François Legault espère passer l’éponge et faire oublier le plus vite possible le fait que son président de parti fait dans le prêt usuraire. Pas si vite papillon!
D’abord, appelons un chat, un chat. Stéphane Le Bouyonnec, selon le Journal de Montréal, « est aussi actionnaire et président, depuis mars 2017, du conseil d’administration d’une entreprise qui gère le site iCash, spécialisé dans l’offre de prêts privés à 90 % d’intérêt et plus aux Canadiens hors Québec. »
Dans la langue familière du Québec, on définit la chose comme du « shylocking », en référence au personnage de Shakespeare dans Le marchand de Venise nommé Shylock. Dans le français populaire, le terme « shylock » désigne « Un prêteur qui applique des taux d'intérêt extrêmement élevés ».
Et c’est précisément ce que fait le site iCash, et par extension, ceux qui l’administrent, nommément, Stéphane Le Bouyonnec.
François Legault essaie de balayer le tout sous le tapis en minimisant la situation au possible. Le président de son parti « aurait fait une erreur ».
Boulechitte.
Son président de parti ET candidat dans La Prairie a fait un choix de carrière, un choix d’occasion d’affaires. Ce n’est pas en bonne âme et conscience envers ceux à qui il arrache ces taux d’intérêt exorbitants – souvent les plus mal pris, c’est l’évidence – qu’il a décidé de se retirer de ses affaires de prêts usuraires.
Pas pantoute.
Le Bouyonnec pousse l’odieux en justifiant sa démission des dites compagnies par le fait que son implication dans le prêt usuraire est dorénavant incompatible avec son rôle de président de la CAQ!
Pardon!
Le Bouyonnec est président de la CAQ depuis novembre 2014. Et ça fait un an et demi qu’il est actionnaire et président du conseil d’administration d’une entreprise qui gère le site iCash! Sans compter son rôle dans TechBanx
C’est tout simplement, car il s’est fait prendre la main dans le sac que le président de la CAQ se retire de toutes ces activités douteuses. François Legault nous prend pour des nouilles s’il pense que son explication, ses justifications et celles de son candidat tiennent la route.
En défendant son candidat – et j’insiste ici, « son » candidat, car la CAQ ne tient aucune investiture et la décision de choisir les candidats dans ce parti revient au chef qui façonne lui-même « son » équipe – François Legault minimise l’importance de la faute commise. De nombreux observateurs l’ont fait remarquer, cette pratique de prêts est illégale au Québec, une loi que la CAQ a appuyée.
Veut-on vraiment à l’Assemblée nationale un député, voire un ministre, qui, s’il ne s’était fait prendre, ferait probablement encore dans le prêt usuraire, dans le « shylocking » là où c’est encore « légal » de le faire?
Car, toujours selon le Journal de Montréal, « La firme prête pourtant à des taux d’intérêt annualisés toujours égaux ou supérieurs à 90%, soit 2,5 fois le taux maximal autorisé par le nouveau projet de loi 134, qui a obtenu l’appui unanime des députés [donc de la CAQ] en Chambre en novembre. »
Était-ce à ça que le député de la CAQ Éric Caire référait quand il a admis que ce type de pratique ne cadrait pas avec les valeurs défendues par son parti? Avant de se faire rabrouer par le principal intéressé : « Monsieur Caire n’a pas de leçons à me donner! »
Pour le moment, et tant que le président du parti garde la confiance de son chef, le message que la CAQ envoie c’est qu’elle a les valeurs bien élastiques. C’est ironique quand on considère que le parti qu’elle cherche à remplacer en le copiant au possible s’est distingué pas mal en la matière...
Personnellement, je préfèrerais qu’on tienne très loin de l’Assemblée nationale toute personne qui a fait dans le « shylocking »; tout comme je me questionne sur le sens éthique de ceux qui tentent de défendre une telle personne.
Des mots durs dans la presse anglophone
Un ami de Montréal me faisait remarquer que la presse anglophone avait été très dure envers la CAQ dans ce dossier. Un titre comme celui-ci ne peut qu’être dommageable pour l’image de la CAQ : « CAQ president had ties to predatory loans company: investigation ».
Traduction : « Enquête : le président de la CAQ est lié à une compagnie de prêts aux pratiques prédatrices ».
Dans le texte de CTV News Montreal on insiste sur le fait que Le Bouyonnec a démissionné de son poste avec la compagnie après que les résultats de l’enquête ont été dévoilés.
Ouin. Il a la « morale » bien élastique le chef de la CAQ...
PS : vous chercherez longtemps la version francophone du site de TechBanx. Pourtant, cette compagnie annonce qu'elle a pied à terre à Montréal...