine vont devoir s'organiser, souligne-t-on à Kiev. Le patriarche de Kiev a déjà convoqué un synode qui espère-t-il doit réunir les principales confessions orthodoxes. Dans cette ancienne république soviétique qui a recouvré son indépendance en 1991, l'église orthodoxe compte quelque 30 millions de fidèles sur une population de 43 millions de personnes. Mais elle est encore divisée entre l'église du patriarcat de Moscou fidèle au patriarche Kirill et celle du Patriarcat de Kiev autoproclamée en 1992 et qui comprend le plus grand nombre de chrétiens.


Jacques Hubert-Rodier