"L'Homme au turban" - Roman canadien

Jack Layton, Sikhs de Toronto et kirpan interdit à l'Assemblée nationale...

2 mai 2011 - NPD - écueil en vue...

Layton ovationné par les Sikhs à Toronto
Paul Journet
_ La Presse le 24 avril 2011

Jack Layton discute avec un partisan lors d'un rassemblement au parc Queen, à Toronto.
: Reuters


(Toronto) Après l'effervescence de son grand rassemblement à Montréal hier, Jack Layton a réussi son rendez-vous avec une foule d'une dizaine de milliers de Sikhs de Toronto cet après-midi, qui l'a applaudi très chaleureusement ce qui ne fut pas le cas pour Michael Ignatieff ou le ministre de l'Immigration, Jason Kenney.
La communauté sikhe s'était rassemblée au parc Queen pour célébrer la journée Khalsa - une fête religieuse qui commémore l'institution officielle de la religion sikhe, en 1699.
M. Layton s'est adressé à la foule après MM. Kenney et Ignatieff. Tous ont répété un petite introduction traditionnelle en punjabi, qui affirme que Khalsa appartient au créateur et que toute victoire appartient à Dieu.
Le chef du NPD est toutefois le seul à avoir été chaudement applaudi. Même la sonorisation fonctionnait mieux pour lui.
Le chef libéral est quant à lui le seul à avoir profité de la tribune pour attaquer l'Assemblée nationale du Québec, qui avait interdit à quatre sikhs de témoigner avec leur kirpan en commission parlementaire cet hiver. Cette décision avait été prise par la direction de sécurité et avait été appuyée unanimement par une motion quelques semaines plus tard.
M. Layton n'a pas parlé du kirpan, mais il a rappelé sa position sur le meurtre de Sikhs en novembre 1984. En juin 2010, le NPD avait appuyé une pétition pour que le qualifie ces meurtres de génocide. «Il ne faut pas seulement reconnaître cela dans un parc, il faut aussi le reconnaître en Chambre», a-t-il rappelé.
M. Ignatieff n'avait pas appuyé cette pétition. Quelques minutes plus tôt, il a été hué à ce sujet par deux femmes.
M. Layton est le seul politicien à avoir profité de sa tribune pour parler de la campagne électorale. «À qui pouvez-vous faire confiance pour vous défendre avec des sujets comme la santé, la justice et le coût de vie?», a-t-il lancé, avant d'être applaudi par l'imposante foule.
Quelques minutes plus tôt, MM. Ignatieff et Kenney se sont contentés de saluer la communauté.
Respect des traditions
Les femmes de l'équipe du NPD portaient un foulard à leur arrivée dans le parc. Chez les journalistes femmes, on leur a demandé pourquoi. «Par respect pour les traditions», leur a-t-on répondu. Les représentantes des médias se sont donc couvertes la tête avec leur propre foulard dès leur entrée dans le parc, situé à plus de 100 mètres des clôtures et de la scène.
Aucune pression n'a toutefois été faite pour qu'elles le portent. Mais, sauf erreur, toutes l'ont porté, du moins au début de l'événement.
Une clôture était dressée derrière la scène. À l'entrée, une organisatrice de la fête distribuait aussi des foulards pour les hommes. Une poignée de journalistes l'ont pris sans toutefois le mettre. L'un d'eux a hésité et demandé pourquoi il devait le mettre. «Il le faut», lui a simplement répondu une personne à l'entrée. Un responsable du NPD lui a assuré qu'il n'était pas obligé de le porter.
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Non au kirpan à l'Assemblée nationale
_ Publié le 18 janvier 2011 à 11h20

Le kirpan est un couteau traditionnel faisant office de symbole religieux pour les Sikhs.
_ : Chris Wattie, Reuters

