Harel à la mairie?

Cet unilinguisme désuet donnerait une mauvaise image de Montréal et travestirait sa réalité de métropole moderne, bilingue et multiculturelle.

C't'ivident...



Bonne nouvelle, oui, que la candidature de Louise Harel à la mairie de Montréal. Parce que cela va mettre de la vie sur la scène municipale, et parce que d'autres personnalités intéressantes pourraient avoir envie de l'imiter. À tout le moins, cette candidature pourrait avoir l'effet d'un salutaire coup de fouet sur le maire Tremblay, et le faire sortir de sa léthargie.
Mais Mme Harel serait-elle le maire dont Montréal a besoin? Malheureusement pas.
Le problème n'est pas qu'elle soit souverainiste, encore que la résurgence des divisions référendaires soit bien la dernière chose dont la métropole ait besoin. Si Mme Harel était aussi discrètement souverainiste que M. Tremblay est fédéraliste, il n'y aurait pas de problème. Mais voilà, Mme Harel est une «pure et dure».

Avec le temps, l'ancienne radicale qui donnait des cauchemars à René Lévesque a certes modéré ses positions, mais elle est restée fidèle à la mentalité qui prévalait dans la gauche indépendantiste des années 60-70, une mentalité qui voyait «les Anglais» comme des «Rhodésiens» - des colonisateurs, exploiteurs du peuple francophone... Lors de l'acrimonieux débat des fusions, en 2001, elle n'a pu s'empêcher d'exprimer sa hargne envers Westmount, une «ville ethnique» qui s'accroche à son «caractère anglo-britannique, vieux relent de colonialisme». C'est une vision archaïque, qui laisse croire que Louise Harel connaît très mal la moitié ouest de Montréal et n'a aucune sensibilité envers les minorités.
Certes, elle dira qu'elle s'est longuement intéressée aux «communautés culturelles». Je n'en doute pas. Mme Harel est une travailleuse sociale dans l'âme: elle fera tout pour aider les immigrants démunis à améliorer leur sort et à devenir de bons Québécois, si possible souverainistes; elle aura sans doute un faible pour les communautés spontanément ouvertes au message souverainiste de gauche, comme les Chiliens, les Palestiniens, etc. Mais on ne parle pas de la même chose. Les grandes minorités qui ont bâti Montréal - les Montréalais d'origine britannique, grecque ou italienne, les Juifs ashkénazes, etc. - ne sont pas des immigrants. Ce sont des gens qui font partie intégrante du tissu historique de la métropole. Or, je ne crois pas que Louise Harel ait noué beaucoup de contacts dans ces milieux-là, ni qu'elle soit particulièrement réceptive à leurs inquiétudes ou à leurs aspirations. Si elle l'était, elle aurait procédé avec davantage de tact dans le dossier des fusions.
En indépendantiste passionnée, unilingue de surcroît, elle a plutôt vu ces minorités - qui sont fédéralistes à quelques exceptions près - comme des adversaires. Elle n'a aucune crédibilité quand elle se présente comme la candidate désireuse d'«unifier» les Montréalais.
Autre problème majeur, cette femme intelligente qui a des diplômes en socio et en droit n'a jamais réussi à apprendre convenablement l'anglais - une anomalie qui ne peut tenir qu'à une forme de blocage psychologique. C'est un handicap qu'elle partage avec Pauline Marois, mais dans le cas de la mairie de Montréal, l'unilinguisme est un obstacle rédhibitoire. Non seulement parce que ce serait une insulte caractérisée envers les 40% de Montréalais qui ne sont pas de langue maternelle française, mais aussi parce que les francophones, eux aussi, ont intérêt à avoir un maire capable de représenter la ville en dehors du Québec et de parler la langue internationale.
Si elle devait aller à Boston ou en Chine, elle devrait être flanquée d'un interprète ou laisser parler Benoit Labonté à sa place! Cet unilinguisme désuet donnerait une mauvaise image de Montréal et travestirait sa réalité de métropole moderne, bilingue et multiculturelle. Le maire de Lyon ou de Rimouski peut bien être unilingue, mais pas celui d'une grande ville nord-américaine.


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