L’affrontement entre les militants bloquistes insatisfaits et Martine Ouellet a pris une nouvelle tournure mardi alors que l’exécutif de Chicoutimi–Le Fjord pose comme condition pour présenter un candidat à la prochaine élection partielle que la chef quitte ses fonctions. Si Mme Ouellet refuse et reste en place, elle devra trouver seule un candidat et ne pourra pas compter sur l’aide des militants locaux pour faire élire cette personne.
« Si Martine Ouellet ne part pas, je n’enverrai pas quelqu’un se suicider sur la place publique », lance au Devoir Élise Gauthier, la présidente de l’association bloquiste de Chicoutimi–Le Fjord. Lundi, Mme Gauthier confiait déjà au Devoir qu’elle évaluait à 85 % ses chances de perdre la prochaine élection partielle à cause de la crise en cours. Sa consultation des militants l’a convaincue de demander le départ du chef.
« J’ai besoin du départ de Martine Ouellet pour gagner la partielle dans Chicoutimi–Le Fjord parce que quelqu’un qui n’aide pas nuit », continue Mme Gauthier. Le libéral Denis Lemieux avait remporté la circonscription saguenéenne en 2015, mais il a depuis démissionné. Justin Trudeau n’a pas encore annoncé la date de l’élection, mais celle-ci pourrait avoir lieu cet automne, en même temps que celle dans Outremont, quand Thomas Mulcair aura officiellement quitté son siège.
L’ancien député péquiste?
Élise Gauthier avait recruté un candidat, mais n’avait pas encore dévoilé son identité. La rumeur fait état de Jean-Marie Claveau, l’ancien député péquiste de la région. Il a été impossible de le joindre mardi.
Mme Gauthier assure que ce candidat inconnu est sur la même longueur d’onde qu’elle et refusera de porter les couleurs d’un Bloc québécois dirigé par Mme Ouellet. Le quartier général du Bloc devra lui-même dénicher un autre candidat et le faire élire, car Mme Gauthier ne militera plus. « Martine Ouellet pourra faire cela [recruter un autre candidat], mais mon exécutif et moi allons croiser les bras. Si elle reste, je retournerai ma carte de membre. » Mme Gauthier s’est jointe au Bloc québécois à ses débuts, en 1991.
En entrevue, le président du parti et député, Mario Beaulieu, a indiqué que Mme Gauthier et l’exécutif de cette circonscription seront contactés sous peu. « Est-ce qu’une présidente d’association peut décider seule qu’il n’y aura pas de candidat du Bloc québécois ? […] Je pense que non », avance M. Beaulieu. Le Bloc a indiqué qu’il aurait un candidat à la partielle, puisque les statuts du parti permettent au bureau national d’organiser une investiture si l’exécutif local s’y refuse.
Vote de confiance confirmé
Par ailleurs, l’entourage de Martine Ouellet assure qu’elle se soumettra bel et bien à un vote de confiance dans 14 mois. Un doute subsistait, car les statuts et règlements du Bloc prévoient que c’est le président du parti qui doit se soumettre à un tel vote lors du congrès bisannuel, poste occupé par M. Beaulieu. Jusqu’en 2015, le président du parti en était aussi le chef, mais ces deux fonctions ont été scindées lorsque M. Beaulieu a cédé sa place à Gilles Duceppe juste avant l’élection fédérale. Les statuts et règlements n’ont pas été modifiés en conséquence.
« Nous sommes dans une espèce de vide juridique à ce niveau, reconnaît l’attaché de presse de Martine Ouellet, Antoni Gilbert. Cependant, nous allons nous baser sur l’esprit de la loi : il s’agira bel et bien d’un vote de confiance sur Martine Ouellet ! Pas de doute là-dessus. » Au moins deux militants critiques de Mme Ouellet avaient confié au Devoir craindre que le parti n’exploite cette faille pour éviter à la chef un vote potentiellement humiliant.
Plus tôt dans la journée, en entrevue avec La Presse canadienne, un des sept députés dissidents, Rhéal Fortin, avait indiqué que son groupe ne tenterait pas de précipiter le vote de confiance ni n’entreprendrait quelque manoeuvre que ce soit pour pousser Martine Ouellet vers la sortie.