Il y a une semaine, Yves Michaud a eu une expression malheureuse. Il a dit: «Ceux qui ne veulent pas se soumettre à la charte des valeurs québécoises, si jamais elle est votée par l'Assemblée nationale, n'auront qu'à aller ailleurs, là où on accepte tous les accommodements, comme dans la province voisine, par exemple».
Puis, quelques heures plus tard, il rectifiait le tir, faisait amende honorable et affirmait, dans un communiqué, que ses propos visaient les fonctionnaires, bien entendu, ceux qui œuvrent dans la fonction publique et qui voudraient maintenir malgré tout leurs signes religieux ostentatoires.
Cela ne concernait donc pas le simple quidam opposé à la charte. Ni votre boucher, ni la préposée aux billets du Cinéplex, on se calme. Mais plusieurs ont préféré verser dans la bêtise crasse et affirmer qu'ils refusaient de s'exiler, plutôt que d'admettre que cette remarque s'adressait uniquement à ceux qui seraient portés à enfreindre la loi.
Ce fut la curée. On avait enfin un bouc-émissaire qu'on allait pouvoir lapider sur la place publique. À Radio-Canada, une animatrice pour qui Michaud est manifestement coupable de racisme l'interviewe pour tenter de lui faire perdre la face et l'enfoncer un peu plus. Ce n'est pourtant pas dans son mandat. Elle revient à la charge quelques jours plus tard, en questionnant un chroniqueur habituel, Joseph Facal, pour tenter de lui faire dire ce qu'elle voulait bien entendre.
«Vous me regardez avec un air, Joseph Facal. Vous n'avez pas l'air surpris de l'absence de réaction du PQ...» Et l'interpellé de répondre: «Mais il se prépare à une très grosse semaine à partir de mardi. Charte, charte, encore charte, et je crois qu'on sera passé à autre chose dans une semaine.» «Oui, d'accord, c'est un point de vue», de conclure l'animatrice, déçue.
Une heure plus tard, c'est au tour de Louise Beaudoin d'être soumise à la question qui tue: «Ce qui est très étonnant dans cette affaire, c'est qu'il y a une absence de réaction du côté du Parti, qu'on n'entend ni M. Drainville, ni M. Lisée ni qui que ce soit du côté du Parti qui réagit aux propos quand même assez forts d'Yves Michaud. Est-ce que ça vous étonne? Comment interprétez-vous ce silence du Parti québécois?» Et Louise Beaudoin de tenter de calmer ses ardeurs.
Bazzo insiste: «Mais juste pour revenir sur l'affaire du Parti québécois. Vous dites: on verra si le bruit est encore là. Il demeure que Yves Michaud est vraiment un ténor de la souveraineté et ce qu'il vient de dire amène une couleur vraiment particulière. Que le Parti québécois n'essaie pas de se dissocier ou au contraire de dire qu'il est d'accord, ce n'est pas une banale histoire qui vient topper dans l'actualité.»
Et Louise Beaudoin de surprendre l'animatrice déchaînée avec une phrase coup de poing: «Moi, je suis très d'accord avec Yves Michaud sur une chose, c'est sur la charte. [...] Je pense que ceux qui ne sont pas d'accord n'ont pas à quitter si jamais la loi est votée. [...] Si on partait en effet du Québec... nous, on a perdu deux référendums, le dernier, on l'a perdu par la peau des dents [sic], mais le lendemain matin, ni Yves Michaud d'ailleurs ni moi-même on s'est levé en disant je quitte le Québec, on est resté. C'est ça, le débat démocratique. Il y a des lois qui sont votées et en principe, tout le monde s'y rallie, c'est ça l'idée de la démocratie. »
Mais l'animatrice vedette ne le prend toujours pas. Quelques jours plus tard, elle revient à la charge avec le ministre Drainville: «Tout d'abord on va parler des déclarations d'Yves Michaud, la semaine dernière, qui s'est amendé du bout des lèvres mais qui invitait ceux qui n'étaient pas d'accord avec la charte à plier bagage. Ça a fait grand bruit. La question: Pourquoi votre gouvernement n'a-t-il pas réagi immédiatement après les déclarations de M. Michaud?»
- Écoutez, j'ai réagi quand même assez rapidement, réplique M. Drainville.
- Mais pas le lendemain, claironne Bazzo.
- Madame Bazzo, à un moment donné, vous savez, on n'est pas toujours au bout du fil à attendre les déclarations de l'un ou de l'autre pour réagir. Moi je l'ai fait dès que j'ai pu le faire, dès que ça été physiquement possible.
- Mais pourquoi, pourquoi, M. Drainville, n'a-t-on pas envoyé au gouvernement un autre ministre ou même la première ministre, ce n'était pas léger comme déclaration?
- Moi j'ai dit qu'il était allé trop loin, que je ne partageais pas son point de vue.
- Vous le percevez comment M. Michaud?
- Il a son franc parler, parfois ça a des avantages, il a lui-même admis qu'il est allé trop loin, qu'il l'avait échappé. Je pense que l'incident est clos.
- Pensez-vous? Parce que ça vraiment blessé des gens, et même des gens qui sont pro-charte, pensez-vous que cette prise de position-là, même s'il s'est amendé, pourrait nuire à votre projet?
- Je ne crois pas, non, parce que vous savez, il a commis une erreur, l'erreur est humaine, à un moment donné, c'est regrettable, à un moment donné tu commets une erreur, tu fais amende honorable et tu continues, ça n'enlève rien aux grands principes et aux grandes valeurs...
L'animatrice a visiblement perdu sa bataille. Mais voilà que La Presse prend le relai. Je passe sous silence l'infâme Dubuc toujours prêt à dégainer sur l'homme blessé. Patrick Lagacé, vous savez, celui qui rêve d'être aussi brillant que Foglia mais qui n'a pas même une parcelle de son intelligence ni de sa culture, envoie un courriel à Yves Michaud qui l'avait traité de crétin (le mot, avouez, est plutôt faible s'agissant de Lagacé) à la suite de ce qu'il avait dit de lui à Paul Houde. Le courriel est émis à partir de l'adresse de La Presse.
Lagacé le traite de «vieux looser qui a fait sa carrière à se réclamer de l'amitié de René Lévesque», de «vieux bandé mou de la Nation qui, dans un autre temps, aurait fièrement repassé ses chemises brunes pour le bien du Peuple». Puis il termine par cette phrase assassine: «Ce qui me fait penser: je devrais bien écrire cette chronique enjoignant l'Assemblée nationale à ne pas vous faire d'excuses, ne serait-ce que parce que ça vous ferait suer jusqu'au cimetière, ce qui sied bien à un intolérant de votre genre.»
Dans un cas comme dans l'autre, vous ne croyez pas que l'ombudsman de Radio-Canada et le Conseil de presse du Québec devraient être saisis de ces manquements graves à la profession? Quand Bazzo fait de l'acharnement à propos de Michaud, est-ce dans le mandat que lui a confié Radio-Canada? Quand Lagacé s'adresse à Michaud en des termes assassins, a-t-il l'accord de ses patrons à La Presse?
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