L'enquête sur Marc Bibeau par l'UPAC et sa divulgation dans les médias n'ont pas eu des répercussions qu'à l'Assemblée nationale. Elles ont aussi fait des vagues jusqu'à la haute direction de la Caisse de dépôt et placement, a appris La Presse.
Le ressac a emporté l'administratrice Maryse Bertrand, pressentie pour être la prochaine présidente du conseil d'administration. Cette avocate réputée a quitté le conseil le 2 juin dernier, moins de cinq mois après être entrée en poste.
Selon nos sources, la gestionnaire n'est pas une des parties à l'enquête de l'Unité permanente anticorruption (UPAC), pas plus que la Caisse de dépôt.
Son départ s'explique plutôt par le travail de son mari, William Brock. L'avocat de la firme Davies a le mandat de défendre Marc Bibeau, ex-argentier du Parti libéral du Québec.
À la fin d'avril et au début de mai, l'enquête de l'UPAC sur Marc Bibeau a provoqué une tempête médiatique, après la publication de certains détails dans les médias.
Cette enquête porte sur les liens entre le financement politique et l'attribution de contrats. William Brock a alors été cité plusieurs fois dans les médias.
Mercredi, en lien avec les fuites au sujet de l'enquête, l'UPAC a fait des perquisitions dans certaines résidences, dont celle du député libéral de Chomedey, Guy Ouellette.
Situation délicate
Le printemps dernier, dans les semaines qui ont suivi, Maryse Bertrand a expliqué à des sources proches de la Caisse que la médiatisation du travail de son mari pouvait mettre l'institution dans une situation politiquement délicate. Elle a quitté le conseil parce que l'institution aurait pu, par ses liens, être injustement éclaboussée, selon nos informations.
Jointe par courriel, Maryse Bertrand n'a pas précisé les raisons de son départ. «Sachez toutefois que je n'ai que du respect pour l'organisation, son conseil et ses dirigeants. Et je reste en excellents termes avec eux», a-t-elle écrit.
Maxime Chagnon, porte-parole de la Caisse de dépôt, affirme que Maryse Bertrand a quitté son poste pour des «raisons qui lui sont propres».
Pressentie pour présider le conseil
Maryse Bertrand, âgée de 58 ans, était entrée au conseil d'administration de la Caisse le 16 janvier. Son mandat devait s'achever le 15 janvier 2020, avec possibilité de renouvellement.
Selon nos sources, elle devait remplacer le président du conseil, Robert Tessier. Le mandat de l'homme de 72 ans devait prendre fin en juin dernier, mais le Conseil des ministres a annoncé, mercredi, qu'il en prolongeait la durée, sans préciser l'échéance.
Maryse Bertrand possédait un profil recherché pour le poste. Dès son arrivée, des décisions ont été prises pour accélérer son intégration.
Elle est rapidement devenue la seule personne du C.A. à siéger à tous les comités : vérification, ressources humaines, gouvernance et éthique, investissement et gestion des risques.
En vertu de ses règles de gouvernance, la Caisse de dépôt propose les candidats à la présidence du conseil. Mais c'est le gouvernement du Québec qui tranche, ultimement.
Au bureau du premier ministre Philippe Couillard, le porte-parole Charles Robert n'a pas voulu commenter le départ de Maryse Bertrand.
De son côté, William Brock nous a écrit qu'il n'avait rien à ajouter. «Elle est partie de son plein gré pour des raisons personnelles», a-t-il indiqué.
Maryse Bertrand n'a reçu aucune compensation financière au terme de son départ, nous a confirmé la Caisse de dépôt.
Une avocate au coeur des grandes transactions de Québec inc.
Avec le départ de Maryse Bertrand, la Caisse de dépôt est privée d'une avocate qui a été au coeur de plusieurs des transactions majeures de Québec inc.
Dans les années 2000, elle a joué un rôle dans l'achat de Circle K par Couche-Tard, la fusion entre Abitibi-Consolidated et Bowater et l'achat de la Bourse de Montréal par le Groupe TSX. Elle était alors avocate chez Davies Ward Phillips & Vineberg, où travaille toujours son mari, William Brock.
Aujourd'hui, Maryse Bertrand siège toujours au conseil de Metro et de la Banque Nationale.
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