Isaac et Ismaël dans l'isoloir

Israël, Maghreb et Québec Souverain

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Tribune libre

"Entrez hardiment parmi les Québécois ! Les Québécois ne se défendront
pas et seront vaincus..." - Jeanne de Westmount (Vigile)
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Étrange qu'un site œuvrant de façon si honorable à défendre les intérêts du Québec puisse s'écarter autant de la cause et se disperser dans une myriade de débats arabes qui n'ont aucune influence sur la question. Le site est d'ailleurs régulièrement accaparé par des voix Maghrébines davantage intéressées à discuter des politiques de leur région d'origine que du futur de leur pays d'accueil.

Le concitoyen Arabe typique vote pourtant fidèlement pour les partis fédéralistes et, par peur ignare de perdre ses acquis d'immigrant, s'oppose à l'indépendance politique du Québec. Pourquoi alors donner autant de poids à ses causes dans un site souverainiste?

Le débat sur Israël est d’ailleurs amené à empiéter étrangement sur le débat souverainiste pour y prendre une place démesurée difficilement justifiable.

Mieux vaut pourtant se méfier d'une tendance anti-israélienne aveugle et gratuite. Le Québec accueille un nombre important de Maghrébins dont certains ne peuvent que prendre plaisir à créer un fossé entre Américains et Québécois sur la question d'Israël. Ce fossé est malsain et sert le fédéralisme. Québécois et Américain sont de vieux et bons voisins. Ils partagent le même bout de continent depuis maintenant 400 ans et plusieurs familles québécoises ont des liens historiques très serrés avec l'Amérique.

Ignorant ces liens profonds, plusieurs nouveaux venus Magrébins cultivent et renforcent l'anti-américanisme chez leur hôte aux dépens de cette fraternité naturelle. Par association, plusieurs tentent ensuite d'étendre cet anti-américanisme à la question d'Israël.

En réalité, le Québec a beaucoup plus en commun avec Israël qu'on ne le laisse croire, beaucoup plus même qu'avec le pays Arabe type.

Tout comme le Québec cherche à préserver son identité et sa culture distincte face à une monoculture beaucoup plus omniprésente qu'elle, Israël cherche à en faire autant. Tous deux sont cernés par des cultures 40 fois supérieure démographiquement. Israël c'est 7.7 millions de rares Israéliens face à 360 millions d'arabophones. Le Québec c'est 7.9 millions de rares Québécois face à 325 millions d'anglophones.

Israël est née du rêve d'un peuple sans terre d'avoir son propre pays, tout comme la souveraineté du Québec vise donner un pays à un peuple. Deux peuples minoritaires sur leur continent, dispersés, assimilés, divisés, sans terre, cherchant à assurer leur survie et s'affirmer.

En plus d'afficher des populations presque identiques, le Québec et Israël ont tous deux une minorité liée à une majorité hors frontière. Le Québec possède également une composante d'héritage juif centenaire qui lui est propre et qui, comme à New York, fait maintenant partie de l’identité unique de sa métropole. Le bagel au miel, le smoked meat, artistes et hommes d’affaires reconnus nées et impliqués ici, le vote souverainiste des juifs de Boisbriand en 95, les couleurs identiques du fleur-de-lysée et du drapeau de l'étoile de David, etc, des liens peuvent être faits à plusieurs niveaux.

Le sort injuste livré aux Palestiniens n'annule aucunement ces points en commun. Une association gratuite est souvent établie entre Palestinien et Québécois et ensuite mise en opposition avec Canadian et Israélien. Le lien inverse est pourtant tout aussi valable, sinon plus. Le pauvre Palestinien peut tout aussi bien être comparé au «pauvre» anglophone du Québec, un minoritaire majoritaire ; le Canada anglais et le reste de l'Amérique du Nord anglophone peuvent être comparés au monde Arabe, criant à la persécution tout en formant une majorité écrasante totalement à l'abris démographiquement.

Concrètement, comparer colonisation juive à intrusion canadienne anglaise est un lien qui ne sert aucunement la cause souverainiste. Même s'il existait un vote Palestinien significatif ici, il est très peu probable que cette sympathie se traduise par un appui de cette communauté à la souveraineté. D'ailleurs, ce type de comparaison peut aussi s'établir à sens inverse. La reconquête démographique francophone de l'Estrie, des villes de Montréal et de Québec, qui ont momentanément été majoritairement anglophones, peut selon cette même logique enfantine, être comparée à la reprise de possession du peuple juif de sa terre d'origine.

Si une véritable comparaison entre le sort du Québec et celui d'un peuple étranger doit être fait, il gagne à se faire avec un peuple en position de minorité culturelle démographique majeure sur son continent. Tibétains, Premières Nations, Irlandais du 20ième siècle, etc, tous des exemples plus appropriés que Arabes et Palestiniens. Car tout comme la culture anglo-saxonne ou chinoise Han, la culture arabe est une monoculture dominante qui tend à étouffer les cultures moins populeuses qui la côtoient.

