Polémia continue son tour d’Europe du Grand Remplacement. Après avoir étudié l’emblématique cas de la Suède puis l’inquiétante submersion démographique de la Belgique, l’espoir d’une réaction politique au Danemark et enfin le désastre multiculturel britannique… c’est au tour de l’Allemagne d’être étudiée par Paul Tormenen. La situation y est – comme partout en Europe de l’Ouest – désastreuse.
Polémia
Si l’Allemagne a connu plusieurs vagues migratoires au cours son histoire récente, la crise de 2015 est inédite dans la transformation du pays qu’elle entraîne. La décision de la chancelière Angela Merkel d’ouvrir les frontières aux migrants du Proche-Orient et d’Afrique est, encore maintenant, lourde de conséquences, y compris en France. En réaction, une prise de conscience populaire et politique est en train d’émerger.
Des mouvements migratoires importants
L’immigration de travail a commencé à être organisée de façon significative par le gouvernement allemand à partir des années 1950. En recherche de main-d’œuvre, l’industrie a recruté des Turcs, des Italiens, des Portugais, des Grecs et des Yougoslaves. En 1966, le regroupement familial a été autorisé(1). En 1973, l’Allemagne de l’Ouest comptait près de 2,6 millions d’étrangers. Dans les années 1980, suite à la chute du mur de Berlin, ce sont près de 3 millions d’allemands de l’est qui se sont installés à l’ouest.
Le tournant de 2015
Mais c’est surtout ladite « crise des migrants » qui a, dans l’histoire récente, le plus changé la physionomie de la population allemande. Une crise que l’on peut aussi qualifier de crise politique due à une absence de volonté de maîtrise des frontières.
En août 2015, les autorités allemandes ont annoncé être prêtes à accueillir 800 000 demandeurs d’asile dans l’année (2). Le 2 septembre, la photo d’un enfant syrien mort noyé, Aylan, est publiée dans les médias. L’objectif est à peine caché : faire accepter aux européens les mouvements de populations extra-européennes parmi les plus colossaux de l’histoire (3). La frontière avec l’Autriche est ouverte sans aucun contrôle. Des centaines de milliers d’étrangers la franchissent. Le 13 septembre, dépassé par le flux migratoire qu’il a suscité, le gouvernement allemand décide de fermer temporairement sa frontière avec l’Autriche. Si l’accroissement de l’immigration vers l’Allemagne a commencé de façon significative en 2008, l’année 2015 marque un niveau inégalé (4).
En termes de nombre d’arrivées d’immigrants, les chiffres sont impressionnants: 884 000 en 2014, 1,5 million en 2015, 1 million en 2016, 917 000 en 2017 (5).
En avril 2018, l’Office fédéral allemand de la statistique présentait les derniers chiffres collectés (6) : sur les 82 millions d’habitants en Allemagne, 1 sur 8 est étranger. Sur les 13 millions d’habitants nés à l’étranger, 7,7 millions viennent d’un pays non européen (7).
Plusieurs indicateurs témoignent de la transformation de la population :
- 42 % des enfants de moins de 6 ans seraient issus de l’immigration en Allemagne de l’Ouest, selon des statistiques officielles (8)
- 1 enfant sur quatre né en 2016 a au moins un parent étranger,
- Dans certaines grandes villes, les écoles primaires ont des élèves qui en majorité maîtrisent peu ou pas du tout l’allemand : Berlin à 43 %, Brème à 41 %, Hambourg à 22 % (9),
- Le nombre de musulmans dans le pays est estimé entre 4,4 et 6,2 millions (10).
Les migrants, des médecins et des ingénieurs syriens ?
Au plus fort de la crise des migrants, un intense battage médiatique a voulu nous convaincre que les migrants récemment arrivés en Allemagne et plus largement en Europe étaient diplômés et qualifiés (11). Or, les caractéristiques de l’accueil des migrants « organisé » en 2015 par la chancelière Merkel -précipité, indifférencié et massif – ont eu plusieurs conséquences.
