L’enjeu référendaire de l’agitation d’étudiants

Tribune libre

L’enjeu référendaire de l’agitation d’étudiants
Lors du décès du regretté René Lévesque, j’ai composé un long poème, qui a été publié dans le journal de la Faculté universitaire où j'étudiais. Il contenait notamment les strophes suivantes :
« Dans tes mains tremblantes prenait souffle et vie
le destin d'un peuple longtemps assoupi
Lorsque tu parlais tes doigts se crispaient
sur nos coeurs épris de lutte et de paix
Dans tes yeux brillaient mille aurores sublimes
derrière l'horizon des promesses ultimes
Et dans tes paroles et dans tes silences
résonnaient notre ire et notre espérance
»
J’ai voté Oui au Référendum de 1995. Je l’ai fait avec émotion et fierté. (Je fais partie du « vote ethnique » que Monsieur Parizeau a cependant stigmatisé, à la fin du Grand Soir manqué… Des propos humainement compréhensibles, mais factuellement, mathématiquement inexacts.)
L’enjeu fondamental de ce qui se déroule aujourd’hui dans des rues de Montréal, ce ne sont pas les prochaines élections législatives, mais le prochain Référendum sur la Souveraineté du Québec.
Et toute cette agitation aura un effet négatif – c’est particulièrement le cas de le dire -, sur ce prochain Référendum.
Les adultes qui soutiennent, qui applaudissent et encouragent même ce brouhaha d’une minorité de jeunes, devraient y réfléchir un petit peu plus, s’ils estiment que ce faisant, ils favoriseraient la souveraineté du Québec. Car c’est tout le contraire qui est en train de se produire.
Que de fois nous avons entendus, ici et là, que les étudiants qui mènent ou qui représentent le mouvement en question seraient, dans tous les sens du terme, l’avenir du Québec.
Or, que représentent, au fond, ces jeunes… ? (La triste énumération qui suit n’est pas exhaustive, mais seulement indicative, hélas.)
- Le non-respect total à l’égard de l’État; Leur soulèvement jusqu’au-boutiste étant dirigé contre les décisions de toutes les composantes de cet État, incluant la majorité parlementaire, le gouvernement issu de celle-ci, et jusqu’aux Tribunaux même.
- La tentative de suprématie brutale de la volonté d’une infime minorité sur la vaste majorité, dans une Société légaliste et démocratique; La représentativité des meneurs du mouvement se limite à un microcosme, une fraction de la Société seulement, et dans un secteur géographique restreint, alors que la légitimité du gouvernement se rapporte à l’intégralité de la population, sur la totalité du territoire du Québec;
- Un mouvement essentiellement mené et dirigé par des Québécois dit « de souche », qui n’auront même pas fait l’effort d’inclure, ne serait-ce que pour la forme, la façade, quelques jeunes citoyens dont les noms seraient un peu plus difficile à prononcer en français, ni même le moindre « anglo» de service;
- La glorification de l’intransigeance auto-detructive, de l’aveuglement idéologique volontaire, de l’extrémisme, de la primauté de l’Irrationnel sur la Raison;
- Le court-circuitage du processus démocratique élémentaire, par voie de militantisme de rue, incluant une certaine apologie – du moins indirecte - de la violence; alors que, contrairement à tant d’autres pays où un tel militantisme est malheureusement indispensable, toutes les revendications de fond de ces étudiants se retrouvent dans les programmes de partis politiques dûment présents et actifs sur l’échiquier politique québécois;
Ce serait donc cela, le Québec de demain… ? Le Québec libre et indépendant ?
Malgré tout cela, je ne voterai pas non au prochain Référendum. Je m’abstiendrai, tout simplement. Par respect pour la mémoire de René Lévesque.
Haytoug Chamlian


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8 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    3 mai 2012

