L'ancien plus grand centre d'accueil de migrants en Europe, situé à Mineo, dans l'est de la Sicile, a officiellement fermé mardi en présence de son plus grand détracteur, le ministre de l'Intérieur Matteo Salvini.
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«Le centre ferme et c'est une journée splendide», s'est félicité l'homme fort du gouvernement italien, triomphant. «Nous sommes passés des paroles aux faits!».
«Nous économiserons pas mal d'argent: nous oeuvrons pour trouver un nouvel emploi aux ex-travailleurs du centre, mais la Sicile, Catane et Mineo ne peuvent pas baser leur avenir sur l'immigration», a-t-il dit.
Pour Salvini, l'avenir de l'accueil de migrants est en outre «dans les centres plus petits et plus contrôlés».
Il y a une semaine, les derniers hôtes avaient été transférés du centre de Mineo, près de Catane, vers une autre structure en Calabre.
Mineo avait connu un pic de fréquentation en juillet 2014 avec plus de 4100 pensionnaires, devenant ainsi le plus grand d'Europe avant que sa population ne diminue.
Postés dans ce carré de désert sicilien sous 40 degrés, des militaires interdisent désormais l'accès des lieux. Des chiens errants le ventre creux, longtemps nourris des restes du camp, leur tiennent compagnie.
Massimiliano Terrasi, un psychologue qui travaillait dans le centre depuis octobre 2011, se sent un peu dépossédé.
«Les attentes étaient très élevées à l'origine du centre et nous y avons grandi professionnellement. C'est une expérience que peu de personnes dans le monde ont pu faire», décrit-il.
«Bien géré, cela aurait pu être une richesse pour le territoire et la compréhension des populations», regrette-t-il, en laissant sortir sa «colère» face à tant d'années de travail brusquement stoppées, sans reconnaissance.
À l'origine, les migrants disposaient d'assistance, de conditions sanitaires normales. Mais lorsque leur nombre a dépassé les 3000, les choses se sont gâtées.
«Si l'on parle du fonctionnement final du centre, je trouve ça bien qu'il soit fermé. Mais si l'on considère ce qu'il aurait pu être, je trouve ça dommage», résume le psychologue.
Trop grand, vite dégradé
«Quand le centre est arrivé, j'ai tout de suite pensé que ce n'était pas une bonne chose», critique plus durement Sergio Mastrilli, qui sirote une bière au bar de Mineo, village sicilien typique à proximité.
«Ça n'a pas été un système d'accueil fondé sur l'intégration mais sur le nombre», note cet étudiant en droit de 25 ans.
«Plus de 4000 personnes avec 85 ethnies différentes, quand la ville de Mineo compte environ 5000 habitants, c'était ingérable!», juge-t-il.
Le camp a vu le jour sur une ancienne base militaire logeant les familles des militaires américains en poste sur la base voisine de Sigonella.
L'endroit a des allures de banlieue américaine avec ses 400 petites maisons jaunes et roses alignées. Les États-Unis avaient annoncé fin 2010 qu'ils résiliaient leur contrat de location.
L'installation du centre dans une telle structure a provoqué l'inquiétude des habitants de la région, voire la jalousie chez les Siciliens dans le besoin.
On a aussi reproché aux étrangers de casser le marché des travailleurs journaliers au moment de la récolte d'oranges, car ils étaient prêts à travailler sans être déclarés pour 10 à 20 euros par jour.
Mais le centre a aussi été une manne en employant jusqu'à 400 salariés locaux. Le nouveau maire de Mineo, Giuseppe Mistretta, a d'ailleurs menacé de démissionner si l'État n'aidait pas sa commune à faire la transition.
Une cinquantaine d'ex-employés et syndicalistes ont par ailleurs manifesté mardi à l'occasion de l'arrivée de M. Salvini avec une banderole proclamant : «Les funérailles de Mineo et du Cara (le centre d'accueil) sont célébrées aujourd'hui».
Plusieurs enquêtes judiciaires sont en cours, impliquant notamment l'ancienne mairesse de Mineo et l'ancien directeur du centre. Les soupçons vont de la corruption dans l'attribution de marchés à la création de faux bagdes pour gonfler les chiffres car chaque migrant avait droit à une somme journalière fixe de l'État.
En janvier, la police a même démantelé une cellule mafieuse nigériane basée au coeur du centre, gérant un trafic de cocaïne et de marijuana ainsi qu'un réseau de prostitution.