Le meilleur conseil qu'ait reçu l'ancien maire Gérald Tremblay est venu de son père: «Gérald, ne va pas en politique.»
Un conseil qu'il aurait finalement eu intérêt à méditer davantage, se dit-on en rétrospective, surtout après avoir écouté l'entrevue qu'il a accordée à Pierre Maisonneuve, la première depuis sa démission il y a 20 mois, diffusée cet avant-midi à Radio Ville-Marie.
Gérald Tremblay ne s'était jamais livré avec autant d'authenticité, car il n'avait jamais parlé de sa foi avec autant de liberté. Une foi qui le guide au quotidien, mais une foi qui l'empêche aussi, manifestement, de saisir la part de responsabilité qui lui revient dans le gâchis qu'il a laissé à l'hôtel de ville.
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Gérald Tremblay est un être bien intentionné, à n'en pas douter. Il applique les enseignements du Christ au jour le jour. Tel un fil conducteur, sa spiritualité vient ainsi influencer les gestes qu'il accomplit... et ceux qu'il omet d'accomplir.
«Tout mon cheminement politique, c'était pour aider les gens, explique-t-il à Pierre Maisonneuve. Je n'ai jamais tourné le dos à un itinérant, j'ai toujours tendu la main, j'ai toujours voulu aider les plus démunis de la société. [...] Pour moi, je n'ai jamais été pour être, j'ai toujours été pour aimer, être utile, aider les gens.»
Aimer, être utile, aider, voilà qui exige une grande confiance en son prochain. Une confiance que l'ancien maire accorde au centuple à ses amis, ses voisins, ses collègues et ses concitoyens. Une confiance aveugle qui l'a, justement, rendu aveugle.
La naïveté dont on le taxe à raison, elle vient de là, de l'idée qu'il faut tout donner, tout pardonner à son prochain, peu importent le contexte et la situation.
C'est ce que l'ancien maire confirme lorsque Pierre Maisonneuve lui demande s'il a été naïf en s'entourant de personnes qui ont fini par se retourner contre lui. En faisant un lien avec les 12 apôtres du Christ, dont Judas, il répond: «J'avais 12 personnes dans mon comité exécutif. Il y a une personne qui m'a trahi. Est-ce que je suis naïf, ou est-ce que j'ai fait confiance pour aider les gens? On peut qualifier ça d'une forme de naïveté, mais je vais toujours continuer à faire confiance.»
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Gérald Tremblay a donc «trop fait confiance». C'est d'ailleurs l'unique reproche qu'il s'adresse. L'homme avait une mission, il voulait aider, rien ne devait et ne pouvait l'en faire déroger... pas même les agissements douteux de son entourage.
Or, la faute de l'ancien maire est plus grande qu'il ne veut bien l'admettre. Par son aveuglement et son manque de lucidité, Gérald Tremblay a une part de responsabilité dans le gâchis qu'on connaît. Et par sa naïveté et son incapacité à bien s'entourer, il a laissé ce gâchis prendre une ampleur inouïe.
La confiance est certes un atout essentiel en politique, mais elle devient vite de l'angélisme, voire de la bonasserie, si elle ne se double pas de la plus élémentaire prudence.
C'est d'ailleurs l'un des enseignements du Christ qui semble avoir échappé à l'ancien maire, m'a fait remarquer Jonathan Guilbault, diplômé en théologie, avec qui j'ai partagé le contenu de l'entrevue. «Le Christ demande de faire confiance, mais pas au point d'être naïf au-delà de toute prudence, m'a-t-il expliqué. Il a certes dit d'être candides comme des colombes, mais aussi d'être rusés comme des serpents. M. Tremblay me paraît simpliste dans sa manière de traduire dans la vie politique l'appel évangélique à aimer son prochain.»
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Je ne doute pas, personnellement, de l'intégrité de l'ancien maire. Je ne pense pas qu'il faille résumer son passage à l'hôtel de ville à ses pires dérives. Contrairement à bien d'autres, Gérald Tremblay n'a pas cédé à l'appât du gain, il ne cherchait pas le pouvoir pour le pouvoir, il a simplement voulu aider, avec ses qualités et ses limites.
Seulement, il ne suffit pas de se réclamer du Christ pour excuser ses errements et son manque de vigilance. Il ne suffit pas d'évoquer l'amour du prochain pour justifier une naïveté qui a fini par faire des ravages.
«Gérald Tremblay se cache derrière une sorte de foi magique pour ne pas voir sa responsabilité, croit l'abbé Raymond Gravel, avec qui j'ai aussi partagé l'entrevue. Il est tout simplement dans le déni.»
L'ancien maire a beau avoir fait le pèlerinage de Compostelle pour retrouver une certaine paix intérieure, il n'a manifestement pas trouvé en chemin la part de responsabilité qui lui revient.
«C'est évident que ce que l'on fait dans la vie, ce n'est pas parfait, reconnaît-il tout au plus. Mais le Seigneur est là pour nous accompagner. Moi, je n'avais pas de choses à me faire pardonner comme telles, je n'avais rien à demander au bon Dieu, au contraire, je voulais juste le remercier. C'est ça, la beauté. Je n'avais pas à revenir sur le passé, j'avais tourné la page.»
Peut-être un peu trop vite...
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