Le débat risque d’être aride et riche en arguties légales. La cause de James Cody s’amène à la Cour suprême du Canada ce mardi, mais l’accusation de trafic de stupéfiants pesant contre le Terre-Neuvien sera bien accessoire. Les avocats décortiqueront plutôt les cinq années passées à attendre son procès pour déterminer si le délai était raisonnable. La décision que rendront les juges — peut-être sur le banc — risque d’affecter des centaines de causes criminelles… et d’éclairer un peu plus la classe politique qui n’en finit plus de gérer les conséquences de l’arrêt Jordan.
James Cody est accusé de possession de cocaïne et de marijuana à des fins de trafic et de possession d’arme prohibée. Il a été intercepté en janvier 2010 par la police dans le cadre d’une enquête plus vaste sur un réseau de trafic de stupéfiants. Son procès devait avoir lieu en janvier 2015, mais son avocat a plaidé avec succès que son droit d’être jugé dans un délai raisonnable, garanti par la Charte des droits et libertés, avait été violé. Le juge a donc rejeté les accusations. La cour d’appel a infirmé cette décision et ordonné un nouveau procès. La Cour suprême doit maintenant décider qui des deux a eu raison.
La cause est d’une importance particulière car entre-temps, la Cour suprême a rendu une décision dans une autre affaire (arrêt Jordan) décrétant de nouvelles normes en matière de délais judiciaires. Le plus haut tribunal du pays a statué l’été dernier qu’une cause en Cour supérieure devrait être réglée en 30 mois. La norme s’applique aux nouveaux dossiers amorcés après cet arrêt Jordan. Pour les causes commencées avant — comme celle de M. Cody —, des calculs transitoires sont prévus, mais le débat fait rage sur la façon de les effectuer, ces calculs. Plusieurs intervenants voient dans la cause Cody une occasion inespérée pour la Cour suprême de clarifier sa pensée.
Signe que le sujet est brûlant d’actualité, cinq provinces interviendront dans la cause de M. Cody : le Québec, l’Ontario, l’Alberta, le Manitoba et la Colombie-Britannique. Au Québec, en Ontario et en Alberta, un total de quatre hommes accusés de meurtre ont vu leurs accusations abandonnées au nom de l’arrêt Jordan.
Dans son mémoire, Québec invite la Cour suprême à réitérer que l’arrêt Jordan doit être appliqué « de façon souple et contextuelle ». Québec fait valoir que depuis la fameuse décision, la province a injecté des fonds supplémentaires pour accroître les ressources judiciaires. « Dans les dossiers transitoires, lorsqu’il s’agit de déterminer le caractère déraisonnable des délais pour la portion postérieure à l’arrêt Jordan, cette détermination devrait tenir compte du temps nécessaire à ce que les changements mis en place produisent leurs effets, écrit Québec. Il arrivera certes un moment où cette souplesse ne sera plus permise […]. Toutefois, tel n’est pas encore le cas. »
Les avocats de M. Cody plaident que le caractère déraisonnable du délai de leur client ne fait aucun doute. « Attendre cinq ans pour un procès de cinq jours dans un cas de complexité modérée est simplement trop long ! »
Pour déterminer le caractère raisonnable d’un délai, le juge doit d’abord en impartir la responsabilité entre la Couronne et la défense. La Couronne fait valoir que le délai Cody n’est pas déraisonnable, plaidant que le juge de première instance a erré en attribuant mal les responsabilités. « Le délai dans cette cause est facilement explicable par les multiples dérogations de la défense, les circonstances exceptionnelles et plusieurs demandes illégitimes et sans fondement de la défense à propos d’une erreur mineure et sans conséquence dans l’énoncé conjoint des faits. »
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