Au Chili, le conservateur Sebastian Pinera a été élu à la présidence du pays le 17 décembre avec une nette avance de 9% alors que ce scrutin s'annonçait serré. Cette nouvelle victoire vient confirmer le virage à droite de l'Amérique latine.
L'ancien chef d'Etat conservateur Sebastian Pinera a remporté le 17 décembre l'élection présidentielle au Chili et va succéder à la socialiste Michelle Bachelet. Selon des estimations diffusées par l'autorité électorale chilienne (Servel), basées sur le dépouillement de plus de 99% des votes, Sebastian Pinera a obtenu 54,57% des voix, contre 45,43% pour son adversaire.
«Nous avons subi une douloureuse défaite», a reconnu son opposant Alejandro Guillier, 64 ans, moins de deux heures après la fermeture des bureaux de vote.
La promesse d'«une opposition constructive»
Annoncé comme très serré, le scrutin a finalement tourné nettement à la faveur du milliardaire de 68 ans qui avait été président de 2010 à 2014. «Au premier tour, nous avons obtenu moins de votes qu'attendu et au second tour plus que prévu», s'est réjoui Sebastian Pinera, dans une allocution prononcée au côté de son rival qui a promis de diriger «une opposition constructive».
Sebastian Pinera, l'un des hommes les plus riches du pays, gouvernera le Chili de 2018 à 2022. Passionné d'histoire et grand lecteur, il a reçu le soutien de son ami le prix Nobel de littérature Mario Vargas Llosa.
«Celui qui a gagné est celui qui veut que les Chiliens travaillent et ne vivent pas de l'Etat. Je suis heureux, à présent, nous allons aller de l'avant», a déclaré Carlos Vargas, 39 ans, qui agitait un drapeau chilien aux côtés de centaines de compatriotes.
La fin de l'ère Bachelet
Le Chili, une des principales économies d'Amérique latine, a été dirigé ces quatre dernières années par la socialiste Michelle Bachelet, qui a bouleversé cette société réputée très conservatrice par une série de réformes, dont l'adoption du mariage homosexuel et la dépénalisation de l'avortement. La loi ne lui permettait pas de se représenter.
«Les réformes vont continuer à être discutées, elle sont irréversibles», juge l'analyste Guillermo Holzmann ; parmi les plus importantes, figure celle instaurant la gratuité de l'éducation, encore en discussion au Parlement.
Michelle Bachelet a appelé le nouveau président pour le féliciter, selon les images de la conversation diffusées sur CNN Chile. Comme le veut la tradition locale, le président élu l'a invitée en retour à prendre le petit-déjeuner à son domicile le 18 décembre.
L'Amérique latine de gauche : un souvenir ?
Cette victoire marque la fin d'un cycle pour une grande partie de la gauche latinoaméricaine : l'Argentine avec Mauricio Macri, le Brésil avec Michel Temer, le Pérou avec Pedro Pablo Kuczynski, ont désormais des présidents conservateurs.
Sebastian Pinera, dont la fortune est estimée à 2,7 milliards de dollars par Forbes, avait reçu le soutien du candidat Antonio Kast, qui a remporté 7,9% des voix au premier tour en revendiquant l'héritage du dictateur Augusto Pinochet.
Pas de majorité parlementaire, mais un bel élan économique
Le vainqueur du 17 décembre n'aura toutefois pas de majorité au Parlement. Les législatives, organisées lors du premier tour et pour la première fois avec un scrutin à la proportionnelle, ont laissé un paysage fragmenté dans les deux chambres. Le futur locataire du palais présidentiel de La Moneda, à compter du 11 mars 2018, aura «besoin de nouer des alliances» avec les autres groupes parlementaires, estime Rodrigo Osorio, professeur de sciences politiques à l'université de Santiago.
Le successeur de Michelle Bachelet à la tête de la cinquième puissance de la région aura en revanche l'économie avec lui. Après quatre années de croissance ralentie à 1,8% en moyenne, le PIB grimpera de 2,8% en 2018, selon la Cepal, commission économique de l'ONU pour l'Amérique latine. Marqué par plus de quinze ans de dictature sous Pinochet, le Chili représente depuis les années 1990 un pôle de stabilité politique et de dynamisme économique dans la région.