Alors que l’ouverture des frontières était censé répondre à une situation d’urgence (guerre en Syrie), et plus certainement à un besoin de main-d’œuvre de l’économie allemande, beaucoup d’étrangers en ont profité pour s’introduire dans le pays et ont invoqué l’absence de pièce d’identité (12). C’est ainsi qu’en juillet 2018, l’Allemagne dénombrait 200 000 demandeurs d’asile nés… un premier janvier (13).
L’absence de contrôle préalable d’identité a permis à toute une population interlope d’entrer dans le pays :
- Près de 5 000 criminels de guerre se seraient joints au flux de migrants gagnant l’Allemagne(14).
- Le nombre d’islamistes et de salafistes présents dans le pays aurait été multiplié par trois à l’occasion de la « crise des migrants » (15).
- Selon le journal Deutschland Kurier (16) qui se base sur un rapport gouvernemental (17), 1 crime violent sur 10 aurait été commis par un migrant en 2018. Dans l’année, les étrangers sont suspectés dans 102 000 actes criminels, un chiffre en augmentation de 7 % par rapport à 2017.
Signe d’un sentiment croissant d’insécurité : l’augmentation de 140 % du nombre de permis de ports d’armes délivrés entre 2014 et 2018 (18).
Après une longue période de déni, la chancelière Angela Merkel a reconnu en juillet 2018 l’existence de « no go zones », ces quartiers de non droit dans un contexte d’augmentation de la criminalité (19). Ralph Gadbahn, un chercheur né au Liban spécialisé dans les migrations, décrit dans un récent livre la formation de clans ethniques facilitée par le regroupement familial (20). Il met par ailleurs en garde contre le recrutement croissant de réfugiés par des clans mafieux d’origine libanaise, une évolution qui inquiéterait les autorités(21).
Les migrants présentés comme qualifiés se sont révélés beaucoup moins employables que ne l’attendait le patronat allemand : en juin 2018, seul 26 % des migrants arrivés en 2015 avaient un travail. Alors que le chômage baisse depuis 2015, la part des réfugiés parmi les demandeurs d’emploi a doublé dans la période (22). Une étude publiée début 2019 par l’Institut allemand de recherche sur l’emploi aboutit au constat que la plupart des réfugiés en Allemagne ne sont pas intégrés dans le marché du travail et n’ont pas une bonne maîtrise de l’allemand (23).
L’appel d’air suscité par la chancelière Merkel s’est révélé particulièrement coûteux. Parmi les différentes dépenses qui lui sont liés, l’Allemagne a consacré pour la seule année 2018 23 milliards d’euros à l’intégration et à la prévention de l’immigration (24).
La transformation de la société allemande
Alors que le gouvernement allemand a ignoré la culture des nouveaux arrivants, c’est par les tribunaux qu’elle s’est rappelée à ses bons souvenirs :
- La Cour suprême fédérale a jugé inconstitutionnelle la non reconnaissance d’un mariage à l’étranger d’un majeur avec un enfant de moins de 16 ans (25). Une décision qui bat en brèche une loi adoptée en 2017 visant à lutter contre le mariage d’enfants.
- Le tribunal administratif de Leipzig a estimé dans un jugement rendu en 2018 que la polygamie n’était pas un obstacle à la naturalisation d’un étranger (26).
- Le port du burkini par une lycéenne a été autorisé par le tribunal administratif fédéral afin de satisfaire à l’obligation de participer à des cours de natation organisés par un établissement scolaire (27).
Ces actions juridiques s’inscrivent dans un contexte plus général de ré-islamisation et d’accroissement démographique de la population musulmane dans le pays (28). Ceci alors que la population allemande de souche est en « décroissance » démographique et en voie de sécularisation.
Parmi les mosquées en Allemagne, dont le nombre est croissant, certaines sont des foyers de radicalisation financés par les pétromonarchies du golfe. C’est parfois dès leur arrivée en Allemagne que des migrants se font approcher par les milieux salafistes (29).
La situation semble parfois tout simplement échapper aux règles en vigueur en Allemagne : une enquête menée en 2016 par la quotidien Bild aboutissait au constat que « des pans entiers du territoire allemand sont régis par la loi islamique » (30).
