Cette semaine, un sondage Angus Reid indiquait que François Legault, avec 60 % d’appui des Québécois, est de loin le premier ministre le plus populaire au Canada.
Il aura bien besoin de cet appui avec son projet de loi sur la laïcité déposé hier. Car la guerre est désormais ouverte contre le Québec.
Ceux qui ont vécu les deux campagnes référendaires avec ses menaces et la violence anti-québécoise sont mieux armés sans doute devant la diffamation systématique qui s’abat sur le Québec. Le Canada anglais, le gouvernement fédéral et les Québécois multiculturalistes sortent leurs munitions en traitant le peuple de raciste et de tous les mots se terminant en « phobe ».
Que l’on soit favorable à la proposition de Bouchard-Taylor (Taylor a changé d’idée depuis) ou que l’on se rallie à celle du gouvernement Legault, qui inclut les enseignants dans l’interdiction des signes religieux, nous sommes tous condamnés par cette laïcité, qui nous distingue des anglophones et des allophones, partisans d’un Canada postnational qui sacralisent les chartes des droits et les estiment immuables.
Seul
En fait, le Québec est seul en Amérique du Nord à adhérer à ce concept de la laïcité. Dans cette loi, il y a une volonté de rédemption offerte à un peuple qui a vécu sous le joug d’une Église omnipotente qui a imposé une morale tordue, a culpabilisé des générations, qui ont appris à compter des chapelets, qui ont confondu l’histoire sainte et l’Histoire, et que les autorités religieuses ont maintenues à genoux au propre comme au figuré.
Oui, les Québécois se méfient des religieux. Cette loi sur la laïcité est de fait une façon d’exorciser enfin le poids séculaire de la religion sur la sécularité qui a accompagné la Révolution tranquille.
Devant l’ostentation religieuse, les Québécois manifestent des allergies. Quiconque refuse cette réalité ne saisit pas une dimension essentielle de l’identité collective.
Isolement
Ce projet de loi n’est pas le début d’un avenir sombre pour les citoyens qui affichent leurs croyances. C’est plutôt la fin d’un cycle où la religion a isolé les Canadiens français repliés sur eux-mêmes et sur les parvis des églises, aujourd’hui désertées ou transformées en condos.
Ce projet de loi, qui est en train de rendre hystériques le Canada et un nombre non négligeable de Québécois multiculturalistes, est présenté comme le bannissement des signes religieux dans l’espace public. Or jamais il n’a été question d’une telle violation de la liberté religieuse, un des principes sacrés des droits individuels.
À vrai dire, le débat déjà amorcé sera traumatisant, ne le nions pas. L’expérience passée de celui sur la souveraineté nous l’a prouvé. Il doit être donc dominé par des gens raisonnables, des gens de cœur, qui refusent de céder à l’indignité, voire à la haine.
Personne dans ce débat ne peut revendiquer le monopole de la vertu et de la vérité absolues. Les insulteurs, les méprisants et les intolérants séviront, certes, mais nous sommes plus nombreux qu’eux. Et le gouvernement Legault n’est pas composé de gens par définition malveillants et irresponsables.