Tommy Chouinard et Paul Journet
La Presse
(Québec) La direction de la sécurité de l'Assemblée nationale a refusé à des représentants de la World Sikh Organization of Canada (WSO) d'entrer au parlement parce qu'ils ne voulaient pas enlever leur kirpan.
Quatre membres de cette organisation religieuse se sont présentés au parlement vers 9h30. Ces membres provenaient de Montréal, Toronto et Ottawa. Ils se rendaient à une commission parlementaire pour présenter leur position sur le projet de loi 94 portant sur les demandes d'accommodement dans l'administration publique.
Comme tous les visiteurs, ils devaient franchir un dispositif de sécurité. Avant d'être soumis au détecteur de métal, un des quatre sikhs, Balpreet Singh, a avisé le constable spécial que ses collègues et lui portaient un kirpan. On leur a demandé de laisser leurs kirpans en consigne. Les sikhs ont protesté. Un haut responsable de la sécurité est alors intervenu pour rappeler les règles en vigueur au parlement de Québec. Les sikhs ont quitté le parlement, refusant d'enlever leur kirpan.
Le chef de la sécurité de l'Assemblée nationale, Pierre Duchaine, a défendu la décision. «C'est une position qui existe depuis longtemps. Personne ne peut entrer au parlement avec une arme blanche», a-t-il dit à Cyberpresse.
«Ce qui prime, c'est la sécurité. Les questions religieuses passent en second lieu. Pensez-vous qu'un sikh peut prendre l'avion avec un kirpan?»
On avait prévenu les sikhs qu'ils ne pourraient comparaitre en commission parlementaire avec leurs kirpans. Balpreet Singh, un des quatre sikhs renvoyé de l'Assemblée nationale, affirme toutefois que son groupe avait reçu des «informations contradictoires». Il dit avoir communiqué trois fois avec des représentants de l'Assemblée dans les dernières 24 heures. «Hier matin, on nous a dit qu'on nous accommoderait. Plus tard en journée, on nous a dit que ce n'était plus certain. Puis en fin de journée, le secrétaire de la commission, Yannick Vachon, nous a appelés pour dire que finalement, on ne pourrait pas porter le kirpan. Comme les informations nous semblaient contradictoires, nous avons décidé de nous présenter quand même», a-t-il raconté à Cyberpresse.
M. Singh, qui est conseiller juridique de la WSO, soutient que sa position est non négociable: si ses membres ne peuvent porter le kirpan, ils «ne peuvent pas» participer à la commission parlementaire. « Les sikhs doivent porter en tout temps leur kirpan. On le porte même dans notre sommeil. C'est un symbole de notre foi et de notre conviction pour la justice.»
Ironiquement, parce qu'il n'a pas reçu d'accommodement, le groupe sikh n'a pas pu présenter son mémoire sur le projet de loi 94 qui encadre les demandes accommodements.
M. Singh précise que les sikhs interdisent aux femmes de porter le voile. «C'est parce qu'on protège l'égalité des sexes», explique-t-il. Mais il s'oppose tout de même au projet de loi 94, qui interdirait le port du voile intégral dans les institutions publiques. Il estime que la loi violerait la Charte canadienne des droits et libertés «Ce n'est pas acceptable légalement, soutient l'avocat. Et je ne pense pas non plus que ce soit acceptable socialement. Je comprends qu'on demande aux femmes de montrer leur visage pour la sécurité à l'aéroport ou à l'urne pour voter. Mais cette loi va beaucoup trop loin. Elle enlève aux femmes musulmanes le droit de participer à la communauté. Il faut protéger la liberté de religion.»

La ministre ne se prononce pas

La ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, Kathleen Weil, n'a voulu ni appuyer ni condamner la décision des services de sécurité. «Je suis neutre par rapport à ça. (...) Moi, je prends acte de leur décision. Il faut respecter l'indépendance des institutions», a-t-elle affirmé.
Elle semblait surtout craindre que cette affaire nuise à l'image du Québec auprès des minorités religieuses. «Je voudrais envoyer un message à la communauté sikh à l'effet que le Québec est une société ouverte, ouverte à la diversité», a-t-elle dit, soulignant qu'elle analysera leur mémoire sur le projet de loi 94 comme tous les autres qui ont été déposés.
Permis ailleurs
En février dernier, on avait laissé un chef religieux sikh visiter l'Assemblée nationale en possession de son kirpan. Il s'était présenté avec deux kirpans, mais les constables spéciaux lui avaient demandé de conserver seulement son plus petit. Une escorte l'avait accompagné tout au long de sa visite.
La vingtaine de sikhs qui l'accompagnaient n'avaient pas conservé leur kirpan. Ils l'avaient laissé en consigne et l'avaient récupéré à la sortie du parlement. Le groupe du temple Gurbani Sagar avait été invité par le député libéral Gerry Sklavounos.
M. Singh n'était pas au courant de ce précédent.
Il tient toutefois à rappeler que les sikhs peuvent porter leur kirpan à la Cour suprême et au Parlement canadien. «Oui, nous le permettons, car le kirpan est considéré comme un objet religieux », confirme Heather Bradley, directrice des communications au bureau de la présidence de la Chambre des communes.