La culture Israélienne peut être ou paraître écrasante vue de près, mais pris dans son ensemble, sa démographie se révèle fragile et minoritaire face à une culture arabe beaucoup plus massive et dominante. Si un parallèle doit être fait avec la culture intrusive canadienne anglaise, il est donc plus logique et plausible d'en établir un avec la culture Arabe que Israélienne.

Peu importe les comparatifs faits, les bénéfices en votes concrets pour la souveraineté restent insignifiants. Alors pourquoi faire ces comparatifs maladroits qui ne peuvent qu'apporter mauvaise presse et nouveaux adversaires hypersensibles?

Le comité Canada-Israël et le Congrès Juif Canadien ne sont que des groupes d'intérêts parmi d'autres. Leur crime, c'est d'abord et avant tout le fédéralisme et l'obstruction à l'indépendance, et non quelconque action faite par Israël à mille lieux d'ici qui n'a aucun impacte sur la cause souverainiste.

En soi, ces groupes d'intérêts ne jettent ni les bases d'un vote juif exclusivement fédéraliste, ni les bases d'un Canada anti-arabe. Le Canada accueille des quantités massives d'immigrants musulmans et très peu d'immigrants juifs. À long terme donc, le Canada sera amené à répondre d'abord aux intérêts arabes, quelque soit l'influence passagère de groupes d'intérêt juifs. Plus le poids démographique d'un groupe est important, plus les groupes d'intérêt qui la représentent ont de l'influence. L'émission Canadian anglaise «Little Mosque on the Prairie» annonce d'ailleurs la tendance.

L'allégeance au fédéralisme chez les concitoyens arabes du Québec ne pourra qu'en être renforcé. D'ailleurs, la philosophie de multiculturalisme du Canada anglais est beaucoup plus séduisante à ces citoyens que l'attachement à quelconque romance fictive de combat commun entre Québécois et Palestiniens.

Il n'est donc guère surprenant qu'une écrasante majorité de concitoyens musulmans hostiles à Israël s'affichent tout aussi hostile aux partis souverainistes du Québec une fois dans l'isoloir électoral. Les récentes sorties publiques de personnalités musulmanes en faveur du NPD centralisateur et multiculturaliste aux détriment du Bloc ne font que révéler leur réelle préoccupation première.

Prétendre qu'il existe une fusion d'esprit particulière Canada-Israël et qu'elle fait front commun à la fois contre Palestiniens et Québécois est digne d'exagération naïve. En fait, on ne sait plus qui se sert de qui et la démagogie finit par se mêler à l'hypocrisie. Le concitoyen arabe type cherche à rallier la sympathie du souverainiste tout en votant pour un parti fédéraliste qui s'oppose farouchement à cette cause. Le concitoyen juif type appuiera le même parti pour contrer le souverainiste tout en appuyant un pays née du même désir d'indépendance, Israël.

Plutôt que déployer une fixation sur Canada-Israël, le souverainiste gagne à développer un comité Québec-Israël pour y faire compétition et créer des ponts avec la cause. La branche québécoise du Congrès Juif Canadien gagne à déclarer son indépendance et cultiver des liens plus serrés avec le mouvement souverainiste. Plutôt que de laisser leur maison-mère Canadienne anglaise les positionner contre la cause, ils gagnent à s'investir et s'identifier pleinement à la création d'un nouvel Israël propre à tous, le Québec.

Une stratégie souverainiste intelligente cherchera à profiter des fibres identitaires des deux camps à la fois. D'une main, il cherchera à souligner le parallèle entre le rêve de la création d'un pays Hébreu et celui d'un nouveau pays pour le Québec. De l'autre, il soulignera le parallèle entre mouvements anticoloniaux arabes et la cause souverainiste.

Il est nuisible et contre-productif à la cause souverainiste de peindre le mouvement d'allégeances controversées qui ne lui apportent aucun vote concret.

Un concitoyen Maghrébin qui vote contre la souveraineté n'apporte rien de plus qu'un concitoyen Juif qui vote contre lui aussi. Un Maghrébin séduit par le parallèle entre Québécois et Palestiniens en vaut autant qu'un Juif séduit par le parallèle entre Québec et Israël.

Si le souverainiste préfère s'aventurer en dehors de la neutralité, qu'il le fasse équitablement et cherche au moins à rallier les deux antagonistes à la cause, plutôt qu'un seul de façon contreproductive et myope.

Un mouvement souverainiste sage saura rester neutre face aux conflits internationaux sensibles. L'adversaire est suffisamment puissant pour éviter de lui donner des munitions additionnelles. Lorsque l'indépendance sera atteinte, alors libre au partisan de briser cette neutralité.

Louis Charlebois
_ Auteur


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6 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    27 avril 2011

    Cette comparaison est frauduleuse et méprisante !
    Soyons clairs ! Le régime sioniste construit Israël sur des terres volées par de prétendus élus de Yahvé qui continuent la tuerie et le racisme en Palestine occupée depuis plus de soixante ans. Le Québec se construit librement et démocratiquement dans la paix et l'harmonie. Israël se construit dans le sang des Palestiniens.
    N'oublions pas que le vote démocratique de Gaza a été agressivement rejeté par le régime sioniste d'Israël. Donc, monsieur, je vous prie de ne pas comparer le Québec avec Israël. C'est insultant et dénigrant pour ceux et celles qui aiment vivre en paix au Québec.