    Monsieur Chamlian
    Deux choses.
    D'abord à propos de ceci, et je vous cite:
    "La glorification de l’intransigeance auto-detructive, de l’aveuglement idéologique volontaire, de l’extrémisme, de la primauté de l’Irrationnel sur la Raison";
    Sans vous insulter, disons que vous faites dans le "superlatif indigné". Une tournure pamphlétaire qui tombe à plat. Intransigeante, autodestructive, extrémiste et irrationnelle la lutte pour une éducation accessible à tous? Pourquoi la gratuité devrait-elle se limiter à l'enseignement collégial et à la formation professionnelle dédiée aux métiers?
    Vous ne faites pas dans l'idéologie, vous? Là où vous voyez une minorité "extrémiste", moi je vois des citoyens qui portent à bout de bras ce qui devrait être un droit démocratique fondamental: l'enseignement gratuit pour tout citoyen, même pour ceux qui sont de droite comme vous. Cette gratuité profitera aussi aux fils et filles d'immigrants dont les parents s'échinent à gagner durement leur vie.
    Le Mexique, les pays nordiques, la France, etc., seraient-ils des bastions de l'irrationalité-extrémiste?
    En second lieu, toute votre analyse ne tient pas la route. Vous dites que le mouvement actuel est l'affaire d'une infime minorité. 200 000 personnes le 22 mars, 40 000 le 7 avril, 250 000 (toutes causes confondues) le 22 avril. Par ailleurs, vous semblez dire que le Québec, dans sa majorité, n'approuve pas la lutte étudiante. Les sondages vous donnent raison. Mais en même temps, vous trouvez le moyen de dire - et ça il faut le faire! - que si c'est ça le Québec indépendant que nous annonce cette minorité agissante qui vous rabat le moral, alors là vous décrochez en nous annonçant tout bonnement que vous allez voter blanc lors d'un prochain référendum. Pourtant, ne dites-vous pas que le Québec, dans sa majorité, ne suit pas les étudiants. Me semble que vous devriez être rassuré, au contraire!
    Et j'aurais pu continuer ainsi pour chacun de vos points d'indignation.
    Un conseil: lisez "L'apologie de Socrate". Ça vous permettra peut-être d'apprendre à vous libérer de vos raisonnements qui sont l'exemple parfait de ce qu'est le sophisme.
    Ras-le-bol de ces gens qui ne jurent que par "l'ordre établi", cet ordre d'une classe dominante qui veut casser à tout prix une pensée démocratique citoyenne qui ose questionner cet "ordre établi".

  • Haytoug-L. Chamlian Répondre

    3 mai 2012

    Il est évident je n'ai parlé aucunement au nom de quelque communauté que ce soit.
    Bien au contraire, en toute franchise, j'ai simplement présenté mon témoignage personnel de quelqu'un qui a immensément admiré un grand pionnier de la souveraineté, en la personne de René Léveque, qui a résolument voté Oui en 1995, et qui, aujourd'hui, a de la difficulté à suivre la même voie.
    Or, vous savez tous fort bien que je suis loin d’être seul dans cette situation.
    Si l’objectif est d’accéder à l’Indépendance en vertu de la démocratie, il faudra – encore une fois – faire l’effort de contrôler certaines tendances au radicalisme et à l’extrémisme.
    Autrement, il n’y aura que le noyau dur, certes permanent et immuable, de la Cause, aux alentours de 30%. Lequel ne pourra pas réaliser l’Indépendance. Pas démocratiquement, en tout cas…
    C'est juste un point de vue.
    Haytoug Chamlian

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mai 2012

    Je ne vois pas en quoi les deux événements sont reliés... (référendum et grève étudiante)! Par ailleurs, les associations étudiantes ont fait les mêmes revendications sous un gouvernement péquiste, il me semble!
    De plus, Remettre en question le statut quo est le fondement même d'une démocratie qui ne fonctionne plus..
    Bravo les étudiants!

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mai 2012

    Je rejette la position de Haytoug Chamlian. C'est une position de droite, qui donne raison à la position néolibérale du gouvernement Charest, faisant de l'éducation universitaire un privilège pour les mieux nantis et un lieu de marchandisation.C'est aussi une positon anti social- démocrate, un courant de pensée dans la communauté arménienne auquel Haytoug se réclame appartenir.
    En tant que membre de la communauté arménienne et UQAMien, je soutiens la position des étudiants en grève. Je considère que ce mouvement exprime un projet de société que les forces néoliberales et capitalistes du Québec tentent de contourner. Ma position est aussi celle du Québec Solidaire, le parti de gauche du Québec.
    Antranig Bedrossian

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mai 2012

    En lisant ce texte, j’ai eu envie de le décortiquer point par point et, finalement, je me suis dit que, compte tenu du nombre élevé de préjugés qu’il contient, ce serait vain, totalement inutile. La réflexion qui m’est venue est simple : comment peut-on, avec les moyens de communications que nous avons aujourd’hui, être si déconnecté de la réalité, si biaisé dans ses jugements. Nous pouvons voir l’effet de la désinformation de masse des médias, papiers, radiophoniques et télévisés. Certaines personnes ne semblent pas se rendre compte que ces médias appartiennent tous à la même classe de profiteurs et se laissent remplir l’esprit comme on remplit une éponge d’eau, sans discernement.
    Ivan Parent