Une tentative de réveil
En réaction aux arrivées massives de migrants, un mouvement, Pegida (Européens patriotes contre l’islamisation de l’occident) a émergé vers les années 2015, dans un premier temps dans le land de Saxe. Bien que caricaturé par l’immense majorité des médias, un universitaire constatait en 2018 à la lecture des statuts du mouvement « l’adéquation de la quasi-totalité des revendications formulées (par Pegida NDLR) avec les valeurs de la société allemande » (31). Plusieurs manifestations rassemblant des milliers de personnes ont été organisées de 2014 à 2016 dans le pays, afin de dénoncer la politique migratoire de la chancelière Merkel.
Fin 2015, à Cologne, de nombreuses agressions sexuelles de jeunes allemandes ont été commises par des migrants à l’occasion du passage au nouvel an. Ces faits ont choqué une partie de la société allemande. Un choc qui s’est renouvelé à plusieurs reprises en 2018 : une série de faits divers (agressions, viols) impliquant des migrants a relancé des manifestations dans le pays, au cours desquelles la violence et l’immigration massive étaient une nouvelle fois dénoncées (32).
Le malaise perceptible dans une partie de la société allemande a trouvé un débouché politique avec le parti Alternativ fur Deutschland (Afd). Peu de temps après sa création, l’Afd a obtenu des scores significatifs aux différentes élections, avec pour programme notamment la fermeture des frontières et un arrêt de l’immigration massive (33). C’est sans nul doute en partie en raison de cette montée du parti populiste et du raidissement du parti bavarois CSU que la chancelière Merkel a été contrainte d’amender sérieusement sa politique migratoire.
Une réaction tardive
Le gouvernement allemand a pris tardivement plusieurs mesures visant à calmer la révolte populaire et à freiner l’ascension des partis populistes, essentiellement l’Afd. On peut notamment citer :
- le renforcement du contrôle aux frontières, en particulier en Bavière (34),
- le refoulement des demandeurs d’asile déjà enregistrés dans un autre pays européen,
- l’établissement de quotas pour le regroupement familial (35) et le nombre de bénéficiaires d’une protection humanitaire (36),
- l’élargissement de la liste des pays dits « sûrs » (Maghreb, etc.), mesure permettant de refuser spontanément les demandes d’asile des ressortissants de ces pays et d’accélérer les éloignements (37),
- la facilitation des expulsions (38),
- la création de centres d’attente pour demandeurs d’asile.
Les effets de ces mesures se font sentir en France : les déboutés du droit d’asile en Allemagne y arrivent en masse (39). Il est vrai que la « mise à l’abri » des migrants a été érigée comme une priorité par le Président Macron et que, contrairement à l’Allemagne, pratiquement aucune mesure de réduction des flux migratoires n’a été prise récemment (40).
En ouvrant aveuglement les frontières en 2015, la chancelière Merkel a ouvert la boite de Pandore. Si une prise de conscience semble apparaître, elle est tardive et probablement pas à la hauteur des enjeux. C’est toute une conception de l’immigration adoptée dans les années 70 (pays d’origine des migrants, etc.) et amplifiée en 2015 qui est remise en cause par ses opposants. Pour le moment, le rapport de force électoral permet à son parti de se maintenir au pouvoir. L’avenir nous dira pour combien de temps.
Paul Tormenen
02/07/2019
(1) « L’Allemagne, un pays d’immigrés ». Thomas Petersen. Regards sur l’économie allemande. 2015.
(2) « Migrants, ce que cache la générosité d’Angela Merkel ». L’Express. 8 septembre 2015
(3) « Le Monde, les photos et l’invasion migratoire ». Observatoire du journalisme. 7 septembre 2015.
(4) « Allemagne, géopolitique des migrations, les cinq actes de la tragédie de la chancelière Merkel ». G.F. Dumont. Diploweb. 16 décembre 2018.
(5) « Immigration by age, group, sex and citizenship » Eurostat. 16 avril 2019.
(6) « Number of migrants hits record high ». Reuters. 12 avril 2018.
(7) « Foreignborn population by country of birth ». Eurostat. 1er janvier 2018.
(8) « Deutschland gewinnsowieleeinwohneruber migration wiedurchgeburten ». Welt. 15 octobre 2010.
