La formation d’un parti est contre-productive

Il faut recréer la coalition nationale

Chronique de Gilles Verrier

Il faut donner crédit à Pauline Marois pour son honnêteté. Elle fera pour la souveraineté ce qu’ont fait ses prédécesseurs mais avec plus de transparence. Elle a raison. Le PQ en tant que tel est prisonnier d’obligations et de responsabilités provinciales et il peut difficilement s’en libérer. Ce que semble souhaiter Mme Marois dans ses récents discours c’est que d’autres forces prennent la relève d’une cause qu’elle se déclare incapable de porter. Est-ce un sacrilège de croire que le leadership du PQ ne coïncide pas avec ce que pourrait être le leadership de la lutte nationale?
Dans ce contexte, la formation d’un nouveau parti politique indépendantiste semble faire son chemin et aurait la faveur, entre autres, de plusieurs péquistes désenchantés. La réflexion est toutefois loin d’être terminée.
Selon moi, la formation à ce stade d’un nouveau parti indépendantiste risque d’avoir pour effet d’affaiblir davantage l’option. D’abord, ce nouveau parti ne fera pas le poids devant les autres formations politiques. Il sera ignoré, sinon dénaturé par les médias. Il sera incapable d’attirer à lui des adhésions en nombre significatif chez les nombreux nationalistes qui se passionnent aussi pour les enjeux sociaux légitimes et pressants qu'on ne cesse de débattre au sein du PQ, de l’ADQ et de QS. La concurrence que ce nouveau parti fera aux partis existants aura pour effet de peinturer dans le coin les indépendantistes, de révéler leur nombre et leur poids politique. Ce parti se mettra à dos nombre de sympathisants potentiels. Cette voie fait courir le risque d’une division plus accentuée des Québécois entre eux au mieux et, au pire, la marginalisation de l’option. L’utilité d’un tel parti n’est donc pas encore démontrée.
L’indépendance est une option constitutionnelle légitime au Québec et acceptée comme telle, et officiellement, par deux partis politiques. Ceci est un acquis considérable. Les indépendantistes sont donc bienvenus, en principe, pour travailler au sein de ces formations politiques et y faire leur place. Y travailler ne veut pas dire s’acharner contre la culture et le leadership de ces partis. Cela veut dire y défendre une idée claire de l’indépendance et faire progresser cette idée. La souveraineté du Québec aura besoin de l’appui de la majorité des Québécois, peu importe la formation politique dans laquelle ils militent par ailleurs. Vue sous cet angle, la formation d’un parti est contre-productive. Les progrès de l’option devraient être pensés, mesurés et instrumentés autrement - sans déroger de la voie démocratique – c’est-à-dire en dehors du cadre devenu étroit, mis en place par le PQ en d’autres temps.
À mon avis, il y a suffisamment de partis politiques pour représenter la diversité des courants d’opinion de la société québécoise. Il y en a pour toutes le options sociales. Les indépendantistes devraient simplement admettre cette réalité et agir dans toutes les couches de la société au moyen d’une structure indépendante - indépendante du système électoral canadien d’abord et indépendante des arcanes de la politique provinciale également - afin d’unir la majorité des Québécois pour réaliser l’indépendance. Il est temps d’unir et non de diviser. Sans l’union d’une vaste majorité, l’indépendance ne sera jamais possible. La tentative d’unir les Québécois dans un seul parti a échoué, il faut tenter de recréer la coalition nationale en englobant les membres, les sympathisants et les électeurs de tous les partis politiques, la majorité se trouve là. Une fois la majorité clairement acquise, la démocratie prévaudra et elle trouvera bien son chemin pour le faire.
S’il y a quelque chose qui a manqué depuis quarante ans, ce n’est pas un parti politique. Mais justement, qu’est-ce qui a manqué ? Répondre correctement à cette question pourrait nous donner la clé de ce qu’il nous faut désormais pour progresser et réussir.
G. Verrier

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Gilles Verrier140 articles

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Entrepreneur à la retraite, intellectuel à force de curiosité et autodidacte. Je tiens de mon père un intérêt précoce pour les affaires publiques. Partenaire de Vigile avec Bernard Frappier pour initier à contre-courant la relance d'un souverainisme ambitieux, peu après le référendum de 1995. On peut communiquer avec moi et commenter mon blogue : http://gilles-verrier.blogspot.ca