  • Haytoug-L. Chamlian Répondre

    2 mai 2012

    Bonjour,
    Vous n’avez pas affiché mon message en réponse à celui qui a été posté en réaction à mon article.
    Je comprends que vous n’encouragez pas les réponses à des commentaires, et pourtant, c’est ce qu’on appelle bien un débat… Dans la mesure où les règles de conduite sont respectées, cela devrait être la norme, surtout dans une Tribune Libre.
    Par ailleurs, il y a aussi une autre nuance importante : ma réponse au commentaire est celle de l’auteur de l’article visé. J’aurais donc un droit de réplique. Que j’ai exercé d’ailleurs en toute politesse, et en guise d’éclaircissement supplémentaire, comme ajout à mon texte initial.
    Merci de votre attention.
    Voici de nouveau le message que je soumets :
    « Chère Madame Simard,
    Arithmétiquement, le vote québéco-québécois-pure-laine, en faveur du Oui, n’aura jamais dépassé 70%. Au mieux.
    Or, considérant notamment l’écart très serré entre le Oui et le Non lors du Référendum de 1995, s’il y avait eu un petit dépassement même de cette barre de 70% au sein des Québécois de souche, c’était gagné.
    Par ailleurs, dans l’histoire contemporaine du monde, il n’y a pas une seule collectivité qui aura eu la chance et l’occasion – en l’occurrence, deux fois, même – de voter pour son Indépendance, et qui n’aura pas dit Oui dans une proportion minimale de 90%.
    Enfin, les adversaires les plus durs, puissants, déterminés et efficaces de la cause de la souveraineté du Québec, sont tous des Québécois de souche. Ils s’appellent Trudeau, Chrétien, Bourassa, Dion, etc. Et certainement pas Aharonian, Kazantsakis, Rossi, Ahmed, etc. Ni même Malroney, Clark ou Harper…
    Alors, veuillez donc revoir donc un peu tout cela, s’il-vous-plaît. Même si c’est évidemment plus simple et facile de blâmer «les autres»…
    Pour ce qui est de votre amalgame entre le chahutage actuel dans quelques rues de Montréal et le Réveil du peuple québécois, permettez-moi de vous faire remarquer que ce Réveil a amplement eu lieu, et il se reflète dans les résultats des deux Référendums passés. Lesquels, cependant, grâce à la vision des leaders souverainistes concernés, s’inscrivaient dans une logique tout à fait légaliste, dans le respect des institutions en place, des valeurs établies et des Lois.
    En conséquence, ce « soulèvement » relatif n’est pas du tout un signe de réveil, mais plutôt de désespoir.
    Cordialement,
    Haytoug Chamlian »

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mai 2012


    Ne nous fait pas pleurer avec ta petite histoire. Tes entourloupettes ne me trompent pas. N'essaie pas de te faire passer pour un sympathisant à la cause alors que tu n'en es pas un. On connaît la chanson.
    L'Indépendance du Québec est un combat que mènent les Canadiens français qui n'ont pas trouvé leur place dans ce Canada qui se disait le pays de deux peuples fondateurs. Par la charte des droits et libertés, on brime les droits d'un des peuples qui ont bâti ce pays.
    On a fait fi de la volonté des Québécois d'écrire une constitution à leur image. C'est correct, on va s'en écrire une pour nous avec vous ou sans vous monsieur.
    Pour le reste, si ce n'est qu'une déclaration politiquement non correct mais exacte d'un seul homme qui dicte votre conviction et bien elle n'était déjà par très forte.

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mai 2012

    Deux choses: l'examen arithmétique des résultats du référendum de 1995 démontre que le vote anglo-allo a été à 90% pour le Non; c'est difficile à entendre pour certains, mais c'est sans plus cette réalité qu'a exprimé Jacques Parizeau. Ces étudiants québécois qui marchent dans la rue, rejoints à l'occasion par des profs et des représentants d'autres groupes progressistes de diverses tendances, sont en flèche de ce peuple «longtemps assoupi» qui, enfin, commence à bouger. Mais que voulez-vous, il y en a toujours qui préfèreront les gouvernements canadians, celui des Harper et des Trudeau ou bientôt de Mulcair, peut-être. Et leur équivalent totalitaire, «au provincial» comme ils disent, celui de Charest par exemple.