La version papier du quotidien La Presse, qui en est à sa 130e année, est vouée à disparaître dans un avenir pas si lointain, d'après les dirigeants de Power Corporation (T.POW) qui refusent cependant de fournir un échéancier précis.
C'est lorsqu'il a été questionné par un actionnaire lors de l'assemblée annuelle du conglomérat propriétaire de Gesca - qui publie La Presse - jeudi, à Montréal, que Paul Desmarais fils a évoqué ce scénario.
«À terme, oui, tout simplement oui», a-t-il répondu.
Quelques instants plus tard, en point de presse, André et Paul Desmarais fils ont justifié leur décision par l'intérêt grandissant à l'endroit de La Presse+ ainsi que le recul constant des revenus publicitaires des médias imprimés.
«Nous n'avons pas de boule de cristal mais on voit les revenus baisser de façon significative, a dit André Desmarais. L'an dernier et cette année, il y a une chute (...) de façon assez importante et ça augure mal pour la survie des quotidiens qui sont uniquement imprimés.»
Les deux frères Desmarais ont reconnu qu'il y avait des exceptions comme le New York Times ainsi que le Wall Street Journal, ajoutant que La Presse n'était pas une «marque mondiale» comme ces deux quotidiens américains, qui peuvent survivre avec des murs payants sur Internet.
Les dirigeants de Power Corporation n'ont pas voulu dévoiler les données concernant le recul des ventes publicitaires dans les quotidiens de Gesca, affirmant que la tendance était similaire à celle observée chez Torstar et Québecor.
Au premier trimestre, les revenus de publicité du secteur des médias ont notamment fléchi de 17 % chez Torstar et de 13,5 % chez Québecor.
Quant au moment où la version imprimée de La Presse disparaîtra, l'incertitude demeure.
«Nous n'avons pas pris de décision, a dit André Desmarais. On voulait une flexibilité pour faire les choses correctement. Le marché déterminera (...) quand et si on doit complètement (se retirer). Peut-être qu'on pourrait garder le samedi ou le mercredi, on n'a pas encore décidé.»
En plus d'avoir investi quelque 40 millions de dollars pour le développement de La Presse+, le quotidien montréalais a récemment annoncé le versement d'un paiement de 31 millions de dollars à Transcontinental (T.TCL.A), qui a accepté de donner au journal plus de flexibilité pour réduire ses volumes d'impression et réaliser des économies.
André et Paul Desmarais fils ont fait valoir que La Presse+, disponible sur Android depuis le 23 avril, a été téléchargée à plus de 490 000 reprises depuis 2013, que la moitié de son lectorat était âgé entre 25 et 54 ans et que cette application représentait environ 30 % des revenus totaux de La Presse.
«Ça restera gratuit, parce que beaucoup de gens ont posé la question, ont rappelé les dirigeants de Power Corporation. Les jeunes ont l'habitude d'avoir des choses gratuites sur Internet et ils veulent avoir leur produit quand ils le veulent. La Presse+ offre tout cela.»
Ces derniers reconnaissent que la disparition de la version papier du quotidien montréalais se traduira fort probablement par des pertes d'emplois, sans toutefois les chiffrer.
«Ce n'est pas à cause de nous, a dit André Desmarais. (...) Les gens en veulent moins. Après un moment, si les publicitaires ne sont pas prêts à mettre des publicités dans les journaux, c'est évident qu'il y aura des mises à pied à faire.»
Ce dernier a également ajouté que l'arrivée de La Presse+ avait permis la création d'emplois «du futur» reliés à la nouvelle plateforme du quotidien montréalais.
Les deux frères Desmarais ont précisé que les autres quotidiens de Gesca - Le Soleil, La Tribune, Le Nouvelliste, Le Droit, La Voix de l'Est ainsi que Le Quotidien - devront trouver le moyen de se redéfinir.
«Ils vont disparaître (sinon), a lancé André Desmarais. Il faudra qu'ils aient des discussions sérieuses (...) en espérant pouvoir trouver une façon d'intégration aux tablettes ou développer une (stratégie) de survie à long terme.»
Ce dernier a également écarté un scénario dans lequel Power Corporation conserverait La Presse pour ensuite se départir du reste de ses quotidiens ailleurs au Québec.
«(Les années) 2008-2009 a été quelque chose qui a frappé les fonds de pension importants, a souligné M. Desmarais. Il faudrait que les gens soient prêts à prendre le risque de continuer dans l'imprimé mais aussi prendre le risque des fonds de pension. Je crois qu'au Québec ça serait plus difficile.»
Profits en hausse
Power Corporation a également profité de son assemblée annuelle pour dévoiler ses résultats du premier trimestre pour la période terminée le 31 mars.
Son bénéfice net a progressé de 7,5 %, à 242 millions de dollars, ou 53 cents par action, par rapport à 225 millions de dollars, ou 49 cents par action, à la même période en 2013.
À la Bourse de Toronto, le titre de Power Corporation a reculé de 31 cents, pour clôturer à 30,60 $.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé