Le doublage québécois mis en sourdine

Une enquête gouvernementale devrait être ouverte sur les combines de notre industrie du doublage

Tribune libre

     J’ai vu en salle[1] Avatar : La Voie de l’eau (Avatar: The Way of Water)[2], le dernier film du Canadien James Cameron. Ayant consulté tout juste avant le site du répertoire des films classés par le ministère de la Culture et des Communications (MCC)[3], je m’attendais à la version doublée au Québec. Quelle ne fut pas ma surprise en constatant que les rôles principaux avaient été doublés en France et les rôles secondaires au Québec.


     Par exemple, les deux rôles les plus importants défendus par Sam Worthington (Jake Sully) et Stephen Lang (Miles Quaritch) ont été doublés par les Français Adrien Antoine et Xavier Fagnon[4], deux voix tirées du doublage réalisé en France, alors que le rôle secondaire défendu par Cliff Curtis (Tonowari) l’a été par le Québécois Louis-Philippe Dandenault[5].


     Ce n’est pas une première. Plusieurs films doublés au Québec ont bénéficié de voix d’outre-Atlantique[6]. Le studio de doublage québécois en charge du dernier Avatar est Difuze[7]. L’important pour lui était d’obtenir les fameux crédits d’impôt du gouvernement québécois, peu importe que la moitié des voix doublées, parmi les plus importantes, viennent de France. Nous nous faisons carrément avoir, car, qui dit voix secondaires, dit comédiens moins rémunérés, autrement dit, un doublage moins coûteux pour l’entreprise. Une enquête gouvernementale devrait être ouverte sur les combines de notre industrie du doublage.


     Je plains Maël Davan-Soulas, le directeur artistique de la version québécoise[8] (qui, en passant, est un excellent doubleur d’origine française[9]). Le pauvre, on l’a engagé pour diriger le doublage de la moitié des voix du film, et, pour tout arranger, les moins entendues. J’espère qu’il a été bien payé au moins, parce que, pour ce qui est de la dimension artistique… (imaginez que Léonard de Vinci n’aurait peint que la partie du bas de la Joconde). Je parie que ce doublage ne figurera pas dans son CV.


     Si Difuze a acquis la moitié des voix et des dialogues français, c’est qu’on a estimé qu’ils étaient fort acceptables pour le public québécois. La question à mille euros que celui-ci se pose maintenant est la suivante : pourquoi alors n’avoir pas acquis l’entièreté du doublage français ? Le Québec aurait économisé de l’argent.


     Pour finir, je demande au MCC de retirer l’écusson « Doublé au Québec » de sa fiche[10], car il est trompeur. Dans les supermarchés, les produits du Québec ne sont pas à moitié étrangers.






[1] Cinéma Cineplex Odeon Quartier Latin, rue Émery, à Montréal.


https://www.cineplex.com/fr/theatre/cinema-cineplex-odeon-quartier-latin







[5] https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis-Philippe_Dandenault


Ce film n’a pas été recensé par « doublage.qc.ca », Difuze préférant probablement ne pas faire connaître publiquement la composition du casting des doubleurs et doubleuses, cela étant gênant : https://doublage.qc.ca/index.php




[6] https://doublage.qc.ca/p.php?i=163&idacteurfr=498


https://doublage.qc.ca/p.php?i=163&idacteurfr=499


Ces listes sont incomplètes. Elles ne comptent pas, par exemple, Anouk Aimée, Jean-Hugues Anglade, Yvan Attal, Charles Aznavour, Patrick Bauchau, Monica Bellucci, Charles Berling, Juliette Binoche, Vincent Cassel, Marion Cotillard, Julie Delpy, Gérard Depardieu, Julie Depardieu, Bernard-Pierre Donnadieu, Jean Dujardin, Jodie Foster, Charlotte Gainsbourg, Eva Green, Johnny Hallyday, Tchéky Karyo, Christophe Lambert, Mélanie Laurent, Laurent Lucas, Olivier Martinez, Vincent Perez, Charlotte Rampling, Jean Reno, Omar Sy, Audrey Tautou, Mélanie Thierry, Max von Sydow, Lambert Wilson :


https://doublage.qc.ca/p.php?i=163&idacteurfr=215


https://doublage.qc.ca/p.php?i=163&idacteurfr=216









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