De nombreux catholiques pratiquants ont préféré la liste de la majorité à celle des Républicains lors des européennes, ce qui explique en partie le très faible score du parti de droite.
Leur voix est d’autant plus précieuse qu’ils sont très mobilisés à chaque scrutin. Les « catholiques pratiquants » ont très majoritairement voté à 37 % pour la liste LREM lors des élections européennes, selon un sondage Ifop pour la Croix publié lundi soir. Loin, très loin devant les Républicains menés par François-Xavier Bellamy, qui n’ont obtenu que 22 % des voix dans cet électorat qui leur est traditionnellement favorable.
Cet écart se percevait déjà dans les cartes du vote par parti aux européennes, que nous avions réalisées. LREM a notamment réalisé des scores importants dans l’Ouest du pays, une terre où « il y a historiquement un fort ancrage du vote catholique du centre-droit », note le politologue Olivier Rouquan.
Carte du vote LREM/Cellule Data Le Parisien
Ce score de 37 % en faveur de la liste de Nathalie Loiseau a d’autant plus de poids que 78 % des catholiques pratiquants disent avoir voté, soit près de 30 points de plus que la participation globale.
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Le style et les actes de Macron ont séduit les catholiques
Surtout, « Emmanuel Macron était à 19 % chez les catholiques pratiquants à la présidentielle 2017 », souligne Jérôme Fourquet, directeur Opinion et stratégie de l’Ifop, également interrogé par le Parisien. Alors comment est-on passé quasiment du simple au double ? Le sondeur y voit trois raisons principales. D’abord, « le style et le ton d’Emmanuel Macron ont pu satisfaire ces catholiques modérés qui sont très soucieux d’unité et de pondération », indique-t-il.
Il y a aussi tous ces actes réalisés par le chef de l'Etat depuis son élection : discours à la Conférence des évêques lors duquel il a défendu le « lien » entre l’Église et l’Etat qu’il voulait « réparer », volontarisme affiché pour la reconstruction de Notre-Dame, etc. « Il y a eu à la fois des marques symboliques d’incarnation très forte, et des marques de proximité » avec la communauté catholique, note le politologue Olivier Rouquan. Et de rappeler que « dès sa campagne, l’actuel président avait donné des signes d’un rapport assez apaisé avec l’Église catholique ».
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Le troisième facteur est spécifiquement lié à ces élections européennes. « Les catholiques français ont été l’un des courants à avoir le plus soutenu la construction européenne », souligne Jérôme Fourquet. Le discours pro-Europe d’Emmanuel Macron, qui s’est posé en « rempart » contre les populistes et les nationalistes, a donc pu les sensibiliser. « J’ai voté Macron car je veux lui donner le maximum de chances de réussir pour l’Europe et pour mes enfants », témoigne Jean-Louis, un retraité parisien de 67 ans qui fait partie de ces « catholiques réguliers » allant à la messe chaque dimanche et votant traditionnellement à droite.
La PMA, sujet sensible pour les catholiques
Autre élément significatif du sondage de l’Ifop : plus ces catholiques disent avoir une pratique « régulière » de leur religion, plus l’écart se creuse en faveur de la liste de la majorité. 43 % des pratiquants réguliers disent avoir voté LREM, et 20 % pour LR. « Plus pratiquant ne veut pas dire plus traditionaliste, ni Sens commun [le nom de l’émanation politique de la Manif pour tous, NDLR] », souligne Olivier Rouquan. Le profil de François-Xavier Bellamy, la tête de liste des Républicains, connu pour sa défense des valeurs traditionnelles de la droite, n’aura donc pas eu l’impact escompté.
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Ce « siphonnage » des voix de l'électorat catholique par LREM n'est qu'une illustration de « l'OPA réalisée par Macron sur la droite » lors ces élections européennes, pointe Jérôme Fourquet. La liste LR s'est d'ailleurs effondrée, avec un score de 8,48 %.
Mais il faut rester prudent pour la suite. Les débats sur la fin de vie, relancés par l’affaire Vincent Lambert, ou la proposition de loi à venir pour légaliser la PMA pour toutes pourraient rebuter une partie de cet électorat. « Je ne suis pas favorable à certaines prises de position sociétales de LREM, et la PMA me pose problème » glisse d’ailleurs Jean-Louis, à l’unisson de nombreux catholiques pratiquants.
« C’est sûr que la PMA ne leur fera pas plaisir, mais Macron aura à cœur de le faire sans prendre de posture martiale », estime Jérôme Fourquet. Et pour ne pas donner le sentiment d' « humilier » la communauté catholique, ce qu’il avait reproché à François Hollandevis-à-vis des anti-mariage pour tous.