La vieille église de briques rouges de Pierreville sera démolie malgré la volonté de citoyens de cette municipalité de la préserver en raison de son importance pour ce village situé à une trentaine de kilomètres de Nicolet. Aucune demande de soutien financier n’a été faite pour tenter de préserver ce bâtiment de 1855, affirme sa directrice générale.
« Vous n’habitez pas ici. Je n’ai pas à répondre à vos questions », a déclaré très à pic Lyne Boisvert, la directrice générale de Pierreville. Des demandes de soutien pour la préservation et la reconversion de l’église ont-elles été adressées au gouvernement ? « Aucune demande n’a été faite à nulle part. Allez-y, faites-nous mal paraître ! » La directrice générale de la municipalité a tenu à souligner à plusieurs reprises son mépris du travail des journalistes.
Travailler ensemble
Au village voisin d’Odanak, l’architecte Gérald McNichols Tétreau travaille à sauver un presbytère des Abénakis. Il se désespère de voir qu’on fait si peu de cas de l’église de Pierreville. « Les Abénakis ont peu de choses, mais ils tiennent à les garder. C’est incompréhensible que dans le village voisin, le clocher emblématique du lieu, celui qui donne une perspective unique au paysage, soit détruit. L’agencement est parfait avec ce bâtiment de briques rouges et les environs. C’est du patrimoine ! Il faut avoir un point de vue contemporain là-dessus : ce n’est pas de religion dont il est question ici mais de l’identité d’un village, d’une région. »
Pour l’architecte, il vaut la peine de réfléchir à la façon dont on peut redévelopper un lieu aussi symbolique. « Même sans argent, il y a moyen de travailler ensemble et d’avoir des idées intéressantes. » On doit notamment à McNichols Tétreau la réhabilitation du théâtre Corona à Montréal. Il a été membre du Conseil du patrimoine de Montréal et veille désormais à la restauration du site du Séminaire de Saint-Sulpice, lieu fondateur de la ville. « Il est aberrant qu’on ne voit pas le mal qu’on fait à nos villages en se comportant ainsi. »
Les grues nécessaires à la démolition de l’église sont arrivées lundi. Pierreville, par la voix de sa directrice générale, évoque une cheminée en mauvais état et un mur de soutènement abimé pour finalement aller de l’avant avec la démolition. Il n’y a cependant pas de risque que ça s’écroule, précise-t-elle, « mais les coûts sont importants » pour maintenir tout cela debout. La municipalité va dépenser « environ 100 000 $» pour la démolition, selon elle.
Au Conseil du patrimoine religieux Denis Boucher se dit surpris que le coût de la démolition soit si bas. Il cite des exemples d’église à la superficie semblable dont la démolition a coûté jusqu’à sept fois plus. « À ce prix, est-ce qu’on aurait pu attendre et miser sur le maintient du lieu en attendant qu’une opportunité se présente ? » Le choix à son sens se pose entre « s’endetter pour démolir plutôt que de dépenser pour préserver ce qu’il y a de plus beau dans un village ».
Un terrain amérindien ?
Pour l’artiste Peter Gnass, photographe et sculpteur bien connu, « ça n’a pas de sens de vouloir raser une église pareille ». Il y a deux ans, rappelle-t-il, « on avait évalué qu’elle était en bon état pour être transformée en clinique médicale. Et là on nous dit qu’elle n’est bonne qu’à être rasée ».
Gnass est propriétaire d’un atelier et d’une galerie d’art situé à proximité de l’ancien bâtiment religieux. Selon les documents d’archives qu’il a consulté, l’église de Pierreville a été construite au XIXe siècle sur un terrain cédé par les Abénakis à la stricte condition que cela serve à la construction d’une église. « Les Abénakis sont très rébarbatifs à se prononcer », dit Gérald McNichols Tétreau, tout en soulignant leur attachement à leur patrimoine.
PATRIMOINE
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