Québec solidaire est divisé sur la question du port des signes religieux. Creusons l’affaire.
Soyons honnêtes, dans nos sociétés, ce débat n’a pas surgi à cause d’une petite croix autour du cou ou de la kippa juive.
Ce sont les symboles liés à l’islam qui troublent.
Ils troublent parce que cette religion s’affirme avec une vigueur que n’ont plus les autres religions dans un Occident qu’on pensait en marche vers plus de laïcité.
Pourquoi ?
Les difficultés de QS sont celles de toutes les gauches occidentales en ce moment.
La vraie question est donc : comment expliquer ce mélange de fascination et de malaise de la gauche moderne devant l’islam ?
Après tout, cette gauche attaque joyeusement le catholicisme. Et Marx n’a-t-il pas dit que TOUTES les religions étaient l’« opium du peuple » ?
Pourquoi la gauche marche-t-elle sur des œufs dès qu’il est question d’une religion en particulier ?
Pourquoi la gauche – historiquement laïque, rationaliste et féministe – se prosterne-t-elle devant une religion qui est tout le contraire ?
Il y a trois explications traditionnelles.
Primo, l’islam serait la religion de ceux qui ont été opprimés par le colonialisme occidental.
Secundo, la classe ouvrière traditionnelle veut accéder à la bourgeoisie et vote souvent à droite. Beurk !
La gauche s’est donc trouvé de nouvelles victimes à défendre : toutes les minorités.
Tertio, comme les musulmans sont de plus en plus nombreux, c’est un réservoir de votes à courtiser.
Tout cela est vrai, mais j’ai une explication supplémentaire à proposer.
La droite libérale, au sens philosophique classique, est sceptique et pragmatique.
Elle n’a guère d’illusions sur la nature humaine : l’homme est un animal égoïste, et la civilisation est un vernis fragile.
Il n’y a pas un bien et un mal, mais d’infinies nuances de gris.
La gauche socialiste est idéaliste. Elle nie la volonté de puissance et l’égoïsme de l’humain, elle nie même qu’il y ait une nature humaine.
Comme l’individu socialiste aspire à la perfection, il fera forcément beaucoup de refoulement, donc de négation de ce que ses yeux voient.
Convergence
Or, dans son essence doctrinale, non pas dans l’islam « soft » de 99 % des musulmans, que dit cette religion ?
Elle dit qu’il est légitime de vouloir faire des gains.
Elle dit qu’il est légitime de contester ce qui peut entraver sa marche en avant.
Elle dit qu’il y a un bien (elle) et un mal.
Pris au pied de la lettre, c’est un noyau dur qui séduit une gauche qui, elle aussi, voit un monde divisé en un bien et un mal, aspire au triomphe du premier, et est absolument convaincue d’avoir toujours raison.
Il y a donc une convergence fondamentale, existentielle, sauf pour une dimension énorme, massive : l’apartheid imposé aux femmes par l’islam « hard ».
D’où le malaise de la gauche, si embarrassant pour elle, mais si divertissant à regarder.