Il y a une façon brutalement simple de faire le bilan de l’an I du gouvernement Legault.
C’est de dire que si des élections avaient lieu demain matin, la CAQ démolirait, pulvériserait, atomiserait ses rivaux.
Elle gagnerait avec une majorité beaucoup plus forte que l’an dernier.
Cette domination, elle la doit autant à ses mérites qu’aux circonstances.
Commençons par ces dernières.
Seule
D’abord, la CAQ est seule sur la piste de danse.
Le PQ et le PLQ ont subi les pires défaites de leur histoire et en ont pour des années à se remettre.
En montrant ses fesses à QS pour le séduire, le PQ a abandonné le centre à la CAQ et provoqué la migration d’un tas d’ex-péquistes vers elle.
En instruisant un odieux procès permanent pour xénophobie du Québec français, le PLQ s’est transformé en étranger dans sa propre maison.
Québec solidaire n’est pas sur une trajectoire ascendante très visible depuis un an.
On vote QS pour se faire plaisir. Plusieurs jeunes m’ont confié avoir voté QS parce qu’ils savaient que le parti ne prendrait pas le pouvoir.
La CAQ bénéficie aussi de la bonne tenue de l’économie et de finances publiques saines.
Reconnaissons-lui cependant d’indéniables mérites.
On pourrait certes faire une longue liste de coches mal taillées. Mais seuls les mordus de la politique s’en soucient.
L’électeur moyen, lui, voit la forêt, pas chaque arbre, et sait pardonner.
Le jour de l’élection, dans l’isoloir, s’il n’a pas une conviction idéologique forte, il fonde son choix sur une impression générale de relative compétence et d’intégrité.
Par ailleurs, je l’ai dit, le redis et le redirai encore : la majorité francophone est nationaliste et modérée.
Elle veut sentir que son identité, qu’elle a raison d’estimer fragile, est prise en compte et défendue.
La CAQ le fait, même si elle pourrait mieux le faire.
La loi 21 sur la laïcité était un strict minimum, mais après les sermons du cardinal Couillard, le vin de dépanneur passe pour un grand cru.
Augmenter les volumes d’immigration après les avoir baissés pendant une petite année est idiot et non justifié par la démagogie sur la pénurie de main-d’œuvre.
Mais au moins, il n’est plus tabou de dire que tout n’est pas uniformément merveilleux dans ce domaine.
Le gouvernement est attendu avec impatience sur le front linguistique.
Au total, le moral de la nation a pris du mieux. Après Philippe Couillard, c’est un printemps psychologique.
Tôt ou tard
Ce qui vaut pour le nationalisme vaut pour les questions économiques et sociales : là aussi, les Québécois sont des pragmatiques, jamais très éloignés du centre.
Le gouvernement l’a compris et navigue dans le milieu de la rivière, dans la zone de confort de l’électorat.
Le premier défi pour la CAQ viendra si l’économie plonge.
Le second surgira quand ce mélange de fédéralistes et de souverainistes se sera fait dire non, non, non, et encore non par Ottawa et le Canada anglais.
Un jour, il y aura un moment de vérité.