Le ministre de l’Énergie Pierre Moreau a laissé planer le doute, hier, sur sa confiance envers le PDG d’Hydro-Québec, Éric Martel, qui a tiré à boulets rouges cette semaine sur un projet éolien appuyé par le gouvernement.
Le cabinet du ministre n’a pas démenti les informations circulant à savoir que M. Moreau souhaiterait démettre M. Martel de ses fonctions, en raison de ses prises de position.
« Je ne connais pas la source de qui aurait pu dire ça. Ce que le ministre souhaite, c’est que les négociations puissent se conclure et surtout que le projet se réalise. C’est plus important que les individus en cause », a déclaré par écrit la porte-parole, Catherine Poulin.
Pressée de préciser si M. Moreau maintient sa confiance envers M. Martel, Mme Poulin n’a donné aucune suite à notre demande. De son côté, le cabinet du premier ministre Philippe Couillard a refusé de commenter la situation.
Retombées incertaines
Dans une lettre obtenue et publiée cette semaine par notre Bureau d’enquête, M. Martel juge que le projet éolien Apuiat est « difficilement recommandable ».
Selon le PDG de la société d’État, les retombées économiques du projet sont incertaines, particulièrement pour la nation innue qui est l’un des partenaires. Hydro-Québec estime que dans sa forme actuelle, le contrat d’achat d’électricité de ce parc éolien, d’une durée de 25 ans, lui occasionnerait des pertes estimées entre 1,5 milliard $ et 2 milliards $.
Des informations obtenues d’une source chez Hydro-Québec qui a requis l’anonymat indiquent que la seule redevance garantie aux Innus est une somme annuelle de 500 000 $, malgré des revenus entre 1,5 milliard $ et 2 milliards $.
« Où va l’argent, c’est la grosse question qu’on se pose tous. On n’a pas de réponse. On ne sait pas où va l’argent », affirme-t-on à l’intérieur de la société d’État.
Un partage des profits nets pourrait s’ajouter à cela. Mais selon l’analyse d’Hydro-Québec, cette possibilité est hypothétique. Les partenaires privés des Innus, Boralex et Société renouvelable Canada, ont la possibilité d’imposer divers frais qui pourraient pratiquement annuler toute possibilité de profit net, indique-t-on.
QUI VA Y GAGNER ?
Dans une vidéo diffusée en 2016 sur le site web du projet Apuiat, un porte-parole de Boralex (photo du haut) expliquait qu’une seule communauté innue était assurée de recevoir une redevance.
« Le projet verserait des redevances à la communauté de Uashat-Maliotenam, en tant qu’hôte du projet. On parle d’environ 500 000 $ qui serait versée sur une base annuelle pendant toute la durée de vie du projet », déclarait Rafaël Bourrellis, directeur développement et acquisition chez Boralex.
M. Bourrellis évoquait des investissements de 600 millions à 700 millions $ pour le parc de 200 MW, qui créerait jusqu’à 400 emplois pendant la phase de construction et entre 10 et 15 durant les 25 années d’exploitation.