*Bâtonnier est un roman qui raconte les tribulations de Jacques Milaire, un avocat de 50 ans représentant les médias et les compagnies de pétrole qui souhaite devenir Bâtonnier et...juge.
J’ai 50 ans, je suis juge à la Cour Supérieure du Québec. J’ai passé toute ma carrière dans un grand cabinet de Montréal. J’étais ce qu’on appelle un plaideur, un spécialiste du litige. Mes principaux clients étaient des compagnies de pétrole et les médias. Comme plusieurs de mes confrères avocats qui veulent devenir juges un jour, j’ai participé pendant plusieurs années aux activités du Barreau. J’ai été professeur à l’École du Barreau et chargé de cours à l’Université. J’ai gravi tous les échelons du Barreau de Montréal et du Barreau du Québec avant de devenir Bâtonnier du Québec. Je n’ai pas eu besoin de travailler pour un parti politique, puisque j’ai eu la chance d’être procureur sur une importante commission fédérale très médiatisée, ce qui m’a ouvert les portes de la magistrature.
J’aurais probablement fait un excellent acteur, mais j’ai préféré devenir avocat. Mes dons d’acteur, en plus de me faire connaître dans la profession, m’ont permis de progresser dans ma carrière beaucoup plus rapidement que je ne l’aurais cru. Faire rire un juge et détendre l’atmosphère en cour est un talent que tous les avocats ne possèdent pas et qui peut faire toute la différence au chapitre des victoires. Les clients veulent des gagnants et je suis de cette race. J’aurais pu faire de la politique, mais je suis jaloux de ma vie privée qui est très active. Je n’envie rien à la vie de Bill Clinton. Certes, il a eu le pouvoir et toutes les femmes qu’il voulait, mais il a dû payer très cher ses incartades extra-conjugales. Moi je n’ai pas ce problème, même si je suis marié et que j'ai trois enfants, je jouis de ma vie privée comme bon me semble...
Mes talents politiques, je les ai utilisés pour devenir juge. Je pensais être à l’abri de tous tracas une fois assis sur le banc, mais il semble que l’on récolte toujours ce que l’on a semé. Demain, je dois entendre une cause au sujet de laquelle je n’ai officiellement aucun préjugé. Je dois décider de l’extradition d’un capo de la mafia vers les États-Unis.
Je n’ai subi aucune pression de la part du milieu interlope. Toutefois, alors que j’étais Bâtonnier du Barreau de Montréal, j’ai connu une stagiaire qui m’a demandé de lui signer une procuration pour qu’elle puisse rencontrer des clients en prison. Elle faisait depuis plusieurs années du droit carcéral pour une petite étude et avait récemment perdu son emploi, parce qu’elle ne réussissait pas à passer son dernier examen du Barreau.
La firme en question avait des moyens limités et souhaitait s’adjoindre les services d’un avocat qui pourrait accomplir tous les gestes d’un avocat inscrit au tableau de l’ordre, conditions qu’elle ne pouvait manifestement pas remplir. À l’époque, il était possible de devenir stagiaire sans avoir réussi tous ses examens, sa situation allait bientôt changer, puisqu’elle n’avait pas réussi tous ses examens de reprises dans le temps prescrit.
Elle allait bientôt être exclue de l’École et souhaitait que je la cautionne pour une dernière visite en prison, afin qu’elle puisse voir une dernière fois ses anciens clients. J’ai accepté d’agir temporairement à titre de maître de stage, à la stricte condition que ce soit seulement pour aller informer ses anciens clients qu’elle ne pouvait plus les représenter. D'ailleurs, cette condition était inscrite au mandat que je lui avais signé. Compte tenu des limites du mandat, je n’avais donc pas à m’inquiéter; mais jamais je n’aurais pu croire que la situation allait évoluer de façon aussi inattendue.
(à suivre)
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Autres épisodes de « Bâtonnier » :
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Le conseiller (1)
Le club
Une visite en prison
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Entrevue avec un Bâtonnier
Quand le Québec s’éveillera, le monde s’étonnera ! Révolutions et Révolution tranquille