Après un long cycle d'austérité, le gouvernement Couillard avait prévu parler de prospérité en 2016. Mais, après une série de controverses aussi étonnantes qu’inutiles, voilà que le thème de l’intégrité s’impose à nouveau. Comme une migraine intermittente.
Des libéraux sont arrêtés un jour de budget et maintenant Enquête implique Sam Hamad, un des ministres les plus influents du gouvernement, dans ce qui a toutes les apparences d’un trafic d’influence au centre duquel on trouve encore (!) Marc-Yvan Côté.
Le président du Conseil du trésor compte en effet, avec Jean-Marc Fournier, parmi les hommes de confiance du premier ministre Couillard. Ça, c’est un vrai coup dur.
« Personnage toxique »
Deux semaines après l’arrestation de Nathalie Normandeau, réentendre Jean Charest et Sam Hamad faire l’éloge de Marc-Yvan Côté est aussi irréaliste qu’inacceptable. Ce personnage était réputé pour être «politiquement toxique». Dégoûté par le scandale des commandites, Paul Martin devait d'ailleurs le bannir du PLC.
M. Hamad a tort de n’y voir qu’un «pétard mouillé». Cette histoire n’est pas terminée et, les vaniteux étant généralement imprudents, d’autres courriels pourraient faire la manchette...
À l'Assemblée nationale, la tension est à son comble. Les libéraux sont aux abois, tandis que les partis d’opposition se frottent les mains en attendant la période des questions de mardi mais réclament déjà l’intervention de l’UPAC et la démission du ministre Hamad.
Celui-ci refuse évidemment d’obtempérer. Il a plutôt lui-même demandé au Commissaire à l’éthique et à la déontologie de l’Assemblée nationale de se pencher sur son propre cas! Ça permet tout au moins de gagner du temps.
Mais Philippe Couillard risque gros en mettant trop d’efforts à défendre son ami Sam; le moral du caucus libéral n’est pas au zénith et une controverse durable plongerait tout le monde dans une irréversible déprime.
2016 est d'ailleurs extrêmement difficile pour les libéraux: le gouvernement s’attendait à une frappe de l’UPAC depuis le début de mars. Mais personne ne croyait que le commissaire Robert Lafrenière (photo) s’offrirait une brochette de libéraux un jour de budget.
Robert Lafrenière
Cette initiative spectaculaire plane toujours comme un nuage sur la fin du mandat du commissaire Lafrenière. C’est un policier aguerri et un fin renard. Les politiciens le respectent et le craignent. Certains le détestent. Au caucus libéral, il ne fait pas l’unanimité. Mais le remplacer provoquerait un tollé.
Le mandat de M. Lafrenière est officiellement terminé. Le gouvernement Couillard aurait pu le maintenir dans ses fonctions à la réunion du Conseil des ministres, mercredi dernier. Il ne l’a pas fait, sous prétexte que le comité de sélection ne lui a pas fait de recommandation. Il s’agit d’une parade. Parce que le gouvernement soupèse toujours ses options.
La loi de l’UPAC précise que, à l'expiration de son mandat, le commissaire demeure en fonction jusqu'à ce qu'il ait été «nommé de nouveau ou remplacé». Voilà pourquoi M. Lafrenière est toujours en poste. Mais son avenir n’est pas définitivement assuré.
Le gouvernement pourra trancher le mercredi 6 avril prochain ou encore le 13 suivant, aux réunions régulières du cabinet. M. Lafrenière ou son successeur pourront ensuite assister à l’étude des crédits budgétaires du ministre de la Sécurité publique, la semaine suivante.
Cet exercice est obligatoire et sera passionnant. Ministre, fonctionnaires et policiers seront soumis aux questions des députés de l’opposition; personne ne pourra se défiler.
La scène risque d’être mémorable: derrière le ministre Martin Coiteux, on pourra voir le patron de l’UPAC, et donc possiblement Robert Lafrenière. Mais aussi son gendre, Martin Prud’homme, le patron de la SQ ! Le monde est petit, même dans la police...
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1 commentaire
André Lemay Répondre
3 avril 2016Je lis trop Pelletier. Jean-Jacques.
Le jour du budget, au moment où l'on apprenait les événements, j'ai tout de suite penser que M. Lafrenière dont nous connaissions les circonstances professionnelles, négociait le renouvellement de sa charge dont on sait qu'il le désirait.
Puis, il a simplement ajouté que l'escouade enquêtait sur une cinquantaine d'autres dossiers.
Quand soudain Enquête obtient des courriels compromettants, je ne peux y voir qu'un petit ajout de pression de la part de ce même M. Lafrenière afin de s'assurer plus qu'un intérim.