Que sonne le glas!

Langue étrangère ou langue seconde?

Après les derniers Mohicans, les derniers Québécois?

Tribune libre

Une langue étrangère est une langue autre que la langue nationale (ou officielle) d’un pays. Par exemple un Polonais qui apprend le français en Pologne, qui vit donc dans un environnement où il n’entend pour ainsi dire jamais parler cette langue, apprend une langue étrangère.
Un Polonais qui va vivre en France et qui apprend le français parce qu’il en a absolument besoin pour vivre, cherche à acquérir une langue seconde parce que sa langue maternelle ne lui est plus d’aucune utilité. La langue seconde est seconde parce qu’elle remplace la première langue apprise, dans un contexte où cette langue est devenue inutile. La notion de langue seconde s’explique le mieux en termes de niveau atteint dans la maîtrise d’une langue : débutant, intermédiaire, avancé, langue seconde.
Apprendre une langue seconde ne veut donc pas dire apprendre une deuxième langue, cela veut dire apprendre une langue dans le but de pouvoir concurrencer des locuteurs natifs dans le pays même où ces locuteurs vivent.
Les cours d'anglais langue étrangère et d'anglais langue seconde se distinguent par le but qui est visé et, concrètement, les méthodes de langue seconde se concentrent davantage sur la langue parlée et les mises en situation tirées de la vie quotidienne. Il faut noter que notre Polonais du début qui déménagerait au Pérou devrait acquérir une deuxième langue seconde et pas une langue tierce, ce qui ne veut rien dire.
On apprend donc une première, une deuxième, une troisième langue étrangère ou on acquiert une première, une deuxième, une troisième langue seconde.
Alors au Québec, l’anglais, langue étrangère ou langue seconde?
Ça dépend du point de vue. Si on considère que le Québec constitue une société complète où 80% de la population parle français et qui a le français comme langue officielle, le Québec est vu comme étant dans la même situation que la Pologne et l’anglais y est une langue étrangère : une langue qu’il peut être intéressant d’apprendre mais qui n'est pas nécessaire dans la vie de tous les jours.
Si on considère que le Québec fait partie du Canada qui possède deux langues officielles et que le québécois doit pour survivre concurrencer régulièrement des locuteurs natifs de l’anglais alors l’anglais doit devenir une langue seconde, une langue qu'on doit connaître aussi bien que le français.
À la fin des années 1970, les Québécois semblaient avoir plus confiance en eux qu’aujourd’hui. C’est à ce moment qu’ils ont mis en place le régime juridique actuel qui fait la promotion de la langue française et vise à faire en sorte que la connaissance du français soit suffisante pour vivre. Ce qui ne veut pas dire que la connaissance de l’anglais n’est pas utile mais qu'elle est réservée à la communication avec des gens vivant à l’extérieur du Québec.
Aujourd’hui cette belle confiance semble s’être émoussée. Nous sommes revenus à la situation d’avant 1976. Il ne nous semble plus suffisant de connaître seulement le français pour pouvoir vivre au Québec.
Ce glissement prépare le terrain pour, qu’à terme, il ne soit plus nécessaire de connaître le français. Si tout le monde est parfait bilingue, un parfait unilingue anglais n’aura aucun problème à vivre au Québec. Le français sera en voie de devenir une langue étrangère. Avec les orientations des deux principaux partis politiques qui aspirent au pouvoir, le PQ et le PLQ, la question n’est plus de savoir quel degré de compétence il faut acquérir en anglais, dans la mesure où les deux partis cherchent à produire de parfait bilingues à la sortie du secondaire, mais combien de temps sera-t-il nécessaire pour que le français ait perdu toute utilité.
Une fois intégrée l'idée que tous les Québécois doivent comprendre et se faire comprendre en anglais, il sera facile de les les culpabiliser et de leur inculquer l'idée que, s'ils n'y arrivent pas, ils doivent laisser la place à de meilleurs qu'eux. Devinez à qui?
Après des siècles de résistance, l’anglais a finalement triomphé du gaélique en Irlande avec la grande famine du milieu du XIX ème siècle. Le Québec en est là. Il n’y aura pas de famine mais un lent abandon de la langue des fondateurs pour se couler dans le moule linguistique du reste du continent.