  • Archives de Vigile Répondre

    27 avril 2011

    À vouloir sauver le chou et la chèvre, vous oser comparer Israël et le Québec. C’est invraisemblable et c’est méconnaître l’histoire de ces deux pays. C’est de la démagogie et de la désinformation. Et, aujourd’hui, les civils de Gaza, qui les protègent?
    Marius MORIN

  • Archives de Vigile Répondre

    27 avril 2011

    à Louis Charlebois
    Simplement pour vous informer que je vous ai lu et que je réfléchis. Vous me faites réfléchir.
    J'ai comparé le mépris de certains juifs canadiens (mépris qui existe) par rapport à notre projet indépendantiste au mépris de certains Israéliens (mépris qui existe) par rapport aux revendications palestiniennes. Cette comparaison me paraît encore juste et basée sur la réalité.
    Vous apportez un autre point de vue qui est digne d'intérêt.
    Vous écrivez:
    "Une stratégie souverainiste intelligente cherchera (...) à souligner le parallèle entre le rêve de la création d’un pays Hébreu et celui d’un nouveau pays pour le Québec."
    Je vous rappelle que l'historien Lionel Groulx et l'homme politique Yves Michaud donnent en exemple à imiter aux Québécois, la ténacité, la persévérance et la pugnacité des Israéliens qui ont créé leur pays, l'Etat d'Israël. Yves Michaud s'en est servi pour dire que les Juifs de Montréal qui applaudissent devant l'Etat d'Israêl devraient comprendre les aspirations québécoises à l'indépendance politique. Et le fait qu'ils votent massivement NON est, pour lui (et pour moi), une cause de déception. C'est une déception politique. Il n'y a absolument pas de racisme ou d'antisémitisme là-dedans.
    robert barberis-gervais, 27 avril 2011

  • Archives de Vigile Répondre

    27 avril 2011

    Abdel Kader Rahli est au Québec depuis 5 ans. Il écrit le français à la perfection. Comme il a obtenu sa citoyenneté il va voter pour la première fois.
    Pour qui il va voter ?
    Harper ? Non, il est trop près des Américains (les Arabes détestent les Américains, vouent une haine incroyable à un peuple qu’ils connaissent somme toute si peu)
    Ignacieff ? Non c’est le parti des commandites (étonnant parce que le scandale est antérieur à son arrivée).
    Duceppe ? Non stratégie trop défensive. Puis « j’ai fait le choix d’immigrer au... Canada. » Tien toé !
    Alors il va voter pour le bon Jack. Pourquoi ? « M. Layton est rassurant dans ses promesses »
    http://www.cyberpresse.ca/opinions/...

  • Archives de Vigile Répondre

    27 avril 2011

    Point de vue intéressant, mais vous omettez une dimension fort importante concernant les peuples Maghrébins. Pour des raisons historiques et géopolitiques, le pouvoir mafieux de tous ses dictateurs des pays arabes est lié au même pouvoir mafieux sicilien qui en l’occurrence a infiltré les instances gouvernementales québécoises et canadiennes. Ils ont leur cause bien à eux et il semble qu’ils ont un grand besoin d’argent pour financer cette cause. Les fédéralistes ont depuis longtemps compris qu’il pouvait utiliser le pouvoir mafieux comme un bras obscur contre le mouvement indépendantiste. Est-ce les mafieux qui ont offert leurs services ou les fédéralistes qui les ont requis? L’histoire nous le dira. Si la lutte des peuples maghrébins passe par l’abolition du pouvoir mafieux, celle des Québécois passe par l’abolition du bras obscur. Voilà en quoi ces deux luttes se rejoignent, il s’agit en fait d’un passage pratiquement obligatoire.
    En ce qui concerne le vote fédéraliste des Maghrébins du Québec, il est fort probable qu’il soit conditionné par l’influence efficace des sbires de ces dictateurs (http://www.vigile.net/Exigeons-l-expulsion-de-la-famille) et du fameux serment. Encore une fois, commençons par briser le bras obscur, après nous découvrirons des Maghrébins plus ouverts qu’on ne le croyait. Je conclue simplement qu’il faut comprendre que la cause ou encore la « cosa » de ces individus n’est pas la nôtre.
    Nosco

  • Archives de Vigile Répondre

    27 avril 2011

    Sujet délicat, mais vous avez tout à fait raison. Dans l'isoloir, ils voteront pour leurs propres intérêts comme tous les électeurs.
    Les Québécois n'ont pas à prendre partie pour les descendants d'Isaac ou d'Ismaël. D'ailleurs, ne devraient-ils pas laisser leur luttes ancestrales à la porte de leur pays d'accueil ?