L’union des droites qui n’est pas une piste médiocre est en train de se gangrener, écartelée entre un slogan et une bataille d’ego.
La désunion des personnes plus que l’union des idées. À supposer que celles-ci existent, qu’elles soient claires, acceptables, rassembleuses et donc complexes. Le sommaire et le simplisme ne pourront jamais constituer durablement une tentation pour le peuple français qui, dans ses profondeurs, délesté de ses exacerbations ponctuelles, est d’un lucide bon sens. Conscient de ce qu’on doit attendre des personnalités de pouvoir et d’un pouvoir en même temps intelligent et exemplaire.
On est loin avec l’union des droites, telle qu’elle flotte sur l’actualité depuis quelques mois, de ces exigences.
On avait le droit de juger intéressantes, et pas forcément intempestives, les interventions récentes de Marion Maréchal prônant une union des droites dont Robert Ménard et son épouse, la très active Emmanuelle Ménard, défendent depuis longtemps le principe.
Il n’était pas scandaleux de trouver cette ambition digne d’intérêt même si, du côté des LR, la porte était fermée et, du côté du RN, pas vraiment ouverte au regard de l’opposition manifestée par Marine Le Pen.
Mais le ridicule est au rendez-vous avec un Patrick Buisson se multipliant comme pour retrouver, mais en vain, l’aura que lui avait prêtée Nicolas Sarkozy lors de la campagne de 2007 et durant son mandat, donnant son aval à l’une, à la nièce, puis à l’autre, la tante, dans une stratégie illisible et des espérances de moins en moins fondées (Le Figaro).
Cette désunion des personnes révèle cruellement là où le bât blesse : on discute des publics à atteindre, des citoyens à convaincre, libéraux, couches populaires, conservateurs, comme si, d’une part, une personnalité était évidente, incontestable pour opérer cette conquête multiforme et que, d’autre part et surtout, un projet était à disposition, pensé, neuf, à la fois séduisant et si riche qu’il était susceptible de satisfaire toutes les attentes, de guérir toutes les frustrations, d’apaiser toutes les peurs, de combler toutes les espérances, de répondre à l’ambition profonde d’une démocratie vigoureuse et respectable et au désir d’un pouvoir rendant fier de lui.
Rien n’est donc plus absurde, pour le concept à méditer de l’union des droites, que cette charrue avant les bœufs, cette vente de la peau de l’ours avant l’heure. Une réflexion profonde, sans complaisance et sans tabou, serait d’autant plus nécessaire qu’elle serait de nature à favoriser l’influence et l’emprise d’une droite largement entendue.
Sans tomber dans une vision détaillée qui n’aurait aucun sens face à la merveilleuse ou déplorable inventivité du réel, il conviendrait au moins – et ce ne serait pas une mince affaire – non pas seulement d’élaborer des synthèses classiques, une réunion de contraires indispensables les uns aux autres, mais de les rendre vraiment opératoires dans la conduite politique. Dans l’action, tout démontre dans le passé qu’on a toujours oublié un plateau de la balance malgré la précision théorique des deux.
Une République qui se défend sans se renier, une autorité qui se manifeste et n’offense pas le noyau irremplaçable de la liberté, l’esprit d’entreprise, le service des entreprises mais le souci de l’équité sociale, le refus des insupportables, indécentes inégalités, un pouvoir simple, sans esbroufe mais avec de l’allure, le culte d’une authentique unité nationale avec des droits et des devoirs acceptés parce qu’imposés par des représentants dignes et irréprochables. Un humanisme certes, mais efficient. La France, plus seulement un mot, un hymne mais une langue, une histoire, un capital, un miracle à sauver.
Alors, il est clair que si l’union des droites n’est pas d’abord une union des idées à inventer, elle demeurera lettre morte.
Et la désunion des personnes sera seulement la comédie qui nous laissera croire que quelque chose d’essentiel se joue.