Le kirpan s'invite à Ottawa
La Presse le 19 janvier 2011 à 17h03


Un kirpan
_ : Archives Reuters


Hugo de Grandpré (Ottawa) Le débat sur le kirpan s'est transporté à Ottawa, mercredi, où le Bloc québécois a proposé de faire comme à l'Assemblée nationale et de bannir le port du couteau religieux au Parlement fédéral.
Mais la proposition a été dénoncée par plusieurs, dont Navdeep Bains, député libéral de religion sikhe qui le porte à la Chambre des communes depuis son élection, il y a presque sept ans.
«Je ne sais même pas quel est le problème, a-t-il dit. Je porte un kirpan à la Chambre des communes depuis 2004. Je suis allé à la Cour suprême, au Congrès des États-Unis... Ça n'a jamais été un problème.»
Selon lui, les partis souverainistes à Ottawa comme à Québec jouent sur les peurs des électeurs et font de la politique de division. «Je suis très déçu», a lancé le député de la grande région de Toronto.
Le débat a été lancé mardi par le refus des gardiens de sécurité de l'Assemblée nationale, à Québec, de laisser entrer des membres du World Sikh Organization avec leur couteau cérémonial. Le groupe de quatre personnes venait témoigner dans le cadre de l'étude du projet de loi sur les demandes d'accommodements dans l'administration publique.
Le gouvernement Charest s'est contenté de prendre acte de la décision, tandis que le Parti québécois l'a applaudie.
Mercredi à Ottawa, le Bloc a repris la balle au bond. «On pense que la règle à l'Assemblée nationale est fondée et qu'il serait important de se doter de règles similaires au Parlement, ce qui n'est pas le cas pour l'instant», a expliqué la députée bloquiste Claude DeBellefeuille.
Mme DeBellefeuille a précisé que sa position reposait sur des considérations d'ordre strictement sécuritaire, désignant le kirpan comme une «arme blanche». Elle souhaite faire inscrire la question à l'ordre du jour, lors de la réunion du comité de la régie interne de la Chambre des communes, à la fin du mois.
Minces chances de réussite
Mais, vu l'intérêt des autres partis, il se pourrait que l'initiative fasse long feu. Au NPD, le député Yvon Godin a déclaré qu'il s'agissait d'une question qui relevait du sergent d'armes, chargé de la sécurité au Parlement. Quant au fait qu'au moins un de ses collègues porte un kirpan à la Chambre des communes, «je n'ai pas de problème avec ça, moi», a-t-il réagi.
«Je suis satisfait de la sécurité au Parlement. Je trouve qu'ils font une bonne job», a ajouté M. Godin.
Un autre député libéral, l'ancien premier ministre de la Colombie-Britannique Ujjal Dosanjh, est allé jusqu'à inviter l'Assemblée nationale à revoir sa position. M. Dosanjh a expliqué qu'il y a plusieurs années, la législature de sa province avait décidé de faire ce qu'il a désigné comme un «accommodement raisonnable» et de permettre aux sikhs de porter leur kirpan en public, «à condition qu'il ne soit pas caché».
Chez les conservateurs, le bureau du premier ministre s'est refusé à tout commentaire et s'est contenté de renvoyer les questions au bureau du sergent d'armes.
Ce débat survient dans un contexte préélectoral à Ottawa et au lendemain du lancement d'une campagne publicitaire dans laquelle le Parti conservateur tente de séduire l'électorat francophone du Québec en se présentant comme le parti des régions.
Par ailleurs, les troupes de Stephen Harper tentent aussi de gagner la faveur des différents groupes ethniques au Canada, composante clé de leur stratégie électorale dans la grande région de Toronto.


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