Le présent message est envoyé également à la plupart des médias du Québec ainsi qu'à bon nombre de députés du Québec, provinciaux et fédéraux.
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Monsieur Desautels,
Radio-Canada n'en est pas à son premier reportage sur l'enseignement de l'anglais au Québec. Vous venez d'en commettre un autre, avec une complaisance invraisemblable à l'égard de l'idéologie fédéraliste et néolibérale de Jean Charest et de ses amis de Westmount. Chaque fois, le manque de rigueur a été désolant. Je vous prierais de prendre connaissance de l'article dont je vous donne l'adresse ci-dessous et de cesser de faire de la propagande libérale en onde. Une radio publique ne doit pas se borner à répéter servilement les opinions des uns et des autres. Vos journalistes doivent aider le public à faire la part des choses.
[http://www.vigile.net/spip/vigile1681.html->1681]
Dans votre reportage, vous laissez sans réplique la comparaison faite par l'une des personnes que vous interrogez entre le bilinguisme des anglophones au Québec, qui sont une minorité, et le bilinguisme des francophones du Québec, qui sont la majorité. Autrement dit, vous la laissez comparer des pommes et des oranges sans remettre aucunement en question ses propos. Voici plutôt ce que vous auriez dû aider vos auditeurs à comprendre:
1) La comparaison doit se faire entre groupes majoritaires, et non entre une minorité et une majorité. Donc, il faut comparer les francophones du Québec aux anglophones du reste du Canada.
2) Les francophones du Québec sont bilingues à 37 %, selon le recensement de 2001, et leur bilinguisme est en forte hausse.
3) Les francophones québécois de 20 à 29 ans sont bilingues à 54 %.
4) Le bilinguisme des francophones au Québec est au moins CINQ fois plus élevé que le bilinguisme des anglophones dans le reste du Canada, qui stagne à 7 %.
5) LE QUÉBEC N'A PAS BESOIN DU TOUT DE S'ANGLICISER OU DE SE BILINGUISER DAVANTAGE.
Le Québec n'étant aucunement en retard sur le plan du bilinguisme, l'État doit faire des choix sensés dans le système d'éducation. Vous êtes-vous demandé pourquoi diable il serait nécessaire que de jeunes enfants parlent anglais? Le bilinguisme des gens qui parlent déjà la langue commune d'une société n'est-il pas une compétence qui doit servir dans la vie adulte? Et pourquoi faudrait-il que ce soit toujours l'anglais à tout prix, et non d'autres langues? Les Québécois garderaient-ils en eux ce vieux réflexe de colonisés qui les empêche de voir qu'il faut se tenir debout et se faire respecter au lieu d'angliciser ses enfants pour qu'ils gobent toujours davantage la culture anglo-saxonne, qui pénètre déjà le Québec par tous ses pores?
L'obésité et l'inactivité physique parmi les jeunes sont un problème beaucoup plus grave que le prétendu manque de bilinguisme. Si vous n'en êtes pas convaincus, parlez-en à vos collègues du magazine radiophonique Les années lumières, qui ont choisi Lyne Mongeau comme scientifique de l'année. Mme Mongeau est une diététiste qui sonne l'alarme au sujet de l'augmentation énorme de l'obésité au Québec, jusque parmi les jeunes enfants. L'avenir de notre système de santé ne sera pas rose si nous laissons la situation se dégrader encore davantage. Quand un politicien comme M. Charest se donne la santé comme principal cheval de bataille, comment se fait-il que le bilinguisme soit une si grande préoccupation pour lui et qu'il ne s'intéresse qu'accessoirement à l'enseignement de l'éducation physique?
Si l'État doit choisir quelle matière enseigner davantage à l'école, l'éducation physique devrait arriver en tête de liste, bien avant l'anglais. M. Charest a augmenté le nombre d'heures maximal que les écoles sont autorisées à consacrer à l'éducation physique, mais contrairement à l'anglais, il ne leur a pas fourni les moyens de tirer parti de cette hausse. Actuellement, nombre d'écoles ne peuvent pas enseigner l'éducation physique autant que leur permet le ministère de l'Éducation à cause du manque de locaux adéquats. Mais pour l'anglais, il n'y a pas de problème. On embauche des spécialistes, et tout va bien!
En somme, les reportages de Radio-Canada sur la question de l'enseignement de l'anglais sont bâclés, ne vont pas au fond des choses et ne permettent pas du tout à la population de comprendre les enjeux véritables. J'ai l'impression que nous sommes en train de reculer de 40 ans, surtout lorsque j'entends des parents francophones dire qu'ils voudraient envoyer leurs enfants à l'école anglaise. C'est du suicide linguistique et culturel collectif. Radio-Canada fait preuve d'une irresponsabilité totale.
J'insiste pour que vous cessiez vos reportages tendancieux, vos entrevues à la sauvette et vos raisonnements tirés par les cheveux élevés au rang de vérité incontestable par des journalistes dépourvus de jugement. Il est temps que Radio-Canada fasse vraiment la lumière sur cette question. Ça fait plusieurs fois que je proteste au sujet de vos reportages sur l'enseignement de l'anglais. Jamais une seule personne à Radio-Canada ne m'a répondu et encore moins demandé mon avis. Pourtant, à titre d'ex-enseignant et d'ex-conseiller pédagogique dans les écoles d'immersion française et au ministère de l'Éducation du Manitoba, où j'ai habité pendant quatorze ans, je pourrais vous en dire long sur l'enseignement des langues.
J'exige une réponse intelligente de votre part et de la part du service d'information de Radio-Canada.
Bernard Desgagné
Gatineau, Québec
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2 commentaires
Archives de Vigile Répondre
28 septembre 2010Pourquoi le Québec ne promouvoit pas une autre langue, comme l'espagnol ou le chinois... surtout à Montréal. L'espagnol est une langue parlée sur un continent au complet et l'une des langues les plus enseignées sur cette Terre avec l'anglais..
Ça suffit pas de dire ' una cerveza por favor' ni même de dire ' I like apples'..
la prochaine génération doit être trilingue pour s'accomoder aux amis Américains et à ses voisins du Sud..
Archives de Vigile Répondre
9 février 2007Monsieur Desgagné,
Nous avons eu droit, tout au long de la semaine dernière, à une autre flagrante et honteuse démonstration de propagande radio-canadienne. Merci de riposter avec rigueur à ce journalisme de bas-étage digne d'une république de bananes.
Rémi Tremblay