(9) « Germany and immigration, the changing face of the country ».Der spiegel. 19 avril 2018.
(10) « L’Allemagne songe à introduire une taxe « mosquées ». C News. 27 décembre 2018. « L’avenir démographique musulman de l’Allemagne ». Gatestone institute. 10 février 2017.
(11) « De l’opposant politique à l’ingénieur, le profil des réfugiés syriens évolue ». Le Monde. 25 septembre 2015.
(12) « La vérification de l’identité des réfugiés, un casse-tête pour l’Allemagne ». Les Echos. 19 novembre 2015.
(13) « Mehrals 200 000 asyberwerber mit geburtsdatum 1. Januar ». Berliner Zeitung. 19 septembre 2018.
(14) « Skandalummoglichkriegs-verbrecherumfluchlingen ». Bild. 7 mars 2019.
(15) « Die fehler von 2015, werdentaglichwiederhomt » Bild. 16 février 2019.
(16) « Gewalt vonzuwanderern gegen deutsche nimmtdrastichzu ». DeutschlandKurier. 10 avril 2019.
(17) « Bundeslagebild kriminalitatim kontext von zuwanderung 2017 ». Bundeskriminalamt. 8 mai 2018.
(18) « Germany : basic weapon licenses more than double ». Deutsche Welle. 7 décembre 2018.
(19) « Merkel finit par admettre l’existence de no go zones ». RT. Juillet 2018.
(20) « Die clans betrachtent die gesellschaftalsbeutegesellschaft ». Cicero. 5 octobre 2018.
(21) « Des clans mafieux recrutant des réfugiés inquiètent Berlin ». Challenges. 18 décembre 2018.
(22) « Allemagne : des emplois pour les migrants ». France 2. 25 juin 2018.
(23) « 65 prozent der fluchlingenochohne job ». NTV. 25 janvier 2019.
(24) « Germany spends record 23 billion euros on refugees ». Reuters. 20 mai 2019.
(25) « Sind kinderehen in Deutschlandbalderlaubt ». Tag 24. 16 février 2018.
(26) « Zweitehekeinhindrnis fur einburgerung ». Jungefreiheit. 30 mai 2018.
(27) « Kein Ansprucheinermuslimischen Schülerinauf Befreiung vom koedukativen schwimmiunterricht ». Ministère de la justice allemand. 11 septembre 2013.
(28) « Immigration, intégration, l’Allemagne sur la voie de la modernité ». Allemagne d’aujourd’hui. 2014.
(29) « L’Allemagne veut s’attaquer au financement des mosquées et à la radicalisation ». RFI. 28 décembre 2018.
(30) « Mitten in Deutschland herrschtislamischesrecht ». Bild. 23 novembre 2016.
(31) « Pegida : émergence, sens et influence d’un mouvement identitaire transnational dans l’espace public allemand ». Revue d’Allemagne. 2018.
(32) « Manifestations contre la politique migratoire en Allemagne, une couverture médiatique a minima en France et en Angleterre ». Observatoire du journalisme. 16 avril 2018.
(33) « Partis politiques allemands représentés à la diète fédérale ». La Documentation française. 14 décembre 2018.
(34) « Allemagne, les migrants ne sont plus autant les bienvenus ». Euronews. Juillet 2016.
(35) « Allemagne : des quotas pour le regroupement familial ». Arte. 1er aout 2018.
(36) « Allemagne : vers de nouvelles mesures pour réguler l’immigration légale ». Infomigrants. 13 octobre 2017.
(37 « Algériens, marocains et tunisiens : l’Allemagne ferme la porte aux demandeurs d’asile maghrébin ». 19 janvier 2019. Observalgérie.com.
(38) « Allemagne : une nouvelle loi pour faciliter les expulsions ». RFI. 17 avril 2019.
(39) « Macron : l’immigration en marche forcée ». Polémia. 8 février 2019.
(40) « La France pays de repli pour les demandeurs d’asile ». Le Point. 15 janvier 2019. « Droit d’asile : déboutés en Allemagne, ils affluent en masse ». Le Figaro. 18 mars 2017.