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8 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    8 août 2007

    «S’il y a quelque chose qui a manqué depuis quarante ans, ce n’est pas un parti politique. Mais justement, qu’est-ce qui a manqué ? Répondre correctement à cette question pourrait nous donner la clé de ce qu’il nous faut désormais pour progresser et réussir.
    G. Verrier»
    On dirait un chat qui court après sa queue. Le manque se situe au niveau de l'action concrète et non pas au niveau de l'attentisme à la PQ ou de la réflexion qui ne mène pas loin si ce n'est à «une cogitation malsaine des: on aurait donc du».
    Cette cogitation cela fait longtemps que vous la suggérez mais elle ne mène nulle part si ce n'est à la procrastination des gestes concrets qui auraient du être réalisés depuis plus de dix ans.
    Mais comme on dit : «Il n'est jamais trop tard pour bien faire».Le Parti Indépendantiste se veut une alternative pour ceux qui veulent agir pour la création du nouveau pays et non pas pour la création d'une nouvelle élite politique.
    Les deux dernières élections ont vu apparaître une nouvelle tendance: L'abstention qui, en plus de la nouvelle génération qui ne croit plus en la démocratie telle que présentée au Québec (je les comprends), rejoint ceux qui se considèrent comme des orphelins politiques parce que trahi par un nouveau vieux parti, le PQ, qui n'a de cesse que de prendre le pouvoir pour le Pouvoir.
    Pas pour nous donner un pays, pas pour une société plus humaine, juste pour le Pouvoir. C'est le temps qu'on pense au Pays à faire et non pas uniquement au pouvoir.

  • Archives de Vigile Répondre

    26 juillet 2007

    Monsieur Verrier,
    Peut-être suis-je dans l'erreur, mais j'ai l'impression que vous posez des questions auxquelles vous avez personnellement apporté des réponses. Il serait intéressant pour tous de pouvoir en bénéficier. Vous mentionnez l'importance de faire un bilan des années de militantisme péquiste: qu'attend-on pour y procéder? Et sous quelle forme? La formation d'un nouveau parti est-elle de nature à nuire à cette réflexion? Je pense que les personnes qui adhèrent à cette idée de la nécessité d'un nouveau parti ont fait un bilan, mais peut-être pas le même que le vôtre, ce qui semble vous faire réagir. Alors, pourquoi ne pas partager vos conclusions?
    Lorsque je mentionne que le fait de libérer la parole indépendantiste est un gain, je le pense sincèrement, mais ce n'est certainement pas le but ultime de créer un nouvelle formation. Cette formation ne serait pas vouée à la gouvernance provinciale comme les autres partis existants, et pourrait éviter les écueils que vous mentionnez; c'est là qu'il se distinguerait clairement des autres. Son seul et unique but serait la réalisation de l'indépendance. Sa lutte se situe EN DEHORS du régime et non DANS le régime.
    N'est-ce pas cela que désirent les indépendantistes?
    Suzanne Lachance