Devons nous être pour ou contre l’abandon du français au Québec? On peut être romantique et nostalgique et dire que le français doit être sauvé ou pragmatique et âpre au gain et opter pour l’anglais qui est la langue de l’argent et de la promotion sociale en Amérique du Nord.
Mais tous ceux qui parlent anglais ne sont pas riches. En fait dans les pays anglo-saxons les inégalités sociales sont très grandes, la ségrégation y est très forte et la compétition sans merci.. Les descendants de ceux qui parlaient français seront irrémédiablement marginalisés et les postes de commande et l’argent seront entre les mains des descendants de ceux qui parlent anglais. Si M. Nantel a raison, dans un avenir prochain ce ne sont pas seulement les marchandises qui vont descendre le fleuve à partir de l’Ontario et mais aussi la population et les capitaux. Le fait que le français demeure vigoureux et une condition pour vivre au Québec constitue une première ligne de défense contre l’envahissement et le refoulement à la périphérie de l’espace habité pour les locuteurs de français. Si nous n’y prenons garde et ne faisons pas les efforts nécessaires pour conserver vivant le français au Québec, il faudra en venir à faire comme en Irlande où on accorde des subventions aux derniers locuteurs du gaélique qui vivent dans legaeltacht à la périphérie de l’île sur des terres de misère.
Voici comment Paul Craig Roberts dans son article Les empires d’hier et d’aujourd’hui décrit cet empire auxquels nous mourons (mourrons?) d'appartenir:
«…l’empire de Washington exploite les ressources du peuple américain lui-même pour le pur bénéfice des intérêts personnels de quelques groupes qui régissent les États-Unis. Le complexe militaro-industriel, Wall Street, l’agro-business et le lobby d’Israël utilisent le gouvernement pour pomper les ressources des Américains tout à leur profit et soif de pouvoir. La constitution des États-Unis a été pompée pour les intérêts de l’état policier et les revenus des citoyens ont été redirigés dans les poches du 1%. Voilà comment fonctionne l’empire américain.
(…)
Il est ironique de constater, que sous le nouvel empire, ses citoyens sont siphonnés de leur richesse et de leur liberté afin de détruire les vies des populations étrangères ciblées. Tout comme les musulmans bombardés et assassinés, les Américains sont les victimes de leur propre empire.»
Le premier devoir de l'État est de défendre le territoire (M. Harper le sais très bien), pas de livrer la population, servile et soumise, à l'envahisseur. Les Orangistes de M. Sauvé reviendront, il faudrait ambitionner mieux que de faire leurs lits et de nettoyer leurs salles de bain. Nous pouvons être les premiers au Québec mais notre rêve d’intégration, d’assimilation et de disparition va de faire de nous les derniers.
Comme avant.
Après les derniers Mohicans et les derniers Gaëls, les derniers Québécois?
Les derniers des derniers?
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«Le Gaeltacht désigne les poches des comtés d’Irlande dans lesquels le gaëlique est encore la langue maternelle de certains habitants et est largement parlé dans la vie quotidienne. Cette zone s’étend essentiellement dans l’Ouest de l’Irlande : comté de Kerry, comté de Galway, comté de Mayo et comté du Donegal (voir carte ci-contre). Les comté de l’ouest de l’Irlande ne constituent que 23% de la population irlandaise, mais 45% des foyers parlant irlandais. Les gouvernements successifs irlandais ont donc tous estimé que c’était dans le Gaeltacht que se jouait l’avenir de la langue irlandaise. Et à ce titre des dispositions particulières s’y appliquent sur le plan linguistique : l’enseignement au primaire se fait uniquement en irlandais, les panneaux
routiers sont écrits uniquement en irlandais (provoquant quelques tracas pour les touristes perdus !), l’affichage publicitaire en irlandais est fortement favorisé, une politique de soutien social et des subventions aux initiatives économiques incitent les habitants du Gaeltacht à rester y vivre ... Toutes ces politiques sont coordonnées depuis 1956 par un ministère du Gaeltacht, chargé de protéger ces zones parlant l’irlandais. Ces politiques fortement volontaristes semblent porter leurs fruits puisque dans ces régions la proportion de locuteurs gaëliques se maintient et l’irlandais y est réellement une langue vivante.»
Tiré du site Terres celtes


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