  • Archives de Vigile Répondre

    26 juillet 2007

    M. Rodrigue, privé d’un centre indépendantiste dont il faut regretter l’absence, il est non seulement difficile de promouvoir la souveraineté au sein du Parti québécois ou du Parti libéral mais partout ailleurs dans la société. Vous avez raison là-dessus. Cependant, pour moi, il ne s’agit pas de s’adresser au Parti québécois mais à nos compatriotes, les Québécois et les Québécoises, membres des diverses formations politiques, en particulier les deux formations politiques qui reconnaissent la souveraineté comme un objectif légitime. Croyez-moi, je n’entretiens aucune illusion en ce qui concerne la capacité du Parti québécois de nous conduire à l’indépendance.
    Mme Lachance, il y a de nombreux Québécois pour qui primera l’allégeance à l’indépendance devant la sympathie pour leur parti politique, pourvu qu’on leur en donne l’occasion. Pour les indépendantistes qui veulent aboutir, la cause nationale a préséance sur la lutte sociale et les enjeux provinciaux immédiats. Non pas que les enjeux sociaux soient sans importance mais, à un moment donné, il faut se donner une plénitude démocratique nationale et l’indépendance nous la donnera. Il est un peu court d’associer la « libération » de la parole indépendantiste à la formation d’un parti politique. Si les indépendantistes n’ont jamais pu avoir de grande influence, sauf dans de rares parenthèses historiques, est-ce vraiment parce qu’ils n’avaient pas de parti ? Il faudrait y réfléchir.
    En outre, il faut réaliser que l’indépendance n’est pas une lutte politique de même niveau que celle livrée par les partis politiques provinciaux. La lutte pour l’indépendance transcende la politique provinciale. Les partis politiques provinciaux se condamnent, de petites concessions en petites concessions, à mener des luttes dans le régime, et cela est une glissade tout à fait naturelle, alors que les indépendantistes mènent une lutte sur le régime. N’avez-vous rien retenu de l’histoire du Parti québécois et du Bloc québécois ?
    Il faut faire le bilan SUR DES BASES INDÉPENDANTISTES des quarante dernières années avant de se jeter tête baissée dans une reformation du Parti québécois - ou du RIN - Ce bilan reste à faire.
    Salutations

  • Frédéric Picard Répondre

    25 juillet 2007

    Monsieur Verrier,
    J'ai bien aimé votre article, quoique je n'en partage pas l'essence. Je dénote cependant un certain signe d'ouverture "À CE STADE".
    Premièrement, vous abordez le rôle du chef d’une formation indépendantiste. Vous écrivez : « Ce que semble souhaiter Mme Marois dans ses récents discours c’est que d’autres forces prennent la relève d’une cause qu’elle se déclare incapable de porter. ». Un parti politique est un moyen démocratique pour faire changer les choses. Dans cette mesure, le PQ, mais particulièrement son chef, doivent être les porte étendards des idées indépendantistes ! Dissocier personne et fonction est impossible. Surtout lorsqu’on sait que Pauline Marois arrive avec son inconditionnel bouquet d’idées.
    Être chef d’une formation politique n’est pas une sinécure. De par son importance, le chef d’une formation indépendantiste doit, sans relâche, faire la promotion de l’indépendance. Pauline Marois, par sa légitimité démocratique, ne peut se désincarner du projet indépendantiste sans en désincarner le PQ en entier. Le nier serait nier l’importance des chefs dans notre démocratie moderne.
    Dans cette mesure, doit-on militer pour une formation politique totalement vidée de sa substance ? Vous dites « Y travailler ne veut pas dire s’acharner contre la culture et le leadership de ces partis. » Il serait fortement contre-productif de militer dans un parti qui a perdu son essence. Peu importe les efforts mis pour l’indépendance, ils ne seront pas appuyés par le parti. Le parti ne sera plus le surmultiplicateur de l’action militante. Il n’en sera qu’une transmission au point neutre.
    La faiblesse d’un mouvement à long terme (j’appuie un mouvement à court terme, un tuteur de parti), repose par ses moyens limités pour infléchir les politiques. L’homme est un être cognitif. Il réagira face à une menace ou une opportunité. Si un mouvement n’offre pas une menace ou une opportunité suffisamment importante, les politiques ne bougeront pas. Des mouvements, il y en a une constellation. À voir comment le PQ ignore la SSJB, un mouvement « phare », il serait étonnant qu’un mouvement, tout aussi puissant qu’il puisse être, puisse briser le « silence d’écoute » régnant au PQ.
    En esperant « ce stade » , monsieur Verrier, c'est toujours un plaisir de vous lire

  • Archives de Vigile Répondre

    25 juillet 2007

    Monsieur Verrier pour qui j'ai beaucoup de respect se contente hélas! de peu. Si le Québec est encore une province aujourd'hui, c'est que plusieurs (trop à mon sens) se contentent de peu. On ne sait en effet plus rien exiger en ces temps moroses, où le pouvoir central envahit de plus en plus les champs de compétences des provinces qui ne rouspètent que peu ou prou, selon les dollars espérés.
    Tenir un discours indépendantiste au PQ ou à QS ne servira à rien de plus que ce à quoi il sert aujourd'hui: à faire un bruit de fond dérangeant ou accommodant, selon l'humeur du moment. On a besoin des indépendantistes dans la marmite, mais on s'empresse de mettre le couvercle dessus.
    Un nouveau parti permettra de libérer la parole indépendantiste. C'est déjà un gain appréciable.
    D'ailleurs, le fait de prôner un discours indépendantiste au sein de ces partis (PQ ou QS) met en relief le fait troublant qu'il est actuellement inexistant. A-t-on besoin de demander aux fédéralistes de tenir un discours fédéraliste???
    Suzanne Lachance

  • Nicolas Rodrigue Répondre

    25 juillet 2007

    Vous dites que "les indépendantistes sont donc bienvenus, en principe, pour travailler au sein de ces formations politiques et y faire leur place. Y travailler ne veut pas dire s’acharner contre la culture et le leadership de ces partis. Cela veut dire y défendre une idée claire de l’indépendance et faire progresser cette idée.", mais à l'intérieur de quel parti le parti Libéral ou le parti Québécois parcequ'il n'y en a aucun des deux qui est plus souverainiste que l'autre. Promouvoir l'indépendance du québec au sein du PQ est aussi difficile que d'introduire la souveraineté du Québec dans le programme du PLQ. Ils sont souverainiste de nom et non dans la pratique et il y en a qui ne l'on pas encore compris.

  • Archives de Vigile Répondre

    25 juillet 2007

    M. Bousquet,
    J'ai l'impression que vous êtes en service commandé pour le PQ. Vous dites la même chose à toutes vos interventions.
    Guy Le Sieur
    Vive la République de l'Amérique française

  • Archives de Vigile Répondre

    25 juillet 2007

    Très bien envoyé M. Gilles Verrier !
    Même la fondation du parti QUÉBEC SOLIDAIRE a été contre-productive pour ceux qui placent la souveraineté avant la gauche extrème qui s'embarrasse peu des dettes et des obligations actuelles du Québec.
    On a un seul parti de statu quo au Québec, un autonomiste près de vrai confédérationiste et un souverainiste avec ou sans association et/ou partenariat avec le ROC. C'est un bon choix constitutionnel ça.
    Si les fédéralistes, insatisfaits de M. Charest qui semble vouloir coller là, fondaient un autre parti fédéraliste de statu quo, on sait que ça affaiblirait l'option fédéraliste. C'est la même chose pour les souverainistes. C'est même une lapalissade que de simplement le dire et/ou l'écrire.
    Ceci étant écrit, il reste que le désir du PQ de gouverner le Québec-province pendant quelques mandats en mettant de l'avant un plan gouvernement provincial, est une grave erreur...selon moi pour les raisons suivantes :

    La grande majorité des gouvernements ne dure pas plus de 2 mandats de suite. Si le référendum pour la souveraineté est prévu dans le troisième, le PQ ne serait déjà plus au pouvoir, normalement.
    En plus, si le gouvernement provincial du PQ réussit plein de bonnes choses en gouvernement la province, les Québécois vont se dire : Ça va tellement bien comme ça, pourquoi changer pour l'inconnu ? Si ça va mal, ils diront, Ils ne sont même pas capables de gouverner une province, on va se dépêcher à les débarquer de là. Plus tous les ennemis que le PQ s'est fait en gouvernant dans le passé, adieu référendum futur !
    Faudrait que le PQ ait un programme de pays et, qu'à la place de plus ou moins cacher son option souverainiste aux élections, la place au centre et déclare nettement "comme le suggère M. Louis Bernard" NOUS SOMMES SOUVERAINISTES, SI VOUS NE L'ÊTES PAS, VOTEZ POUR UN AUTRE PARTI parce qu'on ne va pas gouverner une province mais tenir un référendum dès notre arrivée au pouvoir et, démissionner si on le perd. Les seuls perdants à ce jeu pourraient être les carriéristes péquistes qui considèrent leurs revenus de députés et de ministres, au dessus du pays à créer.
    Nous avons déjà eu les Catholiques à gros grains "mous", nous avons maintenant, les souverainistes à gros grains. Autre temps